Politique

Louisa Hanoune évoque un “climat prérévolutionnaire”, demande le report de l’élection

Pour Louisa Hanoune, aller à l’élection présidentielle dans les conditions actuelles ferait courir un danger certain au pays. Invitée ce lundi 25 février de TSA Direct, la secrétaire générale du Parti des travailleurs a proposé un « léger » report du scrutin.

« Je me demande si l’issue ne réside pas dans le report d’un ou deux mois maximum, pas à l’infini, afin de réunir toutes les conditions de démocratie et de transparence », suggère-t-elle.

Les conditions que Mme Hanoune estime indispensables pour un scrutin honnête sont, entre autres, « le remplacement de l’instance de surveillance des élections par une instance indépendante qui organisera le scrutin et l’assainissement du corps électoral ».

« Ceux qui ont présenté Bouteflika savent que le scrutin ne sera pas libre, car dans une élection honnête, il ne passera pas. Depuis l’annonce de sa candidature, les pressions sont devenues insupportables et les dérapages se font au grand jour (…) Même les instructions du ministre de l’Intérieur ne sont pas respectées », dénonce-t-elle.

« Ces élections pourront nous mener vers l’inconnu (…) Si on a fait ce qu’on a fait au Venzuela où le président a pourtant été élu, qu’est-ce qu’on va nous faire à nous si nos dirigeants s’accrochent au pouvoir coûte que coûte », s’interroge Louisa Hanoune pour qui « nous sommes dans une phase prérévolutionnaire ».

« Le vendredi 22 février est un point de basculement, un saut qualitatif. Des centaines de milliers de citoyens sont sortis dans la rue. Il y avait 100.000 manifestants rien qu’à Alger. Il y avait toutes les franges de la société, toutes les générations. Leur refus du cinquième mandat exprime leur rejet du système », dit-elle, expliquant que « ceux qui ont obligé Bouteflika à se représenter, alors qu’il avait refusé de le faire en 2014 déjà, ce n’est parce qu’ils l’aiment, mais pour tirer profit de la situation. Ils souhaitent le statu quo pour continuer à voler et à dominer, sans se soucier du sort du pays ». « Ils soutiennent le président comme on soutient la corde d’un pendu », assène-t-elle.

La SG du PT ne s’attend pas à voir le pouvoir répondre favorablement aux revendications exprimées par les manifestants vendredi. « Malheureusement, il n’y a aucun indice dans ce sens (…) Ils ne sont capables de comprendre ce qui se passe dans la société algérienne. Si c’était le cas, ils ne se seraient pas engagés dans l’aventure du cinquième mandat », juge-t-elle.

Pour elle, ce qu’est en train de faire le pouvoir, qui parle de « continuité », « c’est plus que de la fuite en avant », « c’est une politique de terre brûlée. Ils veulent rester quoi qu’il arrive. Nous savons qu’un système corrompu ne partira facilement ».

Elle considère que les propos tenus par le Premier ministre quand il a fait sa déclaration de politique générale ce lundi, constituent une provocation. « Il a parlé de réalisations mais il a oublié, la cocaïne, les haragas, le pouvoir d’achat… », regrette-t-elle.

Mme Hanoune réaffirme qu’on est dans une phase « prérévolutionnaire » et que ce qui se passe ces jours-ci lui rappelle les débuts de la révolution tunisienne avec l’engagement des intellectuels, des étudiants, des syndicalistes…

Comme les images de « fraternisation » entre les citoyens et la police lui rappellent « la révolution des œillets au Portugal en 1974 ». « On craignait l’entrée en scène de forces centrifuges, mais le peuple a su imposer l’ordre de la majorité, d’une façon civilisée », se félicite-elle, avant de mettre en garde contre les tentatives de récupération partisane du mouvement, annonçant qu’elle participera à la prochaine marche « en tant que citoyenne ».

La participation ou pas de son parti à la présidentielle devrait être tranchée vendredi prochain, révèle-t-elle. « Le vendredi 1er mars pourrait être une journée charnière et notre comité central se réunira justement ce jour-là. On verra ce qui va se passer et quels slogans seront scandés par les manifestants », conclut-elle.

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