Le tribunal de Sidi M’hamed a convoqué, samedi 20 avril, l’ancien premier ministre Ahmed Ouyahia et l’actuel ministre des finances Mohamed Loukal. Ce dernier occupait le poste de gouverneur de la Banque d’Algérie avant sa nomination au gouvernement. C’est à ce titre qu’il intéresse la justice.
Le parquet n’a pas encore officiellement communiqué sur ce dossier. Mais ce dimanche, l’ENTV a consacré un sujet à l’affaire dans son journal. Selon la télévision publique, voix officielle du régime, ces deux responsables ont été convoqués pour « des affaires de dilapidation des deniers publics et de privilèges indus ».
Des accusations vagues mais dont la gravité est certaine au regard des postes occupés par les deux mis en cause. Ces deux dernières années, Ahmed Ouyahia, à la tête du gouvernement, et Mohamed Loukal, en tant que patron de la Banque centrale, ont géré des dizaines de milliards de dollars. Ils avaient le contrôle des contrats publics, des crédits bancaires, des transferts de devises…
Ce dimanche, Mohamed Loukal a présidé la cérémonie du nouveau directeur général de la Douane, nommé hier par Abdelkader Bensalah. Dimanche soir, l’ENTV a choisi de ne pas montrer les images de cette activité officielle d’un membre du gouvernement.
C’est une chose exceptionnelle, comme l’est d’ailleurs la convocation d’un ministre en exerce par la justice. L’ENTV couvre systématiquement les activités de tous les ministres. Elle a fait d’ailleurs ce dimanche avec tous les autres membres du gouvernement qui étaient sur le terrain, à l’exception de Loukal.
L’affaire Loukal ne peut pas tomber plus mal pour le gouvernement Bedoui, très contesté par la population et qui souffre d’un grave déficit de légitimité. Et quand les soupçons de malversations concernent directement le ministre chargé de veiller sur les finances publiques, la situation est clairement intenable, surtout dans le contexte actuel marqué par des interrogations sur les fuites de capitaux.
En Algérie, nous n’avons pas beaucoup d’expérience avec des cas similaires. Les interférences de la justice dans les affaires du gouvernement étaient jusque-là inexistantes. Mais, dans les pays démocratiques, la règle généralement appliquée est la démission du ministre concerné par l’enquête de la justice. Cela permet d’écarter les soupçons et de permettre à l’intéressé de se défendre sans que sa fonction ne soit un handicap pour lui.
Sauf qu’en Algérie, les ministres ne démissionnent pas. Souvent, ils préfèrent être traînés dans la boue avant de sortir par la petite porte.