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Omar Rafik dit non aux Verts : pourquoi les Algériens sont choqués

Omar Rafik dit non aux Verts : pourquoi les Algériens sont choqués

Par matimix / Adobe Stock

Ce qui était impensable a fini par arriver. Un joueur né et formé en Algérie a dit non à l’équipe nationale de football, préférant porter les couleurs d’un pays étranger.

Convoqué par Vladimir Petkovic en vue des deux matchs des qualifications pour le prochain mondial face au Botswana et au Mozambique, Omar Rafik, joueur de 21 ans évoluant au club qatari d’Al Shamal, a refusé de répondre à la convocation, préférant opter pour la nationalité sportive qatarie. Le public sportif algérien est sous le choc et ce, pour plusieurs raisons.  

Omar Rafik, premier joueur du cru à tourner le dos aux Verts 

D’abord, c’est la première fois que cela arrive. Les Algériens ont appris à s’indigner lorsqu’un joueur binational traîne les pieds pour rejoindre la sélection mais il était impensable qu’un joueur « du cru » puisse dire non à une convocation de l’équipe nationale première. A une telle situation, il faut dire que personne n’était préparée.  

Porter les couleurs nationales est toujours perçu, à juste titre, comme un honneur dont rêve tout joueur algérien, y compris beaucoup de ceux qui sont nés à l’étranger et qui n’ont jamais mis les pieds en Algérie. 

Il arrive, certes, que des binationaux optent pour les sélections de leur pays de naissance lorsque l’occasion leur est donnée.

Mais le public algérien, très connaisseur de la chose footballistique, a toujours compris qu’il s’agit d’un choix dicté par la marge d’évolution et de visibilité qu’offrent certaines sélections européennes, celle de France notamment. 

Personne n’a jamais douté de l’attachement à l’Algérie de Zinedine Zidane ou de Karim Benzema par exemple. En termes de visibilité et de projet sportif, il est difficile pour Omar Rafik de justifier son choix, l’équipe d’Algérie étant plusieurs crans au-dessus que celle du Qatar. 

Beaucoup diraient que l’Algérie a pu bénéficier de contingents entiers de joueurs formés ailleurs et qu’elle devrait accepter le fait que des joueurs qu’elle a formés puissent faire le choix de jouer pour d’autres sélections suivant ce que dictent leurs intérêts, qu’ils soient sportifs ou financiers. La chose peut paraître évidemment acceptable à première vue.  

La FAF a beaucoup investi dans les académies  

Sauf que Omar Rafik n’a rien à voir avec le Qatar. Il est né en Algérie de parents algériens, et y a vécu jusqu’à ses 19 ans.  

Le joueur et ses camarades transférés également au Qatar peuvent être considérés comme la première fournée des académies de la FAF ouvertes à coup de milliards par l’ancien président Kheiredine Zetchi, aujourd’hui poursuivi pour malversations et écroué dans l’attente de son jugement.  

Zetchi a voulu reproduire le modèle de formation qu’il a réussi avec son club du Paradou (PAC). Un bras de fer public l’a même opposé à son prédécesseur Mohamed Raouraoua quant à l’usage qui doit être fait des centaines de milliards de centimes laissés dans les caisses par le dernier nommé à son départ en 2017.

L’argent était semble-t-il destiné à la construction d’un hôtel de luxe. Zetchi a voulu des centres de formation et a entamé son programme par l’ouverture de deux académies à Sidi Bel-Abbès et Khemis Miliana (Ain-Defla). 

La réalisation et le fonctionnement de ces centres a coûté de l’argent et il est normal que les gens soient choqués que leurs premiers fruits soient cueillis par un pays étranger, qui plus est par des moyens détournés.  

Zetchi est parti en 2021 et ses successeurs n’ont pas montré la même ardeur pour les académies. A la fermeture de celle de Khemis Miliana en 2022, le PAC, qui dispose d’une académie performante et d’un club de l’élite, a récupéré plusieurs joueurs. 

Jusque-là, il n’y a rien de louche dans la démarche. Mais en février 2023, un petit scandale a éclaté lorsque le PAC a transféré trois jeunes joueurs issus de l’académie de Khemis Miliana vers trois clubs qataris différents.   

Il s’agit de Omar Youcef, transféré à Al Shamal, Abdelghani Laalam (Al-Markhiya) et Fouad Hanfoug (Muaither SC). A l’époque déjà, des soupçons avaient entouré ces transferts. Certains avaient avancé que les jeunes joueurs en question ont été pris par les Qataris dans la perspective de renforcer plus tard leur équipe nationale. 

L’affaire avait fait beaucoup de bruit car les trois footballeurs étaient jeunes et n’étaient pas en âge de prendre la lourde décision de changer de nationalité sportive. 

Le refus de Omar Rafik de jouer pour l’Algérie a conforté les doutes.  

Quelle est la responsabilité du PAC ?

Sur les réseaux sociaux et dans certains médias, le PAC est pointé du doigt. Le seul club algérien qui peut se targuer d’avoir investi dans la formation et d’avoir donné plusieurs joueurs clés à l’équipe nationale ces dernières années, se retrouve accablé de graves accusations, comme celle d’avoir été de mèche avec les Qataris dès le début.  

Une vive polémique avait pour rappel opposé le club et le journaliste algérien de BeIn Sport Hafid Derradji après l’annonce du transfert simultané de trois jeunes joueurs vers le Qatar en février 2023. 

Après la polémique qui a suivi l’annonce du refus de Omar Rafik de jouer pour l’Algérie, la direction du PAC est sortie du silence pour réfuter les accusations.  

Le club des frères Zetchi rappelle qu’il n’est pas le seul club algérien à avoir recruté des joueurs issus de l’académie de la FAF de Khemis Miliana après sa fermeture.  

A propos des trois joueurs transférés au Qatar, le PAC assure qu’ « ils  n’ont jamais fait l’objet de procédures visant une quelconque naturalisation ». 

 « Ce sujet n’a jamais été envisagé, et nous refusons catégoriquement toute leçon de nationalisme de quiconque », ajoute le club, précisant qu’il « n’a jamais influencé le choix d’un joueur quant à sa sélection nationale » et que, « bien au contraire, le souhait du Paradou AC est de voir tous les joueurs passés notamment par son Académie porter haut et fort les couleurs nationales ».

Dans sa réaction, la fédération algérienne a dit prendre « acte de cette annonce avec surprise et regrette le choix de Mohamed Omar Rafik ». 

La FAF s’est contentée de rappeler que le joueur a été formé au sein de son académie et a porté les couleurs nationales en catégories jeunes, mais, sans doute en l’absence d’éléments concrets, elle n’a accusé aucune partie. L’affaire ne fait peut-être que commencer. 

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