Vingt-cinq ans sont passés depuis la mort de Matoub Lounès, assassiné le 25 juin 1998 près de chez lui à Béni Douala dans la wilaya de Tizi-Ouzou.
Un quart de siècle et le souvenir de Matoub est toujours intact. Le poète, chanteur et militant est toujours adulé, y compris par la nouvelle génération qui ne l’a pas connu. C’est le propre des légendes.
Sa maison, dans le village de Taourirt Moussa, à Béni Douala, est devenue un lieu de pèlerinage. Depuis 25 ans, on y vient de partout, tous les jours de l’année, se recueillir devant sa tombe et rendre hommage à son parcours de rebelle. « Quatre-vingt personnes par jour en moyenne », a témoigné récemment sa sœur Malika.
Outre la tombe de Lounès, dans le jardin familial, on vient voir aussi, rangée pour l’éternité dans le garage de la petite maison blanche, sa Mercedes 310 noire, criblée de balles. Soixante-dix-huit impacts précisément. C’est au volant de cette berline que Matoub est mort les armes à la main, par une chaude journée de l’été 1998. Il avait 42 ans.
Lounès rentrait de Tizi-Ouzou lorsqu’il est pris dans une embuscade au lieu-dit Thala Bounane, un hameau sur la route qui monte vers Béni Douala et qui surplombe la nouvelle ville de Tizi-Ouzou. Cachés dans les buissons des deux côtés de la route, des hommes armés attendaient l’arrivée de Matoub, qui était accompagné de sa femme Nadia, qu’il venait juste d’épouser, et ses deux belles-sœurs.
Les trois femmes s’en sortiront, mais pas Lounès, touché de sept balles, dont deux mortelles. Il a tenté de riposter avec la Kalachnikov qu’il avait sur lui, mais le combat était inégal. Les assaillants étaient plus nombreux, bien embusqués et ont agi par surprise. Autant dire lâchement.
Même sans les réseaux sociaux d’aujourd’hui, la nouvelle a immédiatement fait le tour de la Kabylie et toute la région connaîtra plusieurs jours d’émeutes.
Matoub Lounès, une vie de combats
Les balles, ce n’était pas la première fois que le chanteur en recevait à bout portant. Dix ans plus tôt, durant les émeutes d’octobre 1988, il avait été gravement blessé par des gendarmes sur la route de Ain El Hammam alors qu’il distribuait des tracts appelant au calme et à la solidarité.
Quatre ans avant sa mort, en septembre 1994, il a été enlevé par un groupe terroriste non loin de son domicile. C’est à sa libération après un mois de captivité qu’il a écrit « Le Rebelle », une autobiographie-testament dans laquelle il est revenu sur son enlèvement et réaffirmé ses engagements politiques, pour l’identité amazighe et la démocratie en Algérie, contre le pouvoir en place et l’intégrisme islamiste.
Les circonstances de sa mort ont fait de Matoub un symbole et un repère pour la jeunesse, mais l’homme a connu la gloire de son vivant. Dans les années 1980, il était déjà immensément populaire. Le succès musical, il l’a connu dès son entrée dans le monde artistique, à la fin des années 1970.
Toute la vie de Matoub Lounès fut un combat, par ses chansons engagées ou ses prises de position publiques. Sa thématique en fait un chantre de l’humanisme avant tout, le défenseur des faibles et des opprimés. Il a chanté l’amour, la patrie, l’identité, la misère, l’oppression.
Sa mère, de laquelle il est toujours demeuré très proche, était aussi présente dans sa thématique. Na Aldjia a rejoint son fils il y a trois ans.
De la famille, il ne reste que l’épouse Nadia et la sœur Malika qui mènent un ultime combat, celui de la vérité sur la mort de Matoub.
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