Angela Merkel s’est vu signifier lundi par ses alliés de droite, épaulés par Donald Trump, un ultimatum de deux semaines pour trouver une solution européenne au défi migratoire, au risque sinon d’une crise politique majeure.
Le ministre allemand de l’Intérieur, le très conservateur Horst Seehofer, a prévenu qu’il sera prêt “en juillet” à “refouler immédiatement” les migrants arrivant aux frontières allemandes en provenance d’un autre pays européen si la chancelière ne parvient pas à une autre solution à l’occasion d’un sommet de l’UE des 28-29 juin.
Angela Merkel a de son côté promis de tout faire pour trouver d’ici-là des accords bilatéraux et européens sur la question, mais elle a rejeté l’ultimatum de son ministre, assurant qu’il n’y aura aucune fermeture “automatique” aux demandeurs d’asile en cas d’échec de ses efforts. “Nous ne voulons pas agir de manière unilatérale, non-concertée et dommageable pour des tiers”, a-t-elle dit.
Après une semaine de polémiques sur le sujet entre Mme Merkel et son ministre, le risque d’implosion de la fragile coalition au pouvoir depuis trois mois n’est pas écarté donc, tant il est difficile de satisfaire la droite dure bavaroise (CSU), que préside le ministre de l’Intérieur, le centre-droit (CDU) et les sociaux-démocrates (SPD).
Trump souffle sur les braises
Donald Trump a d’ailleurs soufflé sur les braises du conflit gouvernemental de Mme Merkel en estimant dans un tweet que “le peuple allemand est en train de se retourner contre ses dirigeants” sur l’immigration et en affirmant que “la criminalité en Allemagne est très en hausse”. “Nous ne voulons pas que ce qui se passe avec l’immigration en Europe se passe avec nous!”, a écrit le président américain.
En Allemagne, l’onde de choc politique provoquée par l’arrivée de plus d’un million de demandeurs d’asile en 2015 et 2016 ne faiblit pas, même si depuis 2017 le nombre des nouveaux arrivants a considérablement baissé.
Cette crise migratoire a d’abord contribué à l’essor de l’extrême droite un peu partout en Europe. En Italie ou en Autriche, elle est entrée au gouvernement, et en Allemagne, son succès aux législatives a entraîné le conflit actuel au sein du camp conservateur de la chancelière.
Merkel entre deux feux
Les deux semaines qui viennent s’annoncent donc décisives et compliquées pour Mme Merkel, car il semble improbable qu’elle puisse trouver une solution satisfaisante à la fois pour ses alliés bavarois et pour l’Italie, qui réclame elle la répartition des demandeurs d’asile en Europe.
Angela Merkel reçoit justement lundi soir son homologue italien Giuseppe Conte, dont le pays refuse désormais l’accès à ses ports aux navires d’ONG secourant des migrants en Méditerranée. Rome a illustré sa fermeté en barrant la route à l’Aquarius et ses 630 naufragés, provoquant des tensions européennes jusqu’à l’accueil du bateau par l’Espagne.
La chancelière doit aussi s’entretenir mardi le président français Emmanuel Macron et celui de la Commission européenne Jean-Claude Juncker. Une réunion de dirigeants européens avant le sommet de l’UE est aussi évoquée.
Elle doit faire face à un mécontentement croissant de son opinion, exacerbé par des faits divers, en particulier le viol et l’assassinat récents d’une adolescente par un jeune demandeur d’asile irakien débouté arrivé en 2015. Lundi s’est ouvert aussi le procès d’un jeune réfugié afghan accusé d’avoir mortellement poignardé son ancienne petite amie de 15 ans dans un supermarché.