search-form-close
« Les Algériens ne s’intéressent pas suffisamment à l’art »

« Les Algériens ne s’intéressent pas suffisamment à l’art »

Architecte de formation, Mohamed Chafa Ouzzani est artiste peintre. Il s’illustre dans l’abstrait, le semi-abstrait, le semi-figuratif et le portrait. Dans cet entretien, il revient sur son parcours,  ses sources d’inspiration et sur le rôle de l’État dans la promotion de l’art en Algérie.

Parlez-nous de votre parcours?

Je suis architecte de formation, et passionné de peinture depuis très longtemps. Mon parcours est quelque peu intermittent. J’ai réalisé ma première exposition alors que j’étais étudiant à l’université.

Je me suis intéressé très tôt à la théorie et à l’histoire de l’art. Mes études en architecture m’ont aidé dans ce domaine étant donné qu’il y’a de nombreuses similitudes entre les deux disciplines, particulièrement en terme d’évolution des tendances.

Puis dans les années 90, j’ai travaillé le style semi-figuratif. Mais en raison de la décennie noire, je n’ai pas eu l’occasion de beaucoup exposer durant cette période-là.

 En parallèle, je m’occupais de mon bureau d’architecte à Bejaia. Ensuite, viennent les années 2000, durant lesquelles je me suis encore un peu plus détaché de la peinture pour m’occuper de mon bureau. C’était une période de recul, mais qui m’a permis toutefois par la suite de revenir avec plus de motivation.

Quel est votre style et quelles sont vos sources d’inspiration ?

Après la période de recul que je viens d’évoquer, je suis revenu à un autre style de peinture non figuratif. Je suis passé du semi figuratif pour aller vers  plus d’abstraction.

Une peinture semi-abstraite où je donne plus d’importance au travail de la composition et au travail de la couleur. J’essaye de véhiculer des messages émotionnels plutôt qu’un message idéologique.

Je recherche des émotions visuelles et esthétiques qui peuvent être induites par le travail de la matière, de la composition, de la construction de l’œuvre, et de sa morphologie de façon générale.

C’est très difficile de parler de style. Je travaille spontanément, il y’a beaucoup d’improvisation dans mon travail. J’intègre parfois des éléments de notre symbolique culturelle, et des éléments de mon vécu personnel .

Qu’aimez-vous le plus dans votre métier d’artiste peintre?

C’est un monde qui est différent des autres, qui est loin du matérialisme ambiant. On y retrouve beaucoup de spiritualité, beaucoup de profondeur.

Pensez-vous que les Algériens s’intéressent suffisamment à l’art? 

Malheureusement non. C’est un souci. Pour le constater, il suffit de comparer le nombre de visiteurs du musée des beaux-arts d’Alger, qui est un très beau musée, et qui abrite la plupart des collections d’art d’Afrique,  au nombre de visiteurs du musée du Louvre à Paris (près d’un million de visiteurs par mois).

En Algérie, nous n’avons pas la culture de la consommation de l’art. Il y’a tout un travail qui doit être fait dès le jeune âge, et à l’école pour que l’enfant aient une culture visuelle et esthétique.

Ce que fait le gouvernement pour la promotion de l’art en Algérie est-il suffisant ?

Pour qu’il y ait des consommateurs d’art, il faut qu’il y ait une volonté politique. L’État doit être le premier impliqué dans la promotion de l’art. Tout d’abord, il faut penser à développer le tourisme. Le tourisme et l’art vont de pair.

Un artiste est un ambassadeur de son pays et un ambassadeur culturel. Il faudrait que les administrations et les établissements publics s’impliquent. Je trouve ça personnellement dommage que le siège d’un ministère, qui a peut-être coûté des milliards pour sa réalisation, ne puisse pas investir pour mettre sur ses murs des œuvres authentiques de plasticiens algériens.

C’est tout d’abord un investissement, et une façon d’encourager les artistes algériens.  Que ce soit les ministres, les banques algériennes, les sièges d’ambassades, ils devraient être tous présents  aux vernissages pour faire l’acquisition d’œuvres d’art, et pour essayer de constituer des collections, et des cercles de collectionneurs. Cela encouragera les artistes algériens à continuer à travailler, et à vivre de leur art.

Actuellement, un artiste peintre algérien peut-il vivre uniquement de son métier ?

Non, mise à part quelques-uns qui ont peut-être réussi avec le temps, à se construire une image et un nom, et qui sont sollicités. Mais pour la plupart des artistes peintres, notamment ceux de l’intérieur du pays, qui ont par ailleurs énormément de talent, ils n’arrivent pas à écouler leurs œuvres d’art.

Il y’a également un  souci géographique. En Algérie, l’art est quasiment exclusivement concentré dans la capitale. En dehors d’Alger, il n’y a pratiquement plus de galeries, plus d’art, et plus de médiatisation.

À titre d’exemple, un artiste de Aïn Témouchent pour faire prévaloir son art, doit venir à Alger. Ce n’est pas du tout évident. Il y’a aussi beaucoup de rejet et de difficultés.  Beaucoup de choses restent à faire.

Pour avoir un aperçu des toiles de M.Mohamed Chafa Ouzzani vous pouvez consulter sa page Facebook

  • Les derniers articles

close