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Maroc : Aziz Akhannouch, l’ami du roi, est-il politiquement fini ?

Maroc : Aziz Akhannouch, l’ami du roi, est-il politiquement fini ?

Principalement visé par une campagne inédite de boycott populaire contre ses affaires, le joker du pouvoir face aux islamistes est devenu l’ennemi public n°1. Impopulaire comme jamais, le ministre-milliardaire est-il encore capable de représenter une alternative future à un PJD ratiboisé ? Ses chances en politique paraissent déjà anéanties, auprès du peuple, mais aussi au sein des élites qui ne parient plus sur lui.

La comète Akhannouch est-elle en train de quitter son orbite ? Même au sein des premiers cercles du pouvoir, les pronostics sur sa trajectoire sont désormais tous orientés à la baisse, tout comme l’action d’Afriquia Gaz, la filiale d’Akwa Holding, dont l’affaissement soudain à la Bourse de Casablanca est compris comme un signe de reniement, non seulement pour l’entreprise vorace, pilonnée par la campagne de boycott populaire démarrée sur les réseaux sociaux et qui s’ancre assurément dans la réalité, mais aussi et surtout pour son richissime dirigeant, entré en politique par effraction.

Jamais un personnage adoubé de la sorte par le pouvoir n’a été si fortement désavoué alors qu’il se croyait déjà au firmament de sa réussite. Et le boycott dont il fait essentiellement l’objet n’est que l’écume du ras-le-bol d’un système qui a imposé de force au gouvernement son champion de l’heure sans aucune assise populaire.

Victoire imposée sur un PJD écartelé et marges indécentes dans un business qui touche directement les citoyens au portefeuille, ont fait d’Akhannouch l’ennemi du peuple n°1, cristallisant sur sa personne toutes les expressions du rejet de la politique du préfabriqué, de l’opportunisme en affaires et de l’arrogance d’une technocratie hors sol qui ose même vanter ses échecs les plus patents maquillés en réussites, à l’image de ce Plan Vert dont il est pourtant démontré qu’il n’est que vacuité après dix ans de contre-vérités.

C’est aussi le RNI, dont Akhannouch s’est saisi des manettes après que le PAM d’Ilyas El Omari ait mordu la poussière, qui est indirectement pointé du doigt par le peuple au moment où se prépare un autre hold-up, cette fois-ci à la tête de la CGEM, par l’ancien chef timoré du parti de la colombe au grand dam d’une frange du patronat qui voit ainsi ses efforts de neutralité en politique anéantis par un coup de Jarnac.

Akhannouch et l’autre porteur de maroquin du RNI aux Finances qu’est Mohamed Boussaïd, ministre tout aussi impopulaire qui a qualifié les Marocains qui soutiennent ce nouveau « Hirak d’internet » d’écervelés, ont définitivement enterré les chances de leur parti de notables de se hisser en véritable force politique alternative. Le rouleau compresseur du RNI a pourtant tout essayé ces derniers mois pour se refaire une virginité, de caravanes en meetings, de promesses surfaites en slogans creux, comme celui du « sérieux en politique », alors qu’à chaque montée de fièvre populaire, c’est par l’insulte qu’il répond, détruisant par une petite phrase tout l’effort de ralliement consenti à prix d’or.

Le mouvement social, jugé circonscrit à Facebook prend d’ailleurs racine. Les données documentés dévoilées par Akhbar Al Yaoum sur la baisse notoire du chiffre d’affaires du réseau des stations-services Afriquia (-31 %) sont là pour le prouver et apporter un démenti cinglant à Akhannouch qui le minimisait en le qualifiant de « boycott virtuel ».

Peu importe de savoir au fond s’il s’agit avant tout d’une bronca populaire contre la cherté de la vie que l’approche du Ramadan et sa valse des étiquettes ont alimenté la forme inédite de désobéissance civile, d’un complot ourdi par les affidés d’un Abdelilah Benkirane revanchard, connus pour être légions sur Internet et qui ont manifestement surfé sur la contestation, voire même pour certains d’un crash-test de l’Etat profond : le boycott et ses conséquences immédiates démontrent la grande fragilité d’Akhannouch, qui pour se sortir de l’ornière achète le silence de la presse à coups de campagnes publicitaires de circonstance, comme cette grosse ficelle sous forme de tombola pour convaincre les automobilistes à faire leur plein d’essence chez Afriquia…

Déjà en embuscade, Nizar Baraka soigne son image au sein de l’Istiqlal, qui après la parenthèse Chabat, a fait basculer le parti historique dans une opposition jusqu’ici monopolisée par un PAM en perte totale de repères et qui se cherche un nouveau chef improbable après avoir tant perdu sous la commanderie d’El Omari. « Le boycott reflète la souffrance des citoyens face à la cherté de la vie », a-t-il déclaré, apportant de l’eau au moulin de la contestation. Nabil Benabdallah, secrétaire général du PPS a lui aussi joué la carte de la compréhension. « Ces phénomènes d’expression spontanée que l’on retrouve aujourd’hui sur les réseaux sociaux doivent retenir notre attention », a-t-il indiqué, ajoutant qu’ « il y a des problématiques inquiétantes, relatives à la justice sociale »…  

Coopté, adoubé, gonflé à bloc pour imposer, au sein d’un gouvernement dirigé par un homme faible et sans envergure, une vision apolitique de la conduite du pays et ayant comme seul référentiel le vocabulaire de la soumission et de l’exclusion, le « système Akhannouch » procède de la notion de la verticalité du pouvoir. Celle qui échappe à la reddition des comptes, qui en affaires se nourrit de la rente tant la concurrence déloyale est devenue une norme, et en politique de la proximité ostensible avec le Palais.

En s’attaquant au nerf de la guerre de ce système, utilisant les seules voies d’expression qui échappent encore à la censure, à la sommation et à l’achat des âmes, les Marocains rappellent ainsi, comme d’autres l’ont fait sous d’autres cieux, que le parachutage des gouvernants, de surcroît affairistes, est un non sens à l’heure des technologies de l’information et de la puissance d’Internet. Si la rue subit la répression, le peuple a choisit de prendre le maquis sur la Toile…

A ce stade, personne ne peut parier sur la longévité du mouvement anti-Akhannouch, mais une chose est sure, endommagé comme il est, c’est tout son avenir politique qui est aujourd’hui mis en doute. Le Palais le sait et il ne prendra pas le risque inconsidéré de se voir assimilé à un homme carbonisé par tout un peuple.

 

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