Dans cette Coupe du monde 2022 très « politique » qui se déroule au Qatar, le drapeau palestinien est omniprésent. La normalisation par certains pays arabes de leurs relations avec Israël n’a rien changé à la position des peuples de la région vis-à-vis de la cause palestinienne.
L’image la plus frappante est celle des joueurs marocains qui ont fêté leur qualification en quarts de finale du Mondial 2022 en arborant le drapeau de la Palestine.
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Les Lions de l’Atlas étaient les moins attendus pour faire un tel geste, le Maroc étant l’un des Etats arabes à établir des relations diplomatiques avec Israël fin 2020, sous l’égide de l’ancien président américain Donald Trump. Brandir le drapeau palestinien n’a pas d’autre signification que celle d’exprimer le désaccord des joueurs avec la décision des autorités politiques de leur pays.
A l’annonce de l’accord triangulaire conclu à l’automne 2020, le gouvernement marocain avait mis en avant la contrepartie obtenue, soit la reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. Mais il a laissé entendre qu’il n’abandonnera pas son « soutien » au peuple palestinien.
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Le geste de l’équipe marocaine de football peut servir d’argument supplémentaire aux autorités du royaume dans leur entreprise de tenter de convaincre que le Maroc est toujours aux côtés de la Palestine.
L’exercice est en effet très confortable et permet de ménager la chèvre et le choux. Aux yeux des opinions publiques, c’est le Maroc qui exprime son attachement à la cause commune à tous les arabes. Pour le gouvernement israélien et le parrain américain de l’accord, l’initiative des joueurs n’engage en rien l’Etat marocain.
Néanmoins, ce qu’ont fait les coéquipiers d’Achraf Hakimi reste, jusqu’à preuve du contraire, l’expression du rejet par la société marocaine de l’initiative de ses gouvernants. Depuis le début du tournoi, le drapeau et le keffieh palestiniens sont omniprésents dans les tribunes parmi les supporters du Maroc et tous les ressortissants arabes présents.
Normalisation avec Israël : le verdict de la rue arabe
Ce Mondial 2022 était présenté à juste titre comme un sérieux test pour la normalisation avec Israël et le verdict est déjà tombé. Outre les gestes symboliques à l’égard de la Palestine, les supporters et journalistes israéliens qui ont fait le déplacement au Qatar n’ont pas été franchement accueillis avec joie.
Les vidéos de citoyens qataris et étrangers refusant de parler aux journalistes israéliens ont fait le tour de la planète. Le gouvernement israélien aurait protesté officiellement auprès du Qatar.
En dehors du sport et de la coupe du monde, des manifestations de rue ont clairement exprimé ces deux dernières années le rejet de la normalisation et le soutien des peuples de la région à la cause du peuple palestinien.
Les manifestations ont été régulières et importantes au Maroc justement et au Bahreïn qui a lui aussi opté pour la normalisation à la même période au même titre que le Soudan et les Émirats arabes unis.
Au moment où citoyens et athlètes des pays arabes mettaient à profit la coupe du monde pour exprimer leur soutien à la Palestine, les Bahreïnis ont encore manifesté. Vendredi dernier, ils étaient des milliers à descendre dans les rues de la capitale Manama pour dénoncer la visite dans le petit émirat du Golfe du président israélien Isaac Herzog.
« Toute normalisation est un acte de trahison. Ne venez pas », ont écrit les manifestants sur leurs pancartes, ou encore « criminel », « vous n’êtes pas le bienvenu à Bahreïn », « mort à Israël »…
A Rabat ou Casablanca, les slogans n’étaient pas moins virulents lors des manifestations de ces derniers mois, à chaque fois que le Royaume et Israël franchissaient un nouveau pas dans le rapprochement, y compris dans le domaine de la défense.
Deux ans après les accords d’Abraham, la normalisation est tout aussi rejetée qu’au premier jour. La banalisation par le fait accompli n’a pas eu lieu et ne surviendra pas tant que les droits du peuple palestinien continueront à être bafoués au grand jour.