Le mouvement populaire contre le pouvoir qui dure depuis plus de trois mois, sans s’essouffler ni déraper ou dévier de ses objectifs est parti du web, des réseaux sociaux algériens sur lesquels ont été lancés les premiers appels anonymes à marcher le vendredi 22 février contre le cinquième mandat de Bouteflika.
Depuis, ces réseaux, surtout Facebook, plateforme préférée des Algériens, continuent à jouer un rôle de premier ordre dans le maintien de la mobilisation, la sensibilisation des manifestants sur les risques qui pèsent sur le mouvement et dans l’information objective concernant celui-ci.
La démission d’une partie des médias, la censure et l’alignement de nombreux autres sur la position du pouvoir (du temps de Bouteflika ou après son départ), ont fait du web le dernier recours des militants engagés dans la révolte.
Des pages Facebook qui existent depuis des années ou qui ont été créées peu avant ou pendant la révolte sont devenues, grâce à leur objectivité ou leur engagement en faveur du hirak, des références pour les Algériens.
« Non au cinquième mandat l’Algérie en danger » 131 681 abonnés
Cette page créée en octobre 2018 pour s’opposer contre le cinquième mandat de Bouteflika bien avant le début de la protesta compte déjà plus de 330 000 abonnés. Après la réalisation de l’objectif initial pour lequel elle a été créée (départ de Bouteflika), la page a continué à accompagner le mouvement de protestation en couvrant les manifestations dans toutes les wilayas du pays.
Elle aborde également les scandales de corruption, les problèmes sociaux et les poursuites judiciaires contre les hommes d’affaires et politiciens.
Une page fiable qui reflète la réalité du mouvement populaire contre le pouvoir, ce qui a sans doute fait son succès. Elle fait également participer ses abonnés, en lançant des sondages sur des questions d’actualité. Ses publications accumulent chacune plusieurs centaines, parfois des milliers, de réactions.
« Lutte contre les mouches électroniques : non à la fitna »
Au bout de quelques semaines de protesta, des pages et profils Facebook ont été créés en grand nombre pour diffuser des discours haineux, de fausses informations, des publications dont l’intention est de terroriser les citoyens engagés dans le mouvement. Les Algériens ont vite fait d’appeler ces comptes fictifs les « mouches électroniques » et beaucoup d’activistes se sont mis à les combattre. La page Facebook « Lutte contre les mouches électroniques : non à la fitna » a été créée dans ce but en le 19 mars 2019, en plein hirak et elle compte aujourdh’ui plus de 25 000 abonnés.
Pour lutter contre la « fitna », mot arabe qui signifie discorde ou conflit, la page s’attaque à tous ceux qui exploitent des composants de l’identité algérienne pour diviser, semer la haine, comme on peut le lire sur la photo de couverture de la page. Ses créateurs y annoncent la couleur : « Nous allons nous opposer à tout raciste qui essaie de porter atteinte aux éléments de l’identité nationale : Islam, emblème national, amazighité, arabité et symboles de la révolution ».
Fake News DZ
Dans le même esprit, une page « Fake News DZ » a été créée le 6 avril 2019, au moment où les tentatives de division, de détournement et de diversion contre le mouvement populaire étaient à leur comble.
Avec ses 10 000 abonnés, la page décortique, démonte et prouve le caractère frauduleux et malintentionné des fake news, rumeurs et autres attaques systématiques contre des personnalités nationales qui jouissent d’une grande popularité parmi les Algériens engagés contre le pouvoir.
« Le but de cette page et de dénoncer les fake news et les tentatives de manipulation », annoncent ses créateurs sur leur page d’accueil. Un objectif rempli au vu des nombreuses intox démenties, preuves à l’appui, par les administrateurs de la page.
Les pages locales
Les réseaux sociaux algériens sont riches de pages et groupes Facebook locaux, spécialisés dans l’actualité, la culture, la nature de wilayas, régions ou petites villes et villages. Nombre de ces pages Facebook locales se sont engagées pleinement dans la protesta. « Mostaganem aujourd’hui » est une de ces pages. Créée en septembre 2010, la page compte plus de 97 000 abonnés. Elle fait office de média généraliste qui traite de l’actualité de la wilaya et des wilayas voisines. Elle relaie des informations fiables et vérifiées concernant le mouvement populaire auquel ses administrateurs prennent part en étant présents aux marches.
« Naciria Laεzib infos » est une page du même type qui se focalsie sur l’actualité de Nacéria, localité située à l’est de la wilaya de Boumerdes. Créée en septembre 2016, la page compte plus de 22 000 abonnés et est une source fiable d’information sur le hirak dans la wilaya de Boumerdes et ailleurs dans le pays.
« Nass Jijel« , créée en janvier 2012 et comptant plus de 147 000 abonnées est dédiée, quant à elle, à l’actualité de la wilaya de Jijel. Pendant le mouvement contre le pouvoir, la page s’est fortement investie en enregistrant des déclarations de manifestants lors des marches à Jijel, en réalisant des vidéos et photos des moments forts des actions. Sans censure ni tabou, la page relaie de façon fiable mais engagée les informations concernant la protesta dans la ville de Jijel et ailleurs dans le pays.
« Béjaia sois l’observateur » est un des poids lourds du Facebook algérien. Créée en avril 2015, la page compte aujourd’hui plus d’un demi-million d’abonnés. Source fiable d’information et d’images sur la wilaya de Béjaia, la page est très engagée dans le hirak. Depuis le début du mouvement, c’est une des pages les plus présentes sur le terrain et sur le web et offre un aperçu objectif des faits et évolutions de la révolte.