Djamel Ould Abbes a démissionné ce mercredi de ses fonctions de secrétaire général du FLN. Officiellement, son départ est lié à des « soucis de santé qui lui imposent un congé de longue durée ». Officieusement cependant, nos sources affirment que le désormais ex-secrétaire général « a été poussé à la démission ».
Le départ de Djamel Ould Abbes était déjà presque acté depuis plusieurs jours. Il a été précipité par la nouvelle crise au sein du FLN suite à la charge du ministre de la Justice Tayeb Louh à l’encontre de son Premier ministre Ahmed Ouyahia.
Retour sur les événements de cette affaire ayant mené au départ d’Ould Abbes.
Le ministre de la Justice Tayeb Louh anime le 5 novembre dernier un meeting devant les représentants de la société civile à Oran, durant lequel il lance une série d’attaques contre son Premier ministre, Ahmed Ouyahia.
« Dans la dernière loi de finances, des taxes allaient être imposées au simple citoyen sur les documents biométriques, comme la carte d’identité et le passeport. Quand elles sont arrivées au niveau du Conseil des ministres, qui les a annulées ? Le président Bouteflika, bien sûr », affirme Tayeb Louh, sans citer Ahmed Ouyahia.
Les attaques ne concernent pas uniquement l’actualité récente, puisque Tayeb Louh évoque durant le meeting l’incarcération des cadres durant les années 1990, époque où Ahmed Ouyahia était chef du gouvernement. « Il faut rappeler à tous les algériens et algériennes que, suivant les orientations du président de la République et conformément à son programme complémentaire dans tous les secteurs, que les abus dont ont été victimes dans les années 1990 les cadres de l’État, font partie du passé et ne peuvent en aucun cas se reproduire », assène le ministre de la Justice.
L’attaque, implicite mais peu subtile, est frontale et fait immédiatement réagir Ahmed Ouyahia par le biais du parti qu’il dirige, le Rassemblement national démocratique (RND). « Des voix s’en sont prises, encore une fois, au Secrétaire général du Rassemblement National Démocratique, Monsieur Ahmed Ouyahia, en faisant allusion, encore une fois, au dossier (vide) des cadres emprisonnés dans les années 90 », dénonce le RND dans un communiqué publié le 6 novembre, estimant que les « intentions » derrière les déclarations de Tayeb Louh « ne sont pas cachées ».
Excuses démenties
Le dimanche 11 novembre, le quotidien arabophone El Khabar publie un article dans lequel il affirme que le ministre de la Justice a présenté ses excuses à Ahmed Ouyahia. Fait inédit, le ministère de la Justice publie un communiqué dans lequel il dément l’information.
« Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, M. Tayeb Louh, regrette que l’auteur de l’article n’ait pas respecté les règles de déontologie qui veulent que le journaliste doit toujours s’assurer de la véracité de l’information et de la vérifier à la source avant de la publier », écrit le ministre, se demandant en outre « qui se cache derrière ces manœuvres et ces assertions immorales qui constituent une tentative d’induire en erreur l’opinion publique et une atteinte à la crédibilité du journal en question ».
Entrée en scène fatale d’Ould Abbes
Le 13 novembre, Djamel Ould Abbes intervient sur cette affaire en sa qualité de secrétaire général du FLN, Tayeb Louh étant militant au sein de l’ex-parti unique où il est membre du Comité central. De manière inattendue, Ould Abbes prend position contre son camarade et apporte son soutien implicite au secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia.
« Les propos du ministre de la Justice n’engagent en rien le FLN », affirme Ould Abbes dans une déclaration au quotidien francophone Liberté. « Il a agi en tant que ministre et non comme militant du FLN », précise-t-il. « Le FLN n’est pas du tout concerné par cette histoire. Nous sommes concentrés sur les élections sénatoriales à travers la tenue des assemblées dans les wilayas pour désigner nos candidats », soutient Djamel Ould Abbes.
« Ne m’impliquez pas dans l’affaire de Louh, qui est un ami. Louh est un ministre du gouvernement de Bouteflika. Ouyahia est le Premier ministre du gouvernement de Bouteflika. Le seul qui peut trancher, c’est le président de la République. Nous ne nous immiscerons jamais dans cette affaire. On s’en lave les mains », affirme le secrétaire général plus tard dans la même journée devant les journalistes, renvoyant la décision au seul président Bouteflika.
Cette prise de position, ou plutôt son absence, s’avèrera fatale pour Djamel Ould Abbes, qui finira poussé à la porte dès le lendemain.