Nadir Boumendjel, fils d’Ali Boumendjel, a réagi ce lundi à la décision de l’État français de reconnaître officiellement avoir enlevé, torturé puis assassiné son père durant la Bataille d’Alger en 1957.
« Ma première réaction a été… incendiaire », indique M. Boumendjel dans un entretien accordé au média suisse Le Temps. « Il était pour moi hors de question que nous demandions quoi que ce soit à la France sur ce sujet. Il fallait que le geste vienne de la République, car sur ce crime, tout est connu : l’assassinat a été avoué, les commanditaires étaient connus », explique-t-il.
« Je redoutais la manœuvre électorale d’Emmanuel Macron et je trouvais cela scandaleux », affirme le fils d’Ali Boumendjel, qui précise cependant que sa position a changé après une discussion familiale, notamment avec la nouvelle génération de la famille.
« Nous en avons parlé au sein de la famille. Nos enfants nous ont reproché, à nous les « anciens », d’être toujours otages du souvenir de la guerre. Ils nous ont dit rechercher, grâce à cette décision, une sérénité indispensable pour leur avenir », relate Nadir Boumendjel, ajoutant avoir ainsi « donc changé d’avis et j’ai tenu à ce que soient eux, cette nouvelle génération, qui se rendent à l’Élysée ».
« Nous ne demandons pas le pardon, mais la vérité, la reconnaissance… »
« Cette reconnaissance, d’abord, n’est pas isolée. Nous avons tenu à y associer la mémoire de trois autres disparus, dont Selhi Mohand, un ami de mon grand-père, et aussi mon oncle, afin qu’ils soient tous concernés par cette réparation symbolique. Nous ne demandons pas le pardon, mais la vérité, la reconnaissance de faits historiques qui font honte à la France », souligne par ailleurs M. Boumendjel, qui avait 8 ans lorsque son père a été torturé et assassiné par l’armée française.
« Il faut se bagarrer maintenant pour que la page des hommes indignes soit définitivement tournée. Cela vaut pour la France comme pour l’Algérie, où la colère du peuple se traduit dans le ‘Hirak’, le mouvement de manifestations de masse qui se poursuit », conclut Nadir Boumendjel.
Le 3 mars, le président français Emmanuel Macron a reconnu « au nom de la France » que l’avocat et dirigeant politique du nationalisme algérien, Ali Boumendjel « a été torturé puis assassiné » par l’armée coloniale le 23 mars 1957 pendant la Bataille d’Alger.
« Aujourd’hui, le président de la République a reçu au palais de l’Élysée quatre des petits-enfants d’Ali Boumendjel pour leur dire, au nom de la France, ce que Malika Boumendjel (veuve) aurait voulu entendre : Ali Boumendjel ne s’est pas suicidé. Il a été torturé puis assassiné », a indiqué la présidence française dans un communiqué.
L’Élysée rappelle d’ailleurs que « Paul Aussaresses avoua lui-même avoir ordonné à l’un de ses subordonnés de le tuer et de maquiller le crime en suicide ».
En réaction, l’Algérie a pris acte avec satisfaction de la décision de la France de reconnaître son rôle dans l’assassinat d’Ali Boumendjel.