« Je vais voter à l’extrême-droite, pourtant je suis un Franco-Algérien ». Cette phrase prononcée par un Franco-Algérien dans le micro de l’émission Envoyé spécial de France 2 déchaîne la toile à dix jours des législatives anticipées qui placent l’extrême-droite aux portes du pouvoir en France.
La séquence diffusée jeudi sur la plateforme X a été vue plus d’un million de vue. Elle a été partagée plus de mille fois et largement commentée. Parfois les réactions sont acerbes. Ce Franco-Algérien a été lynché sur les réseaux sociaux. Que ce soit du côté des partisans ou des adversaires de l’extrême-droite, les critiques fusent, avec comme élément commun le mépris.
🔴 « Je vais voter à l’extrême droite, pourtant je suis un Franco-algérien. »
À Breteuil, plus d’un électeur sur deux a voté pour le Rassemblement National aux européennes.
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— Envoyé spécial (@EnvoyeSpecial) June 20, 2024
Législatives en France : les Franco-Algériens et le RN
La petite phrase du Franco-Algérien fait mal aux Algériens et à ses compatriotes de la même origine. Il est accusé par les uns de trahison vis-à-vis des siens.
De l’autre bord, il ne semble pas le bienvenu. Certains doutent de sa sincérité en le soupçonnant de vouloir voter RN pour protéger ses acquis sociaux dans une France « généreuse » pour les étrangers.
Le RN promet en effet de réduire drastiquement l’immigration notamment maghrébine et de supprimer certains droits sociaux aux étrangers en situation régulière en France.
Ce Franco-Algérien cristallise toutes les contradictions d’une France fortement divisée la veille d’un scrutin décisif.
Son argument pour donner sa voix au RN est pourtant partagé par un certain nombre de Français mécontents de la politique du président Emmanuel Macron et notamment de son projet de réforme des retraites.
« J’ai 43 ans, c’est-à-dire je vais sortir en retraite à l’âge de 64-65 ans. C’est trop, je ne vais pas en profiter. C’est notre président qui nous a poussés à voter RN. On n’a pas trop le choix », a-t-il justifié.
Pour de nombreux Franco-Algériens qui ont réagi sur X, cet argument ne pèse pas lourd face aux enjeux des législatives anticipées du 30 juin et du 7 juin et qui peuvent porter au pouvoir les héritiers de Jean-Marie le Pen.
Les héritiers de Jean-Marie Le Pen aux portes du pouvoir en France
Dans ce contexte, la situation des Franco-Algériens semble la plus délicate en raison de l’historique du Rassemblement national, ex-Front national, le parti fondé par Jean-Marie Le Pen qui est accusé d’avoir pratiqué la torture durant la guerre d’Algérie.
L’éventualité de l’arrivée du RN à Matignon inquiète de nombreux Franco-Algériens en raison de l’hostilité affichée de ce parti à l’Algérie et aux Français d’origine algérienne.
Le RN a voté en décembre en faveur de la suppression de l’accord franco-algérien de 1968 sur l’immigration, et prône une ligne dure à l’égard d’Alger sur les questions liées à l’immigration. Avec Les Républicains, il plaide pour un rééquilibrage de la politique française au Maghreb en faveur du Maroc, et au détriment de l’Algérie.
Une victoire de l’extrême-droite aux législatives pourrait plonger les relations franco-algériennes, déjà complexes et difficiles, dans une crise inédite. Mais les jeux ne sont pas faits et le RN n’est pas encore assuré de remporter une victoire écrasante le 30 juin.
Trois ensembles politiques se disputent les suffrages des Français : l’extrême-droite avec le RN en tête, le Nouveau front populaire qui réunit les partis de gauche et les écologistes et le camp du président Macron.
Vainqueur des Européennes du 9 juin dernier avec plus de 31 % des suffrages, le RN qui est le principal parti d’extrême-droite en France est en tête du premier tour des législatives avec 35 % des intentions de vote contre 27 % pour le Nouveau front populaire et 20 % pour le camp macroniste, selon un sondage OpinionWay pour CNews, Europe 1 et « Le Journal du Dimanche« , publié ce vendredi.