Des millions de Soudanais ont entamé, dimanche 9 juin, une grève générale à travers le pays. Un appel à la « désobéissance civile » lancé par l’Association des professionnels soudanais, un syndicat créé en 2012 et aujourd’hui acteur majeur de la contestation. Objectif : obtenir le départ du Conseil militaire de transition et l’instauration d’un gouvernement civil.
Depuis près de six mois, le Soudan fait face à une crise politique majeure. Comme point de départ, l’annonce l’hiver dernier par le gouvernement, d’une série de mesures d’austérité entraînant, entre autres, une multiplication par trois du prix du pain.
Dès le 19 décembre, les citoyens sortent dans la rue pour protester contre la cherté de la vie. Mais très vite, le mouvement prend des allures de révolte. Les Soudanais exigent le départ d’Omar Al Bashir, le chef de l’État, au pouvoir depuis 1989 suite à un coup d’État. À compter du 6 avril, le peuple se rassemble à plusieurs reprises devant le siège de l’armée pour demander son soutien. Un appel entendu.
Le 11 avril 2019. Omar Al Bashir est destitué par un coup d’État militaire. Depuis, tous les pouvoirs sont concentrés entre les mains du général Abdel Fattah Al Burhan. La junte militaire est soutenue par l’Arabie Saoudite, les Émirats Arabes Unis ou encore l’Égypte du général Al-Sissi.
Mais cette évolution ne satisfait pas les Soudanais qui n’ont de cesse de sortir dans la rue pour réclamer le transfert des pouvoirs aux civils. Le 3 juin, les évènements prennent une tournure dramatique. Les manifestants, en sit-in devant le siège de l’armée à Khartoum, la capitale, sont violemment réprimés par les militaires, la police et les unités de la Force de soutien rapide (RSF). Le bilan s’élève à 118 morts et au moins 500 blessés. Les victimes ont été tuées par balles pour la plupart ou jetées vivantes dans le Nil.
Le lendemain, l’armée annonce annuler ses accords avec l’opposition et appelle à l’organisation d’élections dans un délai de neuf mois. Devant une telle escalade de violence, l’Union africaine décide, le 6 juin, de suspendre le Soudan avec effet immédiat, « jusqu’à l’établissement effectif d’une autorité civile de transition, ceci étant le seul moyen de permettre au Soudan de sortir de la crise actuelle », a précisé dans un tweet le Conseil de paix et de sécurité de l’organisation panafricaine.
Quatre personnes ont perdu la vie lors de la première journée de désobéissance civile d’après le Comité central des médecins : deux à Khartoum et deux à Omdourman. Ce lundi, les lignes de connexion internet terrestre ont été coupées à Khartoum et dans d’autres villes du pays, rapporte l’Agence France Presse.
D’après un rapport élaboré par l’ONG Netblocks, spécialisée dans la cartographie des libertés en ligne, la coupure quasi-totale d’Internet, mobile et fixe, est intervenue à midi, heure locale, rapporte toujours l’AFP. Mais certains opérateurs tentent de surmonter les difficultés techniques pour rétablir le réseau avec parcimonie afin de ne pas isoler les citoyens du reste du monde.