Le gouvernement libyen d’union nationale (GNA) a dénoncé la menace d’intervention militaire formulée par l’Égypte, la qualifiant de « déclaration de guerre », rapporte ce lundi Al Jazzera.
Samedi, le président égyptien Abdel Fattah el-Sissi a menacé d’une intervention militaire « directe » en Libye si le GNA et son principal soutien la Turquie poursuivaient leur avancée vers Syrte. Cette dernière est actuellement et depuis janvier dernier sous le contrôle de l’Armée nationale libyenne (ANL) dirigée par le maréchal Khalifa Haftar et représente une ville stratégique dans le conflit opposant l’ANL au GNA.
Les forces dirigées par le maréchal Haftar avaient lancé en avril 2019 une offensive en vue d’occuper la capitale Tripoli, sous contrôle du GNA, reconnu par la communauté internationale. Alors que l’ANL détenait l’initiative militaire, le soutien militaire apporté par la Turquie aux forces du GNA au début de l’année a permis de renverser la vapeur, d’infliger une série de défaites aux forces du maréchal Haftar et d’offrir la possibilité aux forces du GNA de lancer une contre-offensive en vue de reprendre Syrte.
C’est dans ce contexte que le président égyptien, soutien du maréchal Haftar aux côtés des Emirats arabes unis et de la Russie, a déterminé qu’une offensive contre Syrte constituerait « une ligne rouge » justifiant une éventuelle intervention militaire directe de l’armée égyptienne.
« Toute intervention directe de l’Égypte est devenue légitime au niveau international, que ce soit au regard de la charte de l’ONU sur la légitime défense ou qu’elle se base sur la seule autorité légitime élue par le peuple libyen : le Parlement libyen », a estimé le président Al-Sissi. « Si le peuple libyen nous demande d’intervenir, c’est un signal envoyé au monde que l’Égypte et la Libye partagent des intérêts communs, la sécurité et la stabilité », a-t-il ajouté.
« Il ne peut y avoir de lignes rouges à l’intérieur de nos frontières et sur nos terres », a estimé Mohamad Amari Zayed, membre du Conseil présidentiel du GNA.
Le GNA a qualifié la sortie du président égyptien d’ « acte hostile », d’ « ingérence flagrante dans les affaires internes », une « menace grave pour la sécurité nationale de la Libye » et « l’équivalent d’une déclaration de guerre ».
« L’ingérence dans les affaires internes de l’État libyen et l’atteinte à sa souveraineté, que ce soit par des déclarations comme celles du président égyptien ou par l’appui aux putschistes, aux milices et aux mercenaires, sont inacceptables », a dénoncé le GNA, soulignant que « toute la Libye est une ligne rouge ».
En parallèle, les ministres des Affaires étrangères de la Russie et l’Égypte se sont entretenus au téléphone ce dimanche afin d’évoquer la situation en Libye, rapporte l’agence Sputnik. Ils ont souligné l'”impossibilité de toute solution militaire et l’absence d’alternative à la cessation immédiate et durable des hostilités par les parties en conflit et l’ouverture d’un dialogue avec toutes les parties libyennes pour négocier des accords universellement acceptés sur tous les aspects du règlement dans le cadre des conclusions de la conférence de Berlin”, selon la même source.
Ce lundi, le président français Emmanuel Macron, qui recevait son homologue tunisien Kais Saied, a dénoncé le “jeu dangereux” de la Turquie en Libye.
“Je considère aujourd’hui que la Turquie joue en Libye un jeu dangereux et contrevient à tous ses engagements pris lors de la conférence de Berlin”, a-t-il déclaré à l’issue d’un entretien avec M. Saied. De son côté, la Turquie a souvent accusé la France de soutenir le maréchal Haftar.
« En Libye nous soutenons le gouvernement légitime et le gouvernement français soutient un chef de guerre illégitime et met ainsi en danger la sécurité de l’Otan, la sécurité en Méditerranée, la sécurité en Afrique du nord et la stabilité en Libye », a dénoncé le porte-parole de la présidence turque Ibrahim Kalin.