Société

Les ratées de la rentrée scolaire 2023-2024 en Algérie

Onze millions d’élèves des différents cycles ont fait leur retour en classe le 19 septembre dernier en Algérie. La rentrée scolaire 2023-2024 a été marquée par une polémique sur le retard de l’annonce de la date cette rentrée.

La généralisation de l’enseignement de l’anglais au primaire figure parmi les causes de ce retard dans le retour des élèves algériens à l’école.

Pour assurer l’enseignement de l’anglais qui a été introduit en 3e année primaire l’année passée, le ministère de l’Éducation nationale a recruté des enseignants pour dispenser les cours de la langue de Shakespeare pour les élèves de quatrième année du cycle primaire.

Rentrée scolaire « ratée » pour le Satef, « difficile » pour le Cnapeste

Deux semaines après le retour des élèves algériens sur les bancs de l’école, Boualem Amoura, le secrétaire général du syndicat des travailleurs de l’éducation et la formation (Satef), estime que la rentrée 2023-2024 est « ratée ».

« On ne peut pas dire que la rentrée scolaire 2023-2024 a été une réussite. Jusqu’à présent il y a un manque d’enseignants dans certaines écoles. On peut citer le cas d’une école à Ain Benian où une classe de terminale filière mathélème est toujours sans professeur de mathématiques, matière essentielle. Et ce n’est pas un cas isolé », développe Boualem Amoura.

Le SG du Satef s’interroge sur le rôle des associations des parents d’élèves dans les écoles où certaines classes sont toujours sans professeurs. Boualem Amoura cite l’exemple d’un CEM à Ain Defla où les collégiens d’un village n’ont pas encore repris en raison de l’absence d’un établissement capable de les accueillir. Les élèves sont à 1.200 dans un CEM conçu pour accueillir 600 collégiens, selon le SG du Satef.

En Algérie, les rentrées scolaires « se suivent et se ressemblent. On en est toujours à parler des mêmes faux problèmes. On ne tire pas de leçons du passé », ajoute-t-il.

Le président du Cnapeste, Messaoud Boudiba parle lui d’une « rentrée difficile ». « C’est une rentrée marquée par de nombreux problèmes. Jusqu’à aujourd’hui, il y a toujours des problèmes de surcharge des classes, de manques d’infrastructures scolaires. On peut également évoquer le manque dans l’encadrement administratif et pédagogique. Beaucoup de problèmes attendent toujours d’être résolus », a déclaré Messaoud Boudiba.

Dimanche, lors de la réunion du Conseil des ministres, le président Abdelmadjid Tebboune a ordonné au gouvernement « d’achever, dans un délai de deux semaines au plus tard, l’équipement des écoles, réaménagées ou nouvelles, en coordination avec les walis ». Le nombre d’écoles concernées par cette opération n’a pas été précisé.

L’anglais au primaire : les syndicats de l’éducation sceptiques

Sur l’enseignement de la langue anglaiss dans le cycle primaire, Messaoud Boudiba estime qu’il s’agit d’un fait accompli.

« Le fait est que l’enseignement de l’anglais au primaire est une réalité. Nous avons mis en garde l’année dernière contre la précipitation dans le lancement de ce chantier », a-t-il rappelé.

Concernant les chances de réussite de l’enseignement de l’anglais dans le primaire en Algérie, le président du Cnapeste pose la problématique d’un angle plus global. C’est tout le dispositif d’enseignement des langues qui est à revoir au niveau de l’école algérienne, selon lui.

« Quand on voit qu’après dix ans, nos élèves ne maîtrisent ni le français ni l’anglais, il y a de quoi se poser des questions sur la méthode utilisée. Les contenus sont à revoir puisqu’ils ont montré leurs limites. Il faut une réforme de la façon d’enseigner les langues dans nos écoles », a-t-il recommandé.

Boualem Amoura regrette, pour sa part, l’absence d’une étude avant le lancement de ce chantier tout en pointant quelques réserves sur les méthodes d’apprentissage de la langue anglaiss dans le cycle primaire.

« En Algérie, on a cette habitude à se lancer dans des chantiers d’envergure d’une manière spontanée sans passer par des études sur l’efficacité d’une réforme. On décide et on applique directement souvent dans la précipitation », a-t-il indiqué.

Boualem Amoura critique l’adoption de la méthode globale au détriment de la méthode syllabique. Dans la méthode utilisée, les élèves apprennent directement le mot sans passer par l’apprentissage de l’alphabet puis la composition des syllabes.

« Le recours à la méthode globale fait que les élèves sont orientés vers l’apprentissage par cœur sans comprendre la formation des mots qu’ils apprennent. Vous prenez les livres d’anglais ou même de langue arabe, l’alphabet passe après. C’est pour cela que les élèves qu’on voit dans la vidéo de l’enseignante de l’anglais qui les somme de dire bonjour ne peuvent pas répondre », explique Boualem Amoura.

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