Au Maroc, la région du Rif est toujours en ébullition. Malgré le rétropédalage du nouveau gouvernement, qui désormais ne jure que par l’accélération de la réalisation des projets de développement non concrétisés, la population entend maintenir la pression.
Depuis la mort d’un poissonnier broyé par une benne à ordure en octobre 2016, cette région berbérophone du nord du royaume vit au rythme de la contestation. La dernière en date : un géant rassemblement organisé le 18 mai à la ville Al Hoceima, la capitale de cette région, pour dénoncer l’attitude officielle mais aussi les accusations de séparatisme proférées par les autorités marocaines contre les leaders de ce mouvement.
Et les manifestations sont devenues monnaie courante. Comme l’a expliqué un activiste du mouvement de protestation rifain à Telquel, il ne se passe pas un jour sans qu’il n’y ait une manifestation improvisée dans une localité de la région.
Hier mercredi, les forces de l’ordre marocaines ont dû se résoudre à empêcher les habitants de la commune rurale d’Issaken de marcher vers Al Hoceima, selon Yabiladi. Mardi 23 mai, c’était l’hélicoptère de la gendarmerie royale, qui transportait le ministre marocain de l’Intérieur pour une visite dans la région, que les manifestants ont encerclé dans la même localité. « Un fait inédit », affirme le Desk.
Lors de sa visite à Al Hoceima, le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, qui a conduit une importante délégation comptant pas moins de sept ministres, a plaidé pour l’ouverture d’un dialogue au siège du Cercle d’Issaken.
Pour sa part, le puissant ministre de l’Agriculture et ami du roi, Aziz Akhannouch, a appelé les habitants à soulever leurs revendications d’une « manière claire ». « Il y a des solutions pour tous les problèmes. Il faut juste les soulever de manière claire », a commenté Akhannouch lors d’une visite au port d’Al Hoceima, selon Jeune Afrique.
Mais ces appels au calme n’ont pas été accueillis favorablement. D’après Yabiladi, les habitants ont décliné la proposition d’Abdelouafi Laftit, exigeant de parler avec lui sur le terrain et non dans des bureaux.
Dans sa volonté d’éteindre, coûte que coûte, le feu de la grogne rifaine, le Makhzen a sorti son chéquier et a promis une relance imminente de tous les projets. Au total, ce sont dix milliards de dirhams (environ un milliard de dollars) que l’État marocain compte investir dans la région, selon le site marocain Aujourd’hui.ma.
D’après le même média, ce budget colossal sera investi dans un programme de développement spécial baptisé « Al-Hoceima, Manarat Al Moutawassit ». Le programme en question touche plus de 500 projets dans divers secteurs économiques.
Mais les largesses du Makhzen n’enchantent pas pour autant les protestataires rifains. Déterminés, ces derniers veulent à présent donner une aura internationale à leur mouvement, notamment dans les pays où une forte communauté rifaine est établie.
Après des sit-in organisés dans des villes européennes le 21 mai, le « Mouvement amazigh aux État-Unis » envisage d’organiser, vendredi 26 mai, un rassemblement devant le siège de l’ONU à New York en signe de solidarité avec cette région berbère.