La guerre d’Algérie n’en finit pas d’alimenter les polémiques en France. La mairie de Perpignan (sud) s’apprête à réaliser une esplanade en hommage à Pierre Sergent, fervent défenseur de l’Algérie française et fondateur de la branche de l’OAS (organisation de l’armée secrète) en France métropolitaine.
Un geste dénoncé par plusieurs syndicats et associations de défense des droits de l’homme et de lutte contre le racisme.
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Pierre Sergent était capitaine de l’armée française pendant la guerre d’Algérie. Fervent défenseur de l’Algérie française, il a pris part au putsch avorté des généraux en 1961 puis à la création de l’OAS.
Il a été le chef de cette dernière sur le territoire français, où elle a commis quelque 70 assassinats, dont celui du maire d’Évian, ville près de la frontière suisse où ont été signés les accords éponymes ayant mis fin à la guerre. L’organisation est aussi responsable de la tentative d’assassinat contre le général De Gaulle en 1962.
Après le démantèlement de l’organisation, Pierre Sergent a poursuivi son activisme politique dans la clandestinité. Condamné à mort par contumace, il a été gracié après la promulgation de la loi d’amnistie en 1968. En 1986, il a été député du Front national. Il est mort en 1992, à 66 ans.
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C’est le même parti, devenu le Rassemblement national, qui s’apprête à lui rendre hommage. La mairie de Perpignan est dirigée par un personnage bien connu de cette formation politique, Louis Alliot.
Une initiative dénoncée par une trentaine d’organisations, principalement de gauche, qui ont appelé à manifester ce samedi 29 octobre à Perpignan. « C’est comme si on créait une place Pétain ou Hitler », explique Michel Chabasse, responsable du syndicat CGT.
Louis Alliot a tenté de défendre son initiative en mettant en avant le fait que Pierre Sergent était aussi « un résistant » français pendant la seconde Guerre mondiale. Mais Pierre Sergent reste avant tout un chef de l’OAS et l’hommage qui lui est rendu ne passe pas.
Torpiller la réconciliation franco-algérienne
« Pierre Sergent, c’est ce monsieur qui a créé l’OAS, responsable de 70 assassinats sur le territoire national, dont celui du maire d’Evian », rappelle SOS Racisme, qui juge l’initiative « hallucinante ».
Louis Alliot défend encore sa décision en affirmant qu’elle a été prise « en accord avec toutes les associations de rapatriés » et un « certain nombre d’associations d’anciens combattant ».
Ces initiatives répétées de l’extrême-droite visent à contrebalancer la politique du président Emmanuel Macron qui a entrepris de « réconcilier les mémoires » de la guerre d’Algérie.
Emmanuel Macron a multiplié les gestes, reconnaissant notamment la responsabilité de l’Etat français dans la mort de résistants algériens, comme Maurice Audin et Ali Boumendjel, ou la répression des manifestations du 17 octobre 1961 à Paris, qualifiée de « crime inexcusable »…
Le Rassemblement national, malgré la volonté de « diabolisation » qu’on lui prête, demeure droit dans ses bottes concernant tout ce qui a trait au passé de la France en Algérie. Un de ses élus aux dernières législatives, en juin, a exprimé sa nostalgie de l’Algérie française dans le discours inaugural de la nouvelle législature qu’il a prononcé en sa qualité de doyen de l’assemblée.
C’est l’action de ces lobbies qui est régulièrement dénoncée par le président algérien Abdelmadjid Tebboune comme un frein à la bonne entente entre l’Algérie et la France.