À peine 1% de réduction de la facture des importations pour une maigre économie de 289 millions de dollars durant les sept premiers mois de l’année.
Malgré les licences d’importations, toujours en vigueur pour l’automobile et la liste de près d’un millier de produits interdits à l’importation instaurée dès la fin de l’année dernière, les statistiques des douanes montrent une forte résistance des importations.
Comment expliquer un résultat aussi modeste malgré mesures protectionnistes aussi spectaculaires qui ont failli déclencher une crise avec l’Union européenne ? Depuis le départ forcé de Mohamed Benmeradi, le ministère du commerce fait profil bas. Son successeur Said Djellab évite d’afficher des objectifs chiffrés en matière de réduction des importations qui sont rapidement démentis par les faits.
Principale explication : « Il est illusoire d’envisager une réduction des importations dans un contexte de relance des dépenses publiques », résume un économiste.
Vers des importations de plus de 45 milliards de dollars en 2018
2018 avait pourtant bien commencé. Durant les deux premiers mois de l’année, on enregistrait en effet une baisse importante des importations, réduites de près de 11 % par rapport à la même période de l’année dernière. Fin mars les choses commençait déjà à se gâter avec des importations réduites de seulement 6% au premier trimestre. Les résultats à fin juin annonçaient une diminution d’un peu moins de 500 millions de dollars (-2,1%) au premier semestre. Plus que 1 % de diminution à fin juillet.
La tendance est désormais claire : les importations devraient, selon toute vraisemblance, rester nettement supérieures à 45 milliards de dollars pour l’ensemble de l’année en cours (contre 46 milliards de dollars en 2017), mettant de nouveau sur la sellette le dispositif administratif de contrôle des importations.
Dans ce domaine, les droits de douanes additionnels introduits au mois de juillet et qui devraient entrer en vigueur durant ce mois de septembre, en dépit de leur niveau spectaculairement élevé – jusqu’ 200% sur certains produits- ont en réalité très peu de chances d’avoir un impact notable sur le montant des importations du fait qu’ils ne s’appliquent qu’à un nombre limité de produits dont le poids dans le bilan des importations n’est pas significatif .
La facture alimentaire toujours en hausse
En plus de l’échec des mesures administratives, ces chiffres montrent une autre réalité : une partie des importations sont incompressibles du fait de leur nature : consommation alimentaire, médicaments et investissements.
En entrant dans le détail des résultats communiqués par les douanes, à la fin juillet 2018, les importations de biens de consommation alimentaire sont encore en hausse de près de 1% par rapport à l’année dernière en dépassant déjà la barre des 5 milliards de dollars. Une analyse plus fine révèle en réalité que les importations de produits alimentaires sont essentiellement boostées par les achats de céréales qui ont augmenté de plus de 8% depuis le début de l’année.
En revanche les importations de sucre et sucreries sont bien en baisse sensible de près de 20 %.
La facture globale reste stimulée par des prix intérieurs fortement subventionnés notamment pour les céréales et les produits laitiers.
Médicaments et CKD en très forte augmentation
Les importations de biens de consommation non alimentaires sont en hausse de 13,4 % depuis le début de l’année, pour un montant 5,5 milliards de dollars à fin juillet.
Dans ce domaine, la facture s’alourdit essentiellement en raison de l’augmentation considérable des achats de médicaments qui sont en hausse de plus de 30 % depuis le début de l’année en cours sans qu’aucune explication ait été donné pour l’instant à ce sujet.
Les importations de collections CKD pour le montage autombile, qui sont classées comme des biens de consommations par les douanes algériennes, affichent une hausse considérable de près de 70 % liée à la montée en régime des usines de montage.
Une diminution paradoxale des importations de biens d’équipement
Dans un contexte marqué par la relance des dépenses d’équipement de l’Etat, le résultat le plus surprenant concerne une diminution très sensible des importations de biens d’équipement.
C’est ainsi, qu’à la fin juillet, les biens d’équipements industriels ont été importés pour 7,6 milliards de dollars contre 8,5 milliards l’année dernière soit une baisse importante de près de 11 %.
Même résultat pour la facture d’importation des biens d’équipements agricoles qui s’est établie à 333 millions de dollars contre 391 millions (-14,8%).
Cette tendance préoccupante ne date d’ailleurs pas de cette année et les importations de biens d’équipements avaient déjà enregistré une baisse de 8,4% en 2017 qui semble pour l’instant s’amplifier sensiblement en 2018 en dépit de la relance des dépenses publiques.
Un début de diversification des exportations
Côté exportations, en dehors d’une augmentation des vente d’hydrocarbures (de plus de 17 %) due à la hausse des prix du baril, la seule bonne nouvelle apportée par les dernières statistiques des douanes concerne , une fois n’est pas coutume, les exportations hors hydrocarbures. En augmentation très sensible (de près de 50 %), elles représentent à fin juillet pas loin de 7 % de nos exportations pour un montant de 1,63milliards de dollars et pourrait bien franchir la barre des 3 milliards de dollars en fin d’année.
Elles sont composées en grande partie de demi-produits ( pétrochimie et engrais) , pour 1,2 milliards de dollars, mais aussi de biens alimentaires pour 224 millions de dollars , dont 144 millions de dollars de sucres de canne ou de betterave et 45 millions de dollars de dattes. Les dattes ont notamment connu une hausse remarquable de 48% dans les exportations durant les sept premiers de l’année.
On observe également un net début de diversification avec 54 millions de dollars de biens d’équipement industriels exportés et près de 18 millions de machines à laver le linge qui ont également été exportés durant les sept premiers mois de 2018.
Fournisseurs : la Chine perd du terrain
Si les mesures de contingentement des importations semblent être impuissantes à réduire et surtout réorienter significativement nos approvisionnements à l’extérieur, elles semblent en revanche produire des résultats sensibles dans le classement et les parts de marché respectives de nos principaux fournisseurs.
A fin juillet 2018, la Chine est encore en tête de nos fournisseurs avec près de 15 % des importations algériennes, mais le montant des importations en provenance de ce pays est en très forte baisse de plus de 20 %.
Le fournisseur chinois est désormais suivi de près par un groupe compact de pays européens (France , Italie , Espagne , Allemagne ) dont la part de marché est en augmentation sensible ( de près de 10 %) depuis le début de l’année et la mise en place du dispositif de suspension de certaines importations.
C’est donc, pour des raisons encore inexpliquées, le fournisseur chinois et non pas la facture d’importation globale ou les biens de consommation qui constitue pour l’instant la principale victime des mesures de contingentement des importations mises en place depuis le début de l’année.