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Moroccogate : « Dis-nous combien te donnent les Algériens… »

Dans ses agissements en Europe où il est accusé de corruption de parlementaires, le Maroc n’a jamais perdu de vue l’Algérie.

A mesure que l’enquête avance sur le scandale de corruption de députés européens, le rôle du Qatar est de plus en plus minimisé. En revanche, le Maroc est désigné chaque jour un peu plus comme l’initiateur du réseau d’influence par les pots-de-vin au sein des institutions européennes.

En outre, dans leurs agissements en Europe, les services marocains n’ont jamais perdu de vue l’Algérie.

« Derrière le Qatar, le Maroc ». C’est ainsi qu’est intitulée à juste titre une nouvelle enquête de Radio France Internationale (RFI) et du quotidien belge Le Soir sur le scandale qui ébranle le Parlement européen depuis décembre dernier.

Si le Qatar se souciait uniquement de soigner son image sur l’aspect lié aux conditions de travail des ouvriers étrangers sur les chantiers de la coupe du monde 2022, le Maroc visait bien plus, notamment l’influence de la politique européenne sur le dossier du Sahara occidental et les accords commerciaux, faire taire l’Europe sur le scandale Pegasus, passer sous silence les atteintes aux droits de l’homme dans le royaume…

Au moins sur ce dernier point, on comprend mieux pourquoi le Maroc a perdu son statut d’ « enfant gâté » de l’Europe jusqu’à faire l’objet de deux résolutions défavorables du Parlement européen en quelques semaines, ce qui n’est jamais arrivé auparavant.

En janvier et février derniers, le Maroc a été condamné pour ses atteintes à la liberté de la presse et son implication dans le scandale de corruption.

Ceux qui défendaient la cause du pays maghrébin dans les travées de l’institution de Strasbourg sont soit arrêtés soit sous enquête et les autres doivent maintenant réfléchir à deux fois avant de prononcer un mot en faveur du Maroc.

RFI et Le Soir répètent dans leur longue enquête ce que l’on savait déjà sur le scandale, les principaux protagonistes et le rôle de premier ordre des services marocains. Avec cependant quelques éléments nouveaux.

Selon les deux médias, ce sont cinq services de renseignement européens qui ont alerté en 2021 les services de sécurité belges.

Corruption au Parlement européen : les procédés du Maroc révélés

L’enquête déclenchée fait ressortir trois personnages principaux, les eurodéputés italiens Andrea Cozzolino, Antonio Panzeri et l’assistant parlementaire Francesco Giorgi, qui « prennent souvent leurs ordres » de l’ambassadeur du Maroc en Pologne, Abderrahim Atmoun.

Plusieurs millions d’euros ont été versés par le Qatar, et surtout le Maroc. Dans le seul appartement de Panzeri, 600 000 euros en liquide ont été récupérés.

Des écoutes sur sa femme et sa fille ainsi que les aveux de Francesco Giorgi ont formellement établi la provenance de l’argent : le Maroc, via son ambassadeur Atmoun.

Parfois, les trois personnages entrent en contact avec le directeur général du renseignement extérieur marocain (DGED). Un officier de ce corps, Mohamed Belahrech, est un des instigateurs principaux du réseau.

Dans une précédente affaire en France, il avait soudoyé un agent de la PAF (police des frontières) afin d’obtenir les listes des personnes fichées S mais aussi, révèle le journaliste de Libération qui a fait éclater le scandale en 2017, Pierre Alonso, des renseignements sur les déplacements de ministres algériens en France. Ce qui fait dire au journaliste qu’on est plus proche de l’espionnage que de la lutte contre le terrorisme.

En juillet 2021, le Maroc a été éclaboussé par le scandale Pegasus, du nom du logiciel espion israélien utilisé par le Maroc pour espionner des milliers de téléphones dans le monde, dont celui du président français Emmanuel Macron. Là encore, on comprend comment il s’en est sorti à bon compte.

En janvier 2022, Andréa Cozzolino a été nommé à la commission d’enquête du Parlement européen sur le scandale. Une nomination qui semble suspecte aux policiers belges, étant donné que le député italien était soupçonné d’être à la solde du Maroc.

Bien entendu, le souci principal des Marocains, c’est le Sahara occidental. Leur objectif est qu’on n’en parle pas. Pierre Galand, ex-sénateur belge et ancien responsable de l’ONG Oxfam-Belgique, raconte comment un « journaliste » marocain a tenté de le soudoyer : « Dis-nous combien te donnent les Algériens et nous te payons le double. » « Je lui ai répondu de foutre immédiatement le camp », témoigne l’ancien parlementaire.

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