Malgré le bouclage des accès à Alger et les arrestations, le hirak est revenu en force. La marche du 31e vendredi a été imposante à Alger. Les manifestants ont dit non aux élections dans les conditions actuelles. Le pouvoir va-t-il les écouter ?
Mokhtar Mediouni, officier supérieur de l’ANP à la retraite.
Moi je dis quelle est l’alternative de ceux qui sont en train de manipuler le Hirak ? Je l’ai dit et je le répète, le Hirak n’est plus celui du 22 février, nous sommes face à un nouveau Hirak plus radical et plus extrémiste. Ce n’est plus un mouvement citoyen, c’est une manipulation de la masse pour essayer de bloquer le processus électoral. Je pense que ces gens-là ont peur des élections. Il va y avoir des élections, nous sommes 40 millions et ce ne sont pas ces 40 millions qui descendent sur Alger malgré les blocages. Il y a une catégorie de citoyens qui savent ce qu’ils sont en train de faire, et une autre qui est en train de suivre ce qu’on lui demande de faire. Et justement tout le danger est là. Je le dis et je le répète, s’il y avait une autre sortie plus sécurisée pour l’Algérie, je vous assure que je serais le premier à la revendiquer. Et à partir du moment où il n’y a qu’une seule solution de sortie de crise, qui est l’élection présidentielle, je crois qu’après 7 mois nous sommes en train de mettre l’existence de l’État algérien en danger.
Sofiane Djilali de Jil Jadid propose carrément l’annulation du scrutin, les conditions ne s’y prêtant pas. Que répondez-vous ?
Ceux-là ce ne sont pas les élections qui les intéressent, ce n’est pas la sortie de la crise. Laissons le peuple qui est souverain décider de lui-même. Aujourd’hui, il y a une grande mobilisation dans les villes de l’intérieur du pays autour de l’opération de révision des listes électorales. Je crois qu’il y a les prémices d’une mobilisation en faveur des élections. Les familles algériennes en ont marre de cette situation de blocage et c’est au suffrage universel de trancher pour ce qui est de l’avenir du pays…
Plusieurs maires ont décidé de boycotter la campagne de révision des listes électorales….
Les maires et l’administration n’ont rien à voir avec les élections, c’est dans les derniers changements qui ont été apportés à la loi électorale et le statut de la commission électorale. Il est révolu le temps où ces maires magouillaient aux élections. Si on ne va pas aux élections d’ici un proche avenir, on ira vers le chaos.
Certaines voix au sein de l’autorité électorale accusent l’administration de tenter d’imposer ses éléments dans les commissions électorales. Ne craignez-vous pas que ce genre de dénonciation entame la crédibilité du processus électoral ?
À titre personnel, je suis pour la transparence. Et si on a dit qu’il devait y avoir une commission indépendante, il faudrait qu’elle le soit véritablement. Elle ne doit par conséquent subir aucune pression d’aucune institution. Si ces voix qui s’élèvent ont des preuves, moi je voudrais qu’elles les dévoilent à la presse pour que les gens sachent. Cette commission électorale, je crois en sa souveraineté, quant à l’administration, elle n’a pas le droit de s’occuper de ce qui ne la regarde pas. Je pense qu’il faut faire confiance aux membres de la commission.
Les médias publics demeurent toujours fermés à la parole multiple tandis que les médias privés sont soumis à des pressions. Comment garantir un accès libre aux différentes voix qui s’expriment et pas seulement celles qui appellent à la tenue des présidentielles ?
Je suis un démocrate convaincu et je suis pour la liberté de la presse. Si je devais fermer, je préfère agir contre les pages sur les réseaux sociaux qui sont en train d’être alimentées par des puissances étrangères pour appeler à la violence en Algérie. Je souhaite que l’État soit plus ferme pour imposer une certaine discipline. Revendiquer oui, mais utiliser la violence pour imposer ses idées, je dis non ! Je souhaite que, d’ici le début de la campagne électorale, la presse soit plus libre dans son travail et essaie d’éclairer de façon objective les citoyens.