Société

Manque de pluie en Algérie : « On est en danger »

Depuis les pluies abondantes de l’automne dernier, l’Algérie fait face à un hiver plus indigent en précipitations. Une situation qui inquiète les spécialistes dont l’un vient de tirer la sonnette d’alarme.

« Si cela continue comme ça 15 jours jusqu’à un mois, c’est vraiment le plus grand danger, il faut se préparer à toutes les éventualités, particulièrement pour l’agriculture », a affirmé sur un ton alarmant Brahim Mouhouche, professeur à l’École supérieure d’agronomie (ESA), à Alger.

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Invité ce jeudi de la Radio algérienne, il a lancé presque un cri du cœur : « On est en danger. On est parmi les pays les plus pauvres du point de vue des potentialités hydriques ».

« Pour la région nord du pays, on est pour le moment dans le rouge. Les dernières pluies (notamment en octobre dernier) ont dépassé en précipitations la moyenne. Aujourd’hui, on a dépassé, cette fois dans le sens négatif, ce qu’il nous fallait avoir comme eau pour l’installation des cultures », a mis en garde le spécialiste.

« Les barrages ne seront jamais pleins »

La faible pluviométrie dure depuis quelques années déjà en Algérie. Selon le Pr Mouhouche, cela s’est fait sentir dans la diminution des volumes de remplissage de barrages. Il estime que le taux de remplissage est actuellement de 37%.

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« Les barrages ne seront jamais pleins », et ce quand bien même il y aura des pluies durant le printemps, a averti l’expert. Le Pr Mouhouche précise néanmoins que la moyenne de 37% est nationale, les taux variant entre les différentes régions. Ainsi, si les régions est du pays s’en sortent plutôt bien avec des taux de remplissage entre 65 et 70%, la région ouest du pays est beaucoup moins lotie avec 21% de taux de remplissage, a expliqué l’invité de la radio.

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A entendre le Pr Brahim Mouhouche, les Algériens devraient se faire à l’idée de vivre avec très peu d’eau. « On est un pays pauvre du point du vue de l’eau. Il faudra vivre avec cette réalité et ratisser large en utilisant toutes les ressources hydriques existantes en Algérie », a-t-il recommandé.

Tout en faisant remarquer qu’il y a nombre de ressources qui ne sont pas utilisées, l’expert pointe le problème du gaspillage d’eau. « Les gens ne maîtrisent pas ce qu’ils doivent consommer en eau, ni en cuisine, ni dans l’industrie ou dans l’agriculture », a-t-il asséné.

Pour illustrer cette déficience chronique en eau, Brahim Mouhouche explique que l’Algérien ne reçoit, in fine, que 300 m3 alors que la moyenne mondiale est de 6 000 m3  par habitant.

L’expert agronome relève que les régions sud du pays regorgent d’eau qu’il va falloir, selon lui, utiliser et mettre en valeur, notamment par des transferts du sud vers les Hauts-Plateaux.

L’autre option à laquelle l’Algérie doit désormais se résoudre inévitablement consiste en l’accélération du processus de dessalement de l’eau de mer. « C’est indiscutable », estime Brahim Mouhouche citant le cas de l’Arabie saoudite qui pratique ce processus depuis quatre décennies.

« Avec 1 200 km de côtes et 14 wilayas côtières, l’Algérie doit mettre en valeur ce potentiel, qui est notre dernier salut en attendant qu’il y ait d’autres technologies », lance-t-il.

Le spécialiste signale toutefois que le processus de désalinisation exige de grands moyens tant financiers que matériels.

Le Pr Mouhouche met en avant les répercussions de la faible pluviométrie sur le rendement agricole. Ainsi, d’après lui, le programme de récoltes en cours « est déjà compromis », mais « pas à 100% », a-t-il nuancé. « L’installation de nos cultures s’est faite dans des conditions difficiles », a expliqué l’expert qui souhaite que les pluies « ne vont pas tarder ».

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