Économie

Métro d’Alger : près de 16 mois de fermeture et des interrogations

Fermé en mars 2020 dans le cadre des mesures de prévention et de lutte contre le coronavirus, le métro d’Alger demeure toujours fermé près de 16 mois après, ce qui suscite des interrogations.

Beaucoup ne comprennent pas pourquoi une telle infrastructure névralgique pour une partie des habitants de la capitale est maintenue hors service alors que tous les autres moyens de transport, suspendus au début de la pandémie, ont été autorisés à reprendre du service, y compris le transport aérien.

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Même les liaisons avec l’étranger, pourtant facteur potentiel d’importation de cas des nouveaux variants du virus, ont repris partiellement. Sur le site de l’Entreprise du métro d’Alger (EMA), on continue pourtant à expliquer la fermeture par la crise sanitaire.

Pourtant en juin 2020, le directeur d’exploitation de l’EMA, Ali Leulmi, indiquait à l’agence officielle que des préparatifs étaient en cours pour la reprise de l’activité, après plusieurs mois de suspension à cause de la pandémie de coronavirus.

« Des mesures de sécurité ont été prises par l’EMA en direction des usagers et des employés afin d’éviter la propagation de la pandémie et ce au niveau des différentes stations ou à l’intérieur même des moyens de transport », a-t-il dit. Mais le métro n’a pas été rouvert et l’EMA n’a fourni aucune explication.

L’Algérie connaît certes un regain de la pandémie avec une nouvelle hausse des nouveaux cas quotidiens, mais il faut souligner que même lors des nombreuses décrues enregistrées et les allégements apportés au dispositif de prévention, le métro ainsi que le réseau de transport par câbles (téléphérique) ont fait l’exception.

Certains avaient avancé l’explication de la persistance des marches du Hirak au centre d’Alger, mais elle n’a jamais tenu la route du fait que les marches se tenaient uniquement les vendredis et mardis.

En outre, les manifestations se sont arrêtées depuis fin mai. Ce n’était donc pas là la raison du maintien de la fermeture du métro qui, depuis son ouverture en novembre 2011, a réglé les problèmes de transport des habitants de nombreux quartiers d’Alger.

Lancé dans un premier temps avec 10 stations entre la Grande poste et Haï El Badr (Kouba), des extensions ont été réalisées de part et d’autre jusqu’à la place des Martyrs à l’ouest et El Harrach et Aïn Naâdja à l’Est, en 2015 et 2018.

Le métro compte aujourd’hui 19 stations en attendant l’achèvement des nouvelles extensions, dont celle de l’aéroport d’Alger. Avant sa fermeture, il transportait une moyenne de 136.000 voyageurs quotidiennement (chiffres de février 2020). C’est donc un nombre non négligeable d’usagers qui est pénalisé.

Nos tentatives d’obtenir des explications de l’EMA sur le maintien de cette fermeture sont restées vaines. Néanmoins, des sources avancent que la non-réouverture du métro est due au départ de la société française qui avait la charge de sa gestion. Le métro d’Alger a été confié dès son ouverture en 2011 à RATP El Djazaïr, filiale du Français RATP DEV.

La relève n’aurait pas été encore mise en place

En octobre dernier, les autorités algériennes ont annoncé que le contrat de gestion ne sera pas renouvelé à partir du 1er novembre. L’annonce avait été faite par Lazhar Hani, ministre des Transports, qui a assuré qu’une société « 100 % algérienne » va prendre la relève des Français.

« Au départ de l’exploitation de ce projet, on avait fait appel à une société étrangère dans le cadre de l’assistance technique, et à partir du 1er novembre, c’est une société 100 % algérienne qui va prendre la suite, avec des cadres algériens qui ont des compétences et qui ont appris durant ce partenariat avec les étrangers. Aujourd’hui, on peut être fier de cette évolution », avait assuré le ministre.

Mais il semble que les choses ne se seraient pas passées comme prévu. Nos sources indiquent que la partie algérienne, l’EMA en l’occurrence, n’a pas encore mis en place les équipes qui devraient prendre la relève et assurer la gestion du métro.

Pour quelle raison ? Mystère. Le ministère des Travaux publics et des Transports et l’EMA sont injoignables alors que le silence des autorités alimente les rumeurs sur les raisons de cette fermeture prolongée.

L’explication relative au retard dans la mise en place de la nouvelle société de gestion du métro d’Alger semble plausible au vu de la complexité de la gestion d’une infrastructure de l’importance du métro, tant il s’agit de la première expérience de l’Algérie dans le domaine.

Reste à savoir si les Français ont, pendant la dizaine d’années de gestion, formé des techniciens algériens capables de prendre la relève et de gérer le métro d’Alger. Des sources algériennes reprochent au groupe français d’avoir failli à ses engagements. Nous avons contacté le groupe RATP qui n’a pas répondu à nos questions.

Ce genre de partenariat était destiné non seulement à assurer la gestion, mais aussi à permettre le transfert du savoir-faire. Il en est de même pour les contrats de gestion de l’eau et de l’assainissement dans les grandes villes conclus avec des sociétés étrangères.

En janvier dernier, les autorités ont annoncé que le contrat avec le Français Suez Environnement pour la gestion de l’eau à Alger et Tipaza à travers la société Seaal, « pourrait ne pas être reconduit » à son expiration en août prochain.

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