Politique

Marche contre le 5e mandat à Alger : « Il y avait surtout beaucoup de jeunes révoltés »

Abdelwahab Fersaoui est président de l’association Rassemblement action jeunesse (RAJ). Il a participé à la principale manifestation qui s’est déroulée ce vendredi à Alger. Entretien.

Quel est votre sentiment après avoir marché à Alger ?

Alger est interdite aux manifestants depuis 2012. À RAJ, nous organisons un petit rassemblement de 20 à 30 minutes chaque 5 octobre pour  commémorer les événements. Mais aujourd’hui c’est autre chose. Les Algériens ont marché à Alger. C’est extraordinaire. J’ai personnellement marché jusqu’à l’entrée d’El Mouradia. Nous avons été repoussés par la police qui nous a empêchés d’atteindre la présidence. Je suis très content et très fier de ne pas avoir raté ce moment historique.

Aujourd’hui, les Algériens ont donné une véritable leçon de civisme. Ils ont prouvé qu’ils étaient capables de marcher pour faire entendre leur voix, sans violence. Les rares tentatives de la part de casseurs ont été empêchées par les manifestants eux-mêmes. Durant tout le parcours de la marche, la police a multiplié les provocations en tirant des gaz lacrymogène. Mais les manifestants sont restés pacifiques. Ils n’ont pas répondu par la violence. C’est une grande victoire pour les Algériens qui désirent un vrai changement dans le pays.

Qui était dans la rue aujourd’hui ?

L’appel à marcher a été lancé de manière anonyme. Mais toutes les tranches de la société étaient présentes aujourd’hui dans la rue. Il y avait des femmes mais surtout beaucoup de jeunes, ceux qui ont entre 18 et 35 ans.

Ces jeunes sont révoltés. Ils sont sortis pour exprimer, pacifiquement, leur refus du mépris de ceux qui veulent leur imposer un candidat absent. Ils sont conscients de la situation et des enjeux. Les slogans étaient purement politiques et dirigés contre le pouvoir.

Qu’attendez-vous du pouvoir après cette démonstration de force ?

Ces manifestations sont un message très fort adressé au pouvoir. Il doit arrêter de mépriser le peuple. Les Algériens veulent un véritable changement. Ils sont contre le cinquième mandat. Le pouvoir doit prendre en compte ce désire de changement et annoncer des choses concrètes rapidement. Je parle bien entendu d’un processus de changement démocratique.

Ce soir, des chaînes de télévision privées ont commencé à dire que les manifestants sont sortis dans la rue pour réclamer des « réformes ».
C’est faux. Les Algériens revendiquent un vrai changement, pas des réformes proposées pour les responsables de cette situation. Ils veulent le départ du système.

C’est aussi un message à l’opposition. Elle doit se ressaisir et donner une suite, un prolongement, à ce mouvement. C’est aussi un message aux autres candidats à la présidentielle. D’ailleurs, je commence à douter que l’élection présidentielle va servir à quelque chose. Les Algériens vont rejeter cette élection qui ne va rien apporter de nouveau au pays.

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