Politique

Malaise de Me Sellini à la Cour d’Alger : Issad Mabrouk donne la version des magistrats

Le président du Syndicat national des magistrats (SNM), Issad Mabrouk, a réagi, hier samedi sur l’incident qui s’est produit à la Cour d’Alger, à l’origine de la grève des avocats, et a donné sa version des faits, sur la base des témoignages de deux magistrats : un juge et le procureur général de Cour.

Dans un communiqué, M. Issad tient à préciser en premier lieu qu’il a lui-même tenté d’entrer en contact avec le bâtonnier Me Abdelmadjid Sellini pour avoir sa version des faits, sans succès.

« Son portable étant éteint, je lui ai envoyé un texto lui demandant de me rappeler », précise le président du SNM qui livre la version des deux magistrats.

M. Mabrouk précise d’emblée que l’incident de jeudi a été précédé par un premier qui a eu lieu lors de l’audience du 16 septembre à la Cour d’Alger. C’était à l’occasion du procès en appel de l’homme d’affaires, Mahieddine Tahkout, qui purge une peine de 16 ans de prison à la prison de Babar à Khenchela, pour des faits liés au dossier du montage automobile.

Ayant demandé le transfert de son mandant pour être jugé en sa présence au lieu du procédé de la visioconférence, Me Sellini, s’est vu refuser sa demande par le juge qui a décidé de poursuivre le procès à distance.

« En colère, le bâtonnier d’Alger s’est adressé au magistrat : « Vous avez promulgué une loi spécialement pour juger 40 prévenus, ce n’est pas un État ! » », rapporte Issad Mabrouk.

Et de poursuivre : « Suite à quoi, le magistrat a demandé à Me Sellini de quitter la salle et de faire ses commentaires au législateur algérien en dehors de la salle d’audiences ».

Mais la colère de Me Sellini ne s’est pas estompée, poursuit le président du SNM. Suite à quoi, rapporte M. Mabrouk, la salle est entrée en ébullition, ce qui a poussé le magistrat à lever la séance pour remettre de l’ordre.

Le second incident a eu lieu, jeudi dernier, lors du procès en appel de l’autre homme d’affaires, Mourad Oulmi, condamné en première instance le 24 juin dernier à 10 ans de prison par le tribunal de Sidi M’hamed, pour des faits liés au dossier du montage automobile, rappelle le président SNM.

Il relate que la défense du prévenu a demandé au juge d’engager une « procédure en faux en écriture » d’une décision technique sur la base de laquelle le défendant avait été condamné en première instance.

« Le juge a promis d’étudier la légalité du document et les plaidoiries se sont poursuivies avec 40 avocats qui ont plaidé en faveur de leur mandant », rapporte M. Mabrouk.

« Vers 18h, le bâtonnier d’Alger a sollicité le report du procès à samedi (26 septembre, NdlR) en raison de la fatigue et pour garantir un procès équitable. Une demande que le juge a refusé tout en décidant de poursuivre les plaidoiries, mentionne Issad Mabrouk. Ceci a provoqué la colère du bâtonnier d’Alger qui a commencé à crier en quittant la salle avec un groupe d’avocats ».

Dans le hall, Me Sellini se serait accroché avec un agent l’accusant de l’espionner, selon le récit de M. Mabrouk. « A son retour dans la salle, il (Me Sellini) a poussé violemment la porte tout en s’adressant au président de séance : “Vous voulez donc poursuivre l’audience … sur mon corps !” ».

À ce moment-là, le magistrat « lui a rappelé l’obligation en sa qualité d’avocat de respecter le tribunal et de veiller au bon déroulement du procès, autrement il sera dans l’obligation d’appliquer la loi pour imposer l’ordre », détaille le représentant des magistrats.

« Peu après la reprise de l’audience, Me Sellini, assis au second rang, s’est affalé par terre victime d’un malaise. Les premiers soins lui ont été prodigués sur place en présence du Procureur général. Le diagnostic fait état d’un taux de glycémie de 1.25 et une tension artérielle de 16/8. Suite à quoi, le juge a levé la séance et a décidé de reporter le procès au samedi “pour raison humanitaire” », précise encore M. Mabrouk.

« Ce samedi (hier) les plaidoiries se sont poursuivies et l’affaire est mise en délibéré », a précisé Issad Mabrouk qui réitère son souhait d’avoir la version de Me Sellini. « Voici les informations disponibles à mon niveau (…) et que chacun juge qui a tort et qui a raison », ajoute le président du SNM.

Issad Mabrouk a conclu avec le volet de l’indépendance de la justice qui, selon lui, constitue « la bataille de toute la société avec ses divers segments, loin de tout corporatisme, sans surenchère ni populisme ». « Je souhaite qu’on s’éloigne du conflit folklorique entre magistrats et avocats, car leur ennemi commun réside ailleurs », conclut le président du SNM.

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