Les étudiants, les enseignants et les syndicalistes sont sortis nombreux, ce mercredi 10 avril, dans les rues d’Alger exprimer leur refus de la désignation d’Abdelkader Bensalah comme président intérimaire de l’État pour une durée de 90 jours.
« Bensalah dégage ! » est é le slogan le plus partagé à la place de la Grande Poste par les manifestants. Certains présents dénoncent le recours de la police à la manière forte contre les étudiants et contre les syndicalistes.
« Comment, hier, vous étiez avec nous et aujourd’hui vous nous frappez ? », s’interroge, en colère, un enseignant en s’adressant à des policiers empêchant le passage des manifestants vers le lieu de rassemblement. « Mais, apprenez à dire Non, prenez position, vous êtes avec nous ! », insiste-t-il. Les policiers restent imperturbables.
Une femme s’approche, elle aussi, des agents en tenue et casques bleus. « Mes enfants, ce que nous faisons, c’est pour vous, laissez nous marcher », lance-t-elle, applaudie par la foule. Deux jeunes policiers paraissent gênés, baissent la tête. Plus loin, une autre enseignante crie : « Mais, vous faites partie du peuple, de nous, ne les soutenez pas, pensez vous aussi à vos enfants, à l’avenir ».
« Ni leur gaz ni leur eau ne nous feront plier »
Riad, un étudiant de l’Université de Bab Ezzouar, dit avoir « bu de l’eau et du gaz », mardi 9 avril, mais ne veut pas céder. « Nous étions pacifiques, nous le resterons davantage, pas question de leur donner l’occasion de nous pousser à la violence, désormais nous avons tout et bien compris », dit-il.
Mécontent, Farouk, ami de Riad, reprend : « Nous ne voulons pas de la bande, Bouteflika ou Bensalah, c’est la même chose. Nous ne voulons pas d’eux, ni leur gaz ni leur eau ne nous ferons plier. Qu’ils le sachent, une fois pour toute ».
Mohamed, la soixantaine, a de la peine, retient difficilement ses larmes. « Pourquoi ont-ils frappé nos étudiants? Hier, c’était les médecins et aujourd’hui les étudiants? Que veulent-ils enfin? Les faire tous partir? », se demande-t-il. « Vous devriez écrire, sans rien couper, que nous n’allons pas céder, hors de question de revenir à nos maisons, hors de question de les laisser voler encore le pays. L’Algérie nous appartient, nous avons décidé de la reprendre. M’entendez vous, de la reprendre ! », appuie Mohamed.
« Ayez honte Bensalah, ayez honte. Tu es âgé, respecte ton âge, respecte ce peuple. Bezzaf, dégage ! », lance Salim qui dit avoir quitté son poste de travail pour sortir crier sa colère contre le président intérimaire. Farida et Iman sont des étudiantes en sciences sociales. Elles sont sorties, elles aussi, pour « libérer » le pays. « La répression ? Et alors ? Nous allons débarasser le pays de la bande. Nous sommes décidés. Nous irons jusqu’au bout, aujourd’hui, demain et après demain. Yetnahaw gaa ! », crient-t-elles.
« Cela fait vingt ans qu’ils répriment, à quoi cela a-t-il servi ? »
Kamel dit que le peuple veut «récupérer » son bien. « C’est le sens que je donne aux articles 7 et 8. Le pouvoir nous appartient, nous le peuple. Nous allons l’arracher s’il le faut, rien nous ne fera reculer, rien. Nous refusons l’application de l’article 102, nous ne voulons pas de Bensalah », dit-il.
Une universitaire d’Alger intervient pour dire que les algériens ne craignent pas la répression. « Cela fait vingt ans qu’ils répriment, à quoi cela a-t-il servi ? Sommes nous revenus en arrière ? Non. Ils se trompent lourdement. Désormais, nous ne reconnaissons ni Bensalah, ni le gouvernement Bedoui, ni les deux chambres du Parlement ni le Conseil constitutionnel. Qu’ils partent tous. Et quand je dis qu’ils partent, ils partiront », promet-elle.