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Maroc : le Sahara occidental passe avant la Palestine

Maroc : le Sahara occidental passe avant la Palestine

Le contraste est frappant au Maroc entre le silence du Palais royal devant ce qui se passe à Gaza et les actions très audibles de la société civile en soutien à la cause palestinienne.

Des marches en soutien aux Palestiniens organisées à Rabat et à Casablanca, pour ne citer que les plus imposantes, ont rassemblé des dizaines de milliers de manifestants.

Le peuple marocain, dans son écrasante majorité, affiche ouvertement sa solidarité avec la Palestine, contrairement aux officiels, englués depuis trois ans dans le piège de la normalisation.

Le roi Mohammed VI n’a jamais moins bien porté son titre de « président du comité Al Qods » que pendant ces tristes jours de bombardements intensifs et ininterrompus de l’armée israélienne sur la population civile de Gaza.

En décembre 2020, le royaume a signé un accord de normalisation avec Israël, sans contrepartie pour la cause palestinienne. C’était le quatrième pays arabe à le faire pendant la même année, après les Émirats arabes unis, Bahreïn et le Soudan.

Les accords dits « d’Abraham » ont été négociés sous l’égide de l’administration américaine de Donald Trump en fonction des intérêts économiques et géopolitique de chaque État. Le Maroc avait obtenu la reconnaissance de sa « souveraineté » sur le Sahara occidental par les États-Unis.

Le royaume occupe illégalement cette ancienne colonie espagnole située à ses frontières sud depuis 1975, contre l’avis de la communauté internationale et les pays voisins. Tous les efforts de l’ONU pour parvenir à l’organisation d’un référendum d’autodétermination ont buté sur l’intransigeance de Rabat.

Plus que le territoire lui-même et ses richesses, le Palais royal a d’autres raisons de politique interne de faire de la question du Sahara occidental une « cause nationale ».

C’est par ce conflit qu’il a lui-même provoqué que le roi Hassan II a pu refroidir les ardeurs de ses militaires qui voulaient la tête de la royauté et qui ont mené deux tentatives de coup d’État au début des années 1970.

En organisant la « Marche verte » vers le Sahara occidental, il a entretenu l’illusion d’un soutien populaire autour de sa personne et de la monarchie. Hassan II, puis son successeur Mohamed VI, ont pu convaincre même certaines grandes puissances occidentales que la question du Sahara est vitale pour la pérennité de la monarchie.

Maroc – Palestine : le Sahara occidental d’abord

Et ce n’est pas la lointaine Palestine qui peut passer devant le Sahara occidental dans l’échelle des priorités du palais royal et de Mohamed VI qui garde étrangement le silence sur ce qui se passe en Palestine. Pratiquement, tous les dirigeants de la planète se sont exprimés sur ce conflit, sauf lui.

« Pour lui, tout ce qui est marocain, c’est la priorité. Et la cause palestinienne, ce n’est pas notre priorité. Pour nous, la priorité, c’est le Maroc intérieur, le Sahara », avoue sans ambiguïté le sociologue marocain Rachid Touhtou, cité par Radio Canada.

Lors de l’annonce de la conclusion de l’accord de normalisation, le Palais avait expliqué qu’il s’agissait d’une décision qui prenne en compte d’abord les intérêts du Maroc, indiquant que c’est là, la nouvelle stratégie du pays.

« La normalisation des relations entre le Maroc et Israël ne peut être comprise sans prendre en compte la question sahraouie », avait indiqué à l’époque l’historien français Pierre Vermeren.

Maroc – Israël : deux pays colonisateurs

Entre la Palestine et le Sahara occidental, le roi du Maroc a vite choisi. L’autre raison (inavouable) qui l’avait amené à franchir le pas de la normalisation, c’est son obsession de se renforcer face à l’Algérie, premier soutien du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui.

Ce n’est pas un hasard si, de tous les aspects de la coopération, c’est sur le partenariat militaire que le Maroc et Israël ont axé depuis la formalisation de leurs relations. En novembre 2021, la visite dans le royaume du ministre israélien de la Défense de l’époque, Benny Gantz, était ponctuée par la signature d’un protocole de coopération militaire et sécuritaire qualifié de sans précédent, étant le premier que l’État hébreu signe avec un pays arabe.

L’obsession du Sahara a fait que le roi du Maroc s’engage dans une voie très incertaine, le plaçant en porte-à-faux avec son opinion publique et mettant en péril les relations du royaume avec une partie du monde arabe.

La barbarie des bombardements israéliens sur la bande de Gaza a fait réagir fermement y compris dans le camp de la normalisation, avec le rappel par Bahreïn et la Jordanie de leurs ambassadeurs respectifs à Tel-Aviv.

Au Maroc, c’est Israël qui a évacué les membres de sa représentation à Rabat par peur pour leur sécurité après avoir constaté l’ampleur de la mobilisation populaire en faveur de la Palestine. L’opération lancée par le Hamas le 7 octobre a rappelé brusquement à Israël et ses nouveaux alliés arabes que la normalisation ne se décrète pas.

Enfin, le Maroc est un pays colonisateur est mal placé pour donner des leçons à un autre colonisateur qui est Israël. Le premier occupe illégalement le Sahara occidental et le second colonise la Palestine et tue massivement ses habitants.

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