Le gouvernement français présentait ce 1er février le projet de loi “Immigration” lors du Conseil des ministres. Qu’est-ce qui peut changer pour les Algériens ?
La France veut se doter d’une nouvelle loi « immigration ». Le texte a été présenté mercredi 1er février lors du Conseil des ministres. Une sorte de refonte des conditions d’accueil des étrangers qui souhaitent s’installer sur le territoire français.
“Contrôler l’immigration et améliorer l’intégration” est le leitmotiv présenté dans ce projet de loi qui vise à réviser les titres de séjours accordés et les procédures de demande d’asiles pour les rendre plus ciblés. Et de l’autre côté, à durcir la lutte contre l’immigration illégale en accélérant notamment les expulsions de personnes sans papiers.
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Immigration : un texte qui fait le grand écart législatif
Ce texte se fait surtout le signe de l’ambivalence puisque dans son corps on y découvre autant d’assouplissements que de restrictions sur la question de l’immigration. Le projet de loi comporte plusieurs grandes mesures largement relayées dans la presse française.
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On pourra citer la création d’un titre de séjour professionnel pour les métiers en tension, qui concernerait même les personnes sans papiers sur le territoire français pouvant prouver qu’elles ont travaillé (présentation de 8 fiches de paie) et qu’elles disposent d’une promesse d’embauche.
Un titre de séjour pluriannuel qui attirerait aussi les “talents” comme les médecins, les pharmaciens, les sages-femmes ou encore les dentistes est aussi promis. Ces secteurs manquent cruellement de personnel, le projet de loi entend les attirer.
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A l’inverse, le projet de loi immigration propose de faciliter l’expulsion des personnes perçues comme “une menace grave” en France.
En réduisant “le champ des protections contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français (OQTF) lorsque l’étranger a commis des faits constituant une menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l’État”.
Parmi ces protections, celle qui concerne les étrangers arrivés avant leur 13 ans sur le territoire français ou encore celle qui protège les personnes résidant depuis plus de 10 ans en France.
On peut aussi citer l’obtention d’une carte de séjour pluriannuelle seulement si l’on prouve que l’on maîtrise les bases de la langue française. Un moyen de recaler les personnes n’ayant pas le niveau de français requis. Un niveau qui pourra être évalué par les agents chargés de faire passer des tests de langue.
L’immigration algérienne, concernée par le projet de loi ?
L’immigration algérienne qui représente l’un des plus importantes de France sera de facto concernée par ce projet de loi qui balaye largement les conditions d’accueil en France.
Sur les 3,8 millions titulaires de titres de séjours en France, une grande partie d’entre eux viennent d’Algérie qui est dans le trio tête des pays qui envoient le plus de candidats à l’immigration en France, avec la Tunisie et le Maroc.
La question de l’immigration choisie et ciblée, un concept évoqué par le président Emmanuel Macron lors de la visite en Algérie fin août dernier, et mise en avant dans le texte de loi présentée au Conseil des ministres pourrait concerner de nombreux profils algériens.
On pense notamment aux travailleurs du secteur médical, déjà nombreux à postuler en France. En 2022, 1200 médecins algériens ont été autorisés à exercer en France, leur nombre pourrait s’accroître avec cette facilitation.
La carence de personnel médical en France pourrait entraîner une accélération du recrutement de spécialistes de la santé d’origine algérienne. Le titre de séjour proposé dans ce genre de situation pourrait aller jusqu’à une durée maximale de quatre ans.
Le titre de séjour pluriannuel conditionné à la maîtrise du français est en revanche une mesure plus inquiétante. Notamment pour les générations précédentes d’immigrés dont beaucoup n’ont pas eu les moyens d’acquérir les bases de la langue française en raison d’un faible niveau de scolarité et d’un accès restreint à l’éducation en France.
Pour les jeunes algériens candidats à l’émigration, la maîtrise du français est parfois un obstacle notamment pour s’installer au Canada, en raison de la détérioration de l’enseignement des langues étrangères en Algérie.
« Il y a des candidats à l’émigration au Canada qui sont de très bons profils au plan technique, mais ils ont des lacunes importantes dans le domaine de la langue française », explique un spécialiste des questions migratoires. Le problème de la maîtrise du français peut se poser pour les candidats à l’émigration en France si cette dernière décide de durcir ce critère.
Jusqu’à présent, une simple participation à une formation linguistique était demandée mais pas un examen de passage. Comment leur situation évoluera lorsqu’ils devront demander un renouvellement de titre de séjour ?