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Métro d’Alger : « La sécurité est déjà forte à la base »

ENTRETIEN. Didier Lescloupe est le directeur général de RATP El Djazair, filiale de la régie autonome des transports parisiens qui exploite le métro d’Alger. Dans cet entretien, il revient sur le renforcement de la sécurité dans le métro, l’évolution du taux de fréquentation, l’extension de la ligne existante, la mise en service du ticket unique et les perspectives du groupe français en Algérie.

Un attentat à la bombe a eu lieu lundi 3 avril dans le Saint-Pétersbourg en Russie. Avez-vous renforcé la sécurité dans le métro d’Alger ?

La sécurité des voyageurs dans le métro est très bien assurée. Bien entendu, la surveillance est accrue. Cela se fait grâce à la présence policière dans le métro. Il y a également notre personnel qui est réparti dans le métro et qui est très vigilent. En outre, il y a d’autres moyens supplémentaires qu’on ne peut pas dévoiler. J’ajoute qu’il y a des caméras dont le nombre varie selon la taille des stations avec des gens qui surveillent en permanence ce qui se passe dans les stations.

Donc, des mesures supplémentaires ont été prises dans ce sens ?

Oui, il y a des choses en plus, mais dont on ne peut pas parler. Il y a des moyens supplémentaires dont on ne pas parler également. La sécurité est déjà forte à la base. On voit aujourd’hui que n’importe quelle ville au monde peut être touchée.

Le métro d’Alger a transporté 100 millions de voyageurs depuis sa mise en service en 2011. Est-ce c’est beaucoup ?

Ce n’est pas un chiffre énorme. Mais ce qu’il faut retenir, c’est que durant les premières années de l’exploitation du métro d’Alger, la ligne était petite et ne comptait que dix stations. Aujourd’hui, on a 14 stations. Certes, cela ne correspond pas aux grandes lignes des métros des grandes villes. Mais, le métro ne se fait pas en un jour. À Paris, le métro a commencé en 1900 pour arriver à ce qu’il en est aujourd’hui. Toutefois, les 100 millions c’est quand même important pour marquer l’évolution. On a passé un cap. La ligne compte 14 stations et fait plus de cent mille voyageurs par jour. J’ajoute que d’ici la fin de l’année, on aura 5 stations de plus et il y a d’autres projets pour l’extension de la ligne. Maintenant, le métro d’Alger commence à ressembler à un vrai métro.

Quelles sont justement vos objectifs avec l’ouverture de ces nouvelles stations ?

On veut doubler la fréquentation du métro avec les nouvelles stations pour atteindre les deux-cent mille voyageurs par jour. Pour les prochains 100 millions de voyageurs, on ne mettra pas cinq ans pour les atteindre, mais deux à trois ans seulement.

Vous dites que le métro d’Alger commence à ressembler à un vrai métro, est-ce qu’il ne l’était pas avant ?

Avant, c’était une petite ligne qui restait sur Alger. Mais maintenant,  elle va à El Harrach. À la fin de l’année, elle ira sur Ain Naadja. Par la suite, ça sera Baraki, l’aéroport et le centre d’Alger (Place des Martyrs).

Donc, depuis l’ouverture des quatre stations de Bachdjarah et El Harrach, le taux de fréquentation a fortement augmenté ?

Il a beaucoup augmenté. En 2016, le taux de fréquentation est passé à 28 millions, soit une augmentation de plus de 30% par rapport à 2015. Et ce taux continue d’augmenter. Si l’on prend à titre d’exemple le mois de mars 2017 par rapport au mois de mars 2016, on a fait 8% de voyageurs de plus. L’engouement continue pour le métro d’Alger.

Quel est le coût de l’exploitation de cette ligne ?

Le coût est levé bien entendu. Il faut payer les salaires, l’électricité, maintenir (la ligne) et acheter des pièces détachées. Aujourd’hui, ce coût n’est pas entièrement couvert par les recettes des voyages. C’est pour cela qu’on se diversifie en exploitant d’autres créneaux comme la publicité. Il y a également les trois opérateurs de téléphonie mobile qui fonctionnent dans le métro. D’ici la fin de l’année, des commerces qui vont ouvrir dans le métro. Il y a donc un tas de diversifications qui sont faites pour augmenter les recettes. De plus, il y a d’autres actions qui sont faites pour attirer plus de voyageurs. Par exemple, il y a un parking à Hai El Badr et à la nouvelle station d’Ain Naadja, il y aura un autre.

Est-ce que le métro algérien sera rentable un jour ?

Il ne sera pas moins rentable ou plus rentable que les autres métros des grandes métropoles. Il y a toujours un besoin de l’argent public. Le but étant de décongestionner la ville. C’est sûr qu’il est normal que la collectivité participe.

Est-ce que vous allez lancer de nouvelles formules d’abonnements ?

En termes d’abonnements, on couvre actuellement ce qu’il faut couvrir. Par contre, l’Entreprise du métro d’Alger (EMA) est en train de signer des conventions avec des entreprises qui sont sur la ligne ou avec des ministères. On a déjà une convention avec le ministère de l’Intérieur de façon à ce que leur  personnel s’abonne au métro. Cela nous permet d’avoir plus de gens dans le métro. Plus le métro va vers des usines ou des lieux de travail, plus on aura la possibilité pour faire des conventions avec les entreprises.

