Le chef de l’État Abdelkader Bensalah a limogé, mercredi 31 juillet, le ministre de la Justice Slimane Brahmi et nommé à sa place Belkacem Zeghmati, jusque-là procureur général près la Cour d’Alger.
Le secrétaire général du ministère a été également remplacé.
La décision a surpris plus d’un puisque, moins d’une semaine plus tôt, Abdelkader Bensalah expliquait que la demande de changement de gouvernement émise par l’opposition et les manifestants risquait de buter sur les dispositions de la Constitution.
En effet, la loi fondamentale ne donne pas au chef de l’État intérimaire la prérogative de changer ou de remanier le gouvernement.
L’article 144 est sans ambiguïté : « Le Gouvernement en fonction au moment de l’empêchement, du décès ou de la démission du Président de la République, ne peut être démis ou remanié jusqu’à l’entrée en fonction du nouveau Président de la République. Dans le cas où le Premier ministre en fonction, est candidat à la Présidence de la République, il démissionne de plein droit. La fonction de Premier ministre est assumée par un autre membre du Gouvernement désigné par le Chef de l’État ».
Le limogeage de Brahmi et la nomination de Zeghmati constituent donc une entorse flagrante à la Constitution. Beaucoup se demandent au lendemain de cette décision surprenante quelle nécessité absolue a bien pu pousser Abdelkader Bensalah à outrepasser ses prérogatives, sans même s’encombrer de l’avis du Conseil constitutionnel qui lui avait permis par une déclaration émise début juin de poursuivre sa mission à la tête de l’État en dépit de l’expiration de son mandat légal.
D’où les questions qui taraudent tous les esprits : Brahmi a-t-il fait de la résistance et refusé de démissionner et, surtout, pourquoi a-t-il été limogé ?
Un enjeu de taille
Il est très peu probable que le garde des Sceaux ait fait les frais, comme le laisse entendre une rumeur insistante, d’un accident de la route qu’il aurait provoqué la veille. Les raisons de sa brusque mise à l’écart sont plus « sérieuses », estime-t-on, d’autant plus que cela intervient dans une conjoncture politique et judiciaire bouillonnante.
Quoi qu’il en soit, l’enjeu doit être de taille pour que la présidence passe outre une disposition claire de la constitution, au moment où le souci de ne pas sortir du « cadre constitutionnel » est mis en avant pour rejeter des propositions pourtant susceptibles d’écourter la crise.