Après trois semaines d’attente, le gouvernement Bedoui a finalement été annoncé hier soir. A la place de l’équipe de « compétences » promise au départ, les Algériens ont eu droit à un Exécutif qui semble avoir été finalisé dans la précipitation pour répondre à l’impatience de l’état-major de l’armée.
Durant trois semaines de tractations, M. Bedoui n’a pas réussi à convaincre une seule vraie compétence. Dans l’équipe actuelle, il est difficile de faire ressortir un seul CV pertinent : entre figures inconnues et hauts fonctionnaires de ministères promus, l’équipe Bedoui aura beaucoup de mal à convaincre les Algériens. Hier soir, des manifestations nocturnes ont eu lieu dans plusieurs villes, dont Alger, pour dénoncer la nouvelle équipe. Des appels à manifester vendredi sont lancés sur les réseaux sociaux où les Algériens expriment leur colère.
Par ailleurs, la nomination de Mohamed Loukal au ministère des Finances et le maintien de Mohamed Djellab au Commerce a de quoi inquiéter dans un contexte économique difficile et au moment où les Algériens redoutent une fuite massive de capitaux. Le premier, qui occupait jusque-là le poste de Gouverneur de la Banque d’Algérie, symbolise la planche à billets et l’incapacité de la banque centrale à endiguer les fuites de capitaux. Le second a échoué à réduire les importations et renforcer les exportations.
Mais, plus que sa composante, c’est l’annonce de la nouvelle équipe au lendemain du coup de gueule de l’armée qu’il faut retenir. La nomination de l’équipe Bedoui porte clairement l’emprunte d’un accord entre l’état-major de l’ANP et la présidence de la République. Elle est le prélude à la démission du président Bouteflika qui devrait intervenir maintenant très rapidement (Lire notre analyse).
Les grandes manœuvres vont maintenant commencer. L’armée, désormais en première ligne face au peuple – Gaid Salah est numéro deux du gouvernement -, va devoir donner de sérieuses garanties sur ses intentions pour la transition. Comme Bouteflika après l’annonce de son faux-départ le 11 mars, Gaid Salah est aujourd’hui soupçonné, à juste titre, de vouloir imposer une transition gérée par le régime via l’application de l’article 102. Ce que les Algériens ont refusé pour Bouteflika, vont-ils l’accepter pour Gaid Salah ? Très peu probable.