Cent pour cent de duels remportés et de passes réussies. Tel est le bilan des premières 40 minutes jouées le 1er novembre par le défenseur international algérien Djamel Benlamri avec son nouveau club, l’Olympique Lyonnais, qu’il venait de rejoindre en provenance du club saoudien d’Al-Shabab.
Lors de ce match face à Lille en championnat de Ligue 1 française, Lyon a tenu le nul (1-1) en jouant à dix, pendant 40 minutes. Tous ont reconnu le rôle déterminant dans cette performance de la recrue du club, entrée en cours de jeu.
À commencer par le coach de l’OL, Rudi Garcia: « Pour Benlamri, il n’a pas 90 minutes dans les jambes mais il a été excellent dans sa rentrée contre Lille. C’est le contexte idéal pour lui car il a transpiré la combativité. C’est une satisfaction. »
Ceux qui ont découvert que le joueur est tout de même âgé de 31 ans n’ont pas manqué de se demander : « Mais où était-il pendant toutes ces années ? ». Car hormis l’excellente Coupe d’Afrique des nations qu’il a réalisée avec l’Algérie en 2019, Benlamri a eu très peu d’occasions d’étaler sa classe et sa grinta à la face du monde.
Pour faire plus simple, c’est la première fois qu’il met les pieds dans un championnat européen. Tout au long de sa carrière, entamée en 2009, le joueur a rarement été estimé à sa juste valeur.
Il symbolise toutes les injustices que subissent de nombreux joueurs dans un football algérien où le critère prévalant n’est pas toujours celui de la performance et du talent. En Algérie, ce natif d’El Harrach (Alger) a joué entre 2009 et 2016 au NA Hussein-Dey (où il a été formé), à la JSK et à l’ES Sétif mais sa carrière ne s’est jamais réellement emballée.
En 2016, il signe au Shabab d’Arabie Saoudite et n’attire plus les projecteurs, malgré ses performances et sa régularité. En équipe nationale, il fait ses premiers pas en 2011 chez les Espoirs, prenant part à la campagne des éliminatoires pour les Jeux Olympiques de Londres à l’issue desquels la qualification avait été ratée d’un cheveu.
Il devra patienter jusqu’en 2018 pour connaître sa première sélection en séniors. En sept ans, autant de sélectionneurs se sont succédé à la tête des Verts et aucun ne verra en Benlabri une possible solution aux problèmes de la défense, maillon faible de l’équipe notamment après la Coupe du monde 2014.
Il a donc fallu l’œil avisé de Djamel Belmadi, nommé sélectionneur en août 2018. Parmi les coups de maître du nouveau coach, la convocation-surprise de Benlamri et de Youcef Belaïli, un autre joueur qui revenait de loin après une longue suspension pour dopage.
Djamel Benlamri a enfin sa chance, à presque trente ans, et il ne la laisse pas passer. Ses prestations lors de la CAN 2019 en Égypte lui valent le surnom de « guerrier » et l’image de sa pommette ouverte en finale face au Sénégal est passée à la postérité, symbolisant l’esprit combatif de toute l’équipe pendant le tournoi.
« On a cherché à nous salir et nous priver de l’EN. Un coach et un président sont venus, ils nous ont donné nos chances et finalement, on est là. J’ai été lésé mais je ne vais pas le dire, je me suis sauvé de cette histoire. On m’a touché on a dit que j’étais un voyou. Le plus important, c’est que plus personne ne soit lésé. Il ne me reste plus longtemps mais il faut qu’on préserve les joueurs », déclara-t-il le soir du sacre.
Pendant toute sa carrière, Djamel Benlamri a été victime de cette réputation sortie d’on ne sait où. « Beaucoup de gens ont véhiculé une image de tête brûlée et de joueur manquant de discipline pour Djamel (…). Cela a retardé l’éclosion de Djamel au plus haut niveau », explique son coach de l’EN olympique en 2012, Azeddine Aït Djoudi, cité par le site 20minutes.fr, qui a consacré un portrait au nouveau joueur de Lyon.
Pourtant, le joueur, outre sa grinta, est connu aussi pour sa timidité et sa réserve. « Il ne parle pas beaucoup mais sur le terrain on sait qu’avec lui on peut aller à la guerre », témoigne le gardien de Lyon Anthony Lopez, qui vient de le découvrir. « Je découvre l’homme, il est encore un peu réservé mais il est intelligent et pourra aider les plus jeunes », confirme pour sa part Rudi Garcia.
Lorsque, le 19 juillet 2019, il soulève le trophée de la CAN, beaucoup avaient savouré avec lui cette belle revanche sur le sort, avec le regret qu’elle vienne un peu trop tard, en tout cas assez tard pour lui permettre de réaliser son rêve de jouer en Europe. Un autre pronostic qu’il démentira à l’automne 2020 en rejoignant le demi-finaliste de la dernière édition de la Ligue des champions. Sa combativité et son sens du sacrifice ont fini par payer.