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Mort de Nahel en France : ce que révèle l’identité des émeutiers

Les émeutes qui ont ébranlé les grandes villes françaises pendant une semaine ont laissé place aux bilans, analyses et tentatives de comprendre ce qui a fait que, dans un État démocratique, une étincelle puisse provoquer un immense brasier.

L’étincelle, c’est la mort du jeune Nahel, 17 ans. L’adolescent d’origine algérienne a été tué d’une balle dans la tête tirée par un policier au cours d’un contrôle routier de routine à Nanterre, dans la banlieue de Paris, mardi 27 juin.

Une marche blanche en hommage à la victime, organisée le lendemain, a vite dégénéré pour donner lieu à un affrontement avec la police. La même nuit, les émeutes ont atteint les banlieues de plusieurs grandes villes de France.

L’émeute était prévisible, car c’est l’un des modes de réaction des jeunes des banlieues à ce genre de bavure de la police.

En 2005, les principales villes de France étaient embrasées pendant trois semaines suite à la mort de deux adolescents d’origine immigrée alors qu’ils fuyaient la police.

Près de deux décennies après, le scénario se répète presque à l’identique avec la mort du jeune Nahel. Les affrontements ont, cette fois-ci, moins duré dans le temps, mais ils ont été plus violents et ont occasionné des dégâts plus importants.

Les analyses pour comprendre la mécanique de ces soulèvements sociaux ne sont pas, dans la plupart des cas, allées plus loin que les schémas habituels, selon que l’on soit positionné à gauche ou à droite de l’échiquier politique.

La première lecture présente des populations défavorisées qui saisissent l’occasion d’une bavure policière pour exprimer leur frustration et leur colère contre un État jugé coupable de les avoir délaissées.

La seconde, partagée par tous les courants anti-immigration, de la droite traditionnelle à l’extrême-droite identitaire, accable les immigrés, réfractaires à l’intégration et ingrats envers un État plus que généreux.

France : les émeutes dépassent la question de l’immigration ?

Pour ne prendre que les voix les plus audibles de la classe politique, de Jean-Luc Mélenchon à Éric Zemmour, en passant par Éric Ciotti, on a entendu, pendant les émeutes de cet été 2023, deux principales explications à ce qu’il s’est passé et, naturellement, deux coupables, les immigrés eux-mêmes ou l’État, à travers ses démembrements et ses services de sécurité.

Les solutions proposées sont tout aussi opposées et inconciliables : donner plus d’argent aux banlieues et plus de chances à leurs habitants ou, au contraire, leur faire payer les dégâts occasionnés par les émeutes et mettre fin à l’immigration, légale ou pas.

L’inexactitude des diagnostics fait prendre à leurs auteurs le risque d’opter pour de fausses solutions.

Et dans ce cas de figure, tout le monde semble avoir visé à côté en se focalisant sur les populations des quartiers défavorisés des banlieues, coupables de violence, d’ingratitude et de refus de s’intégrer, ou victimes d’abandon, de racisme et de discrimination.

Car parmi les révoltés se trouvent, dans une moindre proportion certes, des enfants issus de ce que les médias en France appellent les « beaux quartiers ».

On savait déjà qu’il y avait des jeunes « favorisés » qui ont pris part à la marche blanche en hommage au jeune Nahel.

Le plus surprenant, c’est leur participation à la révolte des jeunes que l’on croyait exclusivement menée par les jeunes des banlieues pour des raisons expliquées et ressassées.

La France, toute la France, n’en revient pas, à commencer par les courants anti-immigration de droite et d’extrême-droite qui tenaient à travers la violence des émeutes une opportunité pour réclamer moins d’aides aux banlieues et moins, voire pas du tout d’immigration.

Pour le reste de la classe politique aussi, de tels faits sont déroutants et inquiétants, étant le symptôme d’un malaise plus profond, plus étendu et surtout pas suffisamment identifié.

Qu’est-ce qui a fait que des jeunes, qui à priori ne manquent de rien, aient pu prendre part à une révolte de « laissés pour compte » ?

En attendant de répondre à l’interrogation et d’identifier le malaise, ceux qui ont réduit à l’immigration les maux et les problèmes d’un grand pays comme la France, ont peut-être déjà commencé à comprendre leur lourde méprise.

D’autant que selon le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, la majorité des personnes arrêtées au cours de ces émeutes sont françaises.

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