Depuis le lancement du métro, le prix du ticket n’a pas bougé, va-t-il connaître une baisse ou éventuellement une augmentation ?

En théorie, il a diminué. Car le billet est à 50 dinars pour prendre le métro, mais de nombreux abonnements ont été créés depuis, notamment pour les scolaires et les étudiants. Et c’est un élément qui, également, a fait que la fréquentation a augmenté. Par exemple à midi, il y a de plus en plus de jeunes étudiants qui prennent le métro. Le ticket lui-même reste à 50 dinars, mais avec toutes les différentes formules d’abonnements, son prix a baissé. Quant à une éventuelle augmentation du prix, il n’est pas question de les augmenter aujourd’hui. C’est aux autorités de décider, il est possible qu’un jour le prix du ticket augmente. Toutefois, il faut considérer qu’avec ces abonnements, beaucoup de gens voyagent pour moins de 50 dinars.

Sur quelle base a été calculé le prix du ticket du métro ?

Ce sont les autorités qui ont calculé son prix. Mais, je pense que 50 dinars est une bonne moyenne entre le prix qui est nécessaire pour assurer la rentabilité du métro et le garder attractif. Peut-être qu’à 100 DA, on ne serait pas aujourd’hui à 100 millions de voyageurs. À titre d’exemple, un voyageur qui prend le métro d’El Harrach à Tafourah pour 50 dinars ne paiera pas le même prix s’il prenait le taxi.

Le voyageur qui va d’El Harrach vers Tafourah paie 50 dinars, mais celui qui va par exemple de Ruisseau pour la même destination paie le même prix. Est-ce normal ?

Pour le moment, il n’y pas de zonage. Mais, il n’est pas exclu que lorsque la ligne fera peut-être 30 kilomètres et qu’elle ira à l’aéroport, il y aura peut-être des tarifications spéciales comme cela est fait sur d’autres réseaux. Il y a plusieurs pistes et c’est à l’Autorité organisatrice des transports urbains d’Alger de voir ce qu’on peut faire. Tout de même, on peut imaginer que le jour où tous les moyens de transport auront le même système billetique, il y aura un système de zone.

Où en est le projet du ticket unique ?

Entre le métro et le tramway, les billets sont déjà interopérables. Avec le même ticket, les voyageurs peuvent prendre le métro et le tramway depuis le mois d’octobre 2016. A partir du mois de mai, c’est la carte magnétique qui sera fonctionnelle sur les deux systèmes.  Dans le même temps, l’Autorité organisatrice des transports urbains d’Alger est en train de plancher pour étendre cette interopérabilité pour les autres transports. Le prochain moyen de transport sur la liste sera le téléférique. Pour l’Etusa et la SNTF, ça viendra un peu plus tard. Il faut que l’Etusa adapte son système de billettique pour qu’il soit interopérable avec le nôtre. Toutefois, en attendant que ces systèmes soient mis à niveau, il existe un abonnement unique qui permet de prendre le métro, le bus, le téléférique et le tramway.

Avec ce taux de fréquentation qui ne cesse d’augmenter, est-ce que le taux de resquillage n’a pas augmenté ?

On est toujours au-dessous du 1%. On a du personnel de contrôle et de sécurisation qui est dans le métro. Les gens qui n’ont pas de ticket, on leur fait payer le double du ticket. C’est vrai que l’avantage qu’on a (par rapport au tramway), c’est qu’on a un système fermé. Si les gens veulent frauder, ça se verra. Et je pense qu’il y a un respect vis-à-vis du métro de la part des Algérois. C’est quand même un projet qui coûte très cher.

À Alger, les fraudeurs paient juste un bulletin de régularisation, alors qu’ailleurs dans le monde, notamment en France, ils paient carrément une amende. Pourquoi vous ne passez pas à un système identique ?

Il faut que la loi évolue pour cela, d’une part. D’autre part, il faut que notre personnel soit assermenté pour dresser des procès-verbaux ou des contraventions. C’est pour cela qu’on fait payer aux fraudeurs une indemnité de régularisation du voyage.

Quelles sont vos perspectives en Algérie ?

Ce qu’il faut savoir, c’est qu’il y a deux filiales de la RATP en Algérie. Il y a RATP El Djazair qui exploite le métro et il y a la Setram qui exploite les tramways d’Alger, de Constantine et d’Oran. Cette filiale va également ouvrir cette année le tramway de Sidi Bel Abbes dont l’ouverture est prévue pour le 4 ou le 5 juillet. Nous (RATP El Djazair), ce qui nous intéresse, c’est de pouvoir accompagner les prolongements de la ligne, notamment vers l’aéroport. Il y a encore du travail pour les cinq années à venir.

Aujourd’hui, il est important que la capitale se dote de cette infrastructure pour régler les problèmes de la circulation. On est là pour aider et assister les autorités algériennes. On n’est pas juste venus ici faire un petit business et repartir. On investit dans les personnes. Il y a des personnes qui travaillent avec nous depuis 8 ans. Elles sont fières d’appartenir à cette entreprise.

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