Les élections législatives du 12 juin dernier ont été boycottées par les principaux partis de l’opposition.
Le scrutin, qui n’a pas connu une forte participation (23,03 %), a été remporté par les forces traditionnellement proches du pouvoir, avec le FLN en tête avec 105 sièges sur 407, suivi des indépendants (78), du MSP (64) et du RND (57 sièges).
Si les regards demeurent braqués sur ce que décideront les états-majors de ces partis quant à la formation du futur gouvernement, la réaction des formations de l’opposition, qui ont boycotté l’élection, était aussi très attendue.
| Lire aussi : Lancement d’une initiative pour former une Alliance présidentielle à l’APN
Alors que le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) avait réagi dès le lendemain du scrutin, qu’il l’a qualifié de « farce électorale », le Front des forces socialistes (FFS) et le Parti des Travailleurs (PT) ont attendu une semaine pour le faire.
Les deux partis ont mis à profit la tenue d’activités organiques respectives vendredi 18 juin pour faire connaitre leur avis sur le scrutin et ses résultats. Les deux formations politiques ont mis l’accent sur le taux d’abstention record.
Youcef Aouchiche, premier secrétaire du FFS, a estimé, dans une intervention à l’ouverture de la conférence des élus du parti, que les résultats du scrutin du 12 juin étaient la conséquence du « passage en force » du pouvoir.
Contrairement au FFS et au PT, le FFS avait tergiversé avant de prendre la décision de boycotter les législatives. Le 14 février, une délégation du parti avait été reçue par le président de la République Abdelmadjid Tebboune dans le cadre de ses consultations avec la classe politique.
La rencontre, et les déclarations des responsables du parti qui l’ont suivie, avaient été interprétées comme le prélude à la participation du plus vieux parti d’opposition en Algérie au scrutin du 12 juin. Mais le conseil national du parti a décidé le 3 avril, de ne pas y participer, après notamment une forte pression exercée par la base.
Le FFS avait insisté, y compris au cours de sa rencontre avec le chef de l’État, sur l’apaisement du climat politique. Le parti fondé par feu Hocine Ait Ahmed avait en outre lancé une énième initiative, la tenue d’une « convention nationale consensuelle rassemblant toutes les forces vives de la société, et ce, en vue de dégager une feuille de route consensuelle ». L’initiative n’a pas trouvé d’écho, ni auprès du pouvoir ni du côté de l’opposition.
Aujourd’hui, il constate que le boycott massif du scrutin est le résultat du refus absolu du pouvoir « de toute solution politique en mesure d’ouvrir de nouveaux horizons pour le pays ».
Le FFS renoue avec sa posture dure
Pour Youcef Aouchiche, les Algériens ont asséné « un coup dur pour le pouvoir qui ne cesse de se vanter et de s’efforcer à défendre, auprès de l’opinion nationale et internationale, la réussite et le bien-fondé de sa feuille de route ». « Toute autre lecture ou justification de cette abstention massive n’est que forfaiture et fuite en avant », estime-t-il.
Le premier secrétaire du FFS a réitéré son appel à l’ouverture d’un dialogue exclusif, mais ses propos tranchent avec le ton modéré qu’il avait adopté dans les premiers mois de l’année. Il juge même que « l’Algérie nouvelle » « semble se calquer cruellement sur celle d’avant la révolution citoyenne du 22 février ». Le retour du FFS à une posture dure vis-à-vis du pouvoir est peut-être l’une des premières conséquences du scrutin du côté de l’opposition.
Le jugement du Parti des Travailleurs n’est pas moins critique. « Le rejet est une manière de punir le système », « battu à plate couture », a estimé sa secrétaire générale Louisa Hanoune, à l’ouverture d’une réunion du bureau politique, vendredi.
Le système n’est ni renouvelable ni réformable et s’appuie sur une minorité fragile, a-t-elle estimé. Ce qui ne manquera pas, selon elle, d’aggraver davantage la crise du système et de « fragiliser encore un peu plus ses institutions ». Pour Louisa Hanoune, les résultats des législatives s’inscrivent dans la continuité du mouvement populaire du Hirak « qui ne se résume pas aux marches hebdomadaires ».
Avant ces deux partis, le RCD avait fait connaitre son avis moins de 24 heures après la fermeture des bureaux de vote, soit avant l’annonce des résultats.
« Les farces électorales dans le pays se suivent, se complètent et continuent d’approfondir le fossé entre le pouvoir et le peuple. La dernière en date est désormais symptomatique d’une inconscience des dirigeants sur l’impact hasardeux de leur politique sur la nation », a estimé le parti dans un communiqué rendu public dimanche 13 juin.
Le parti de Mohcine Belabbas a dénoncé « le gonflement et les triturations éhontés des taux de participation ».
Ces pratiques, selon le RCD, « confirment que la fraude électorale est le moyen privilégié de la cooptation et du maintien au pouvoir de la clientèle du régime » et « renseignent, plus que tout autre discours, sur l’illusion entretenue par les décideurs quant à une volonté de combattre la corruption et de sortir d’un système mafieux et rentier ».
« En fin de compte, c’est la persévérance du peuple algérien dans son action pacifique guidée par son ambition pour l’instauration de l’État de droit démocratique qui a fait encore une fois la différence », a conclu le RCD.