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Optimiste sur la situation économique, Tebboune prend son temps pour les réformes

Optimiste sur la situation économique, Tebboune prend son temps pour les réformes

Même si les propos tenus par le président Tebboune au cours de sa première rencontre, mercredi, avec des médias nationaux ne tracent pas encore les contours précis d’un programme  économique, ils apportent néanmoins quelques éclairages précieux sur les priorités fixées  par le chef de l’Etat.

Premier enseignement : l’action du gouvernement sera, au moins au cours des prochains mois, consacrée d’abord à traiter les urgences économiques. « Des solutions urgentes s’imposent et nous y travaillons », précise la version officielle des réponses du président de la République aux questions des journalistes.

Officieusement, le président se serait exprimé de façon beaucoup plus directe pour évoquer les priorités immédiates de l’Exécutif. Les dossiers les plus brûlants devraient concerner principalement l’avenir de la filière du montage automobile, celui des entreprises appartenant à des hommes d’affaire emprisonnés ainsi que la situation des entreprises du BTP.

Une Loi de finances complémentaire

Les déclarations du président Tebboune semblent en outre apporter une réponse assez précise à la question de la politique qui sera mise en œuvre par le gouvernement en matière de gestion des finances publiques. Pour l’année en cours, ces dernières sont déjà encadrées par la Loi de finances 2020. Le chef de l’Etat annonce « une loi de finances complémentaire dans cinq à six mois ».

Contrairement aux attentes de beaucoup de spécialistes, elle ne devrait pas marquer un tournant vers plus de rigueur budgétaire. Bien contraire, si on en juge par les propos du président Tebboune, de réaliser ses promesses de campagne en matière principalement de réduction des impôts sur les bas salaires.

« Je me suis engagé, et dès qu’on arrivera à la loi de finances complémentaire (LFC), il y aura exonération de tous les salaires de moins de 30.000 DA dans le but d’augmenter le pouvoir d’achat tout en contrôlant les prix des produits essentiels », a indiqué le chef de l’Etat.

Cette mesure, adoptée « sans aucune démagogie », a déjà fait l’objet d’un chiffrage précis. Elle devrait coûter 90 milliards de dinars au budget de l’Etat, selon M. Tebboune, qui a ajouté que « certaines autres taxes prévues dans la Loi de finances 2020 seront révisées pour une meilleure équité ».

Au total et en l’absence prévisible de recettes supplémentaires pour le budget de l’Etat, les mesures annoncées par le président de la République devraient donc contribuer à alourdir les déficits des comptes publics qui sont déjà estimés par la loi de finances à plus de 1500 milliards de dinars pour le déficit du budget de l’Etat au sens strict et à 2400 milliards de dinars (plus de 11% du PIB) en ce qui concerne le solde négatif du Trésor.

Tebboune très optimiste sur la situation financière et la croissance

Ces mesures sont justifiée, selon le président Tebboune qui a estimé que « la situation financière du pays n’est pas critique ». « Mais je n’irai pas jusqu’à dire qu’elle est normale, comme cela a été le cas ces deux dernières années, il y a une certaine amélioration. Les recettes fiscales augmentent et il y aura d’autres mesures », a-t-il précisé.

Dans la même veine, très optimiste, le chef de l’Etat a affirmé que « le dinar connait à présent un frémissement et nous avons même une légère stabilité des réserves de change. Nous espérons la voir consolider à la fin de ce trimestre ».

Des informations qui semblent malheureusement contredites par le creusement récent du déficit du commerce extérieur et les estimations officielles du ministère des Finances qui tablent sur une réduction très importante des réserves de change à fin 2019.

Le président Tebboune se montre tout aussi optimiste pour la croissance future de l’économie algérienne. Il estime en particulier que «  pour ce qui est de l’Algérie, la Banque mondiale et le FMI prévoient un taux de croissance de 2%. Ce ne sont là que de simples prévisions. L’impact sur le développement est extrêmement rapide dans un Etat comme l’Algérie car nous repartons de zéro. Si nous appliquons nos programmes dans l’immédiat, nous pouvons enregistrer un taux de croissance pouvant atteindre 6% dans certains secteurs. Je pense que la croissance qui sera enregistrée à la fin de l’année contredira les prévisions de ces institutions internationales puisque nous éliminerons le chômage à travers des mécanismes qui contribueront à la création de la croissance et de la richesse ».

Dans le but de réaliser des objectifs aussi ambitieux, le président compte manifestement beaucoup sur le rôle des start-up qui reviennent comme un leitmotiv dans nombre de ses réponses : « Si la démocratisation et la moralisation de la vie politique est une question de quelques mois, la réforme économique est plus ardue, néanmoins je suis optimiste et même très optimiste du fait que les start-up pourront entrer en production dans une période n’excédant pas une année et demi et assureront l’emploi et exporteront leurs produits ».

Le président Tebboune s’accorde 2 ans de réflexion

Une dernière réponse importante semble enfin apportée par le président Tebboune. Elle concerne la question très sensible de la mise en œuvre de réformes économiques préconisées depuis de nombreuses années par la quasi-totalité des experts nationaux.

Même si le chef de l’Etat assure que « les réformes économiques ne sont pas ajournées, nous y travaillons », il ajoute aussitôt que dans ce domaine «  il n’y a pas de marge d’erreur possible. J’ai demandé aux ministres de l’Industrie et du Commerce d’organiser une rencontre nationale sur la nouvelle économie pour un changement de mentalités dans la gestion des banques en vue de parvenir à une économie fondée sur des bases solides ».

A demi-mots, le président Tebboune indique donc clairement que de nouveaux délais sont nécessaires et que rien ne sera décidé vraisemblablement au cours des une ou deux années qui viennent qui seront consacrées à la réflexion et au dialogue, à travers notamment l’organisation de nombreuses « assises nationales ».

Les déclarations du président de la République sur l’épineuse question de la réforme des subventions sont à cet égard tout à fait révélatrices. Pour M. Tebboune « ce débat est prématuré, mais il faut cependant ouvrir le débat et étudier les expériences d’autres pays, à l’instar de la distribution de cartes bancaires pour les personnes à faibles revenus, le rétablissement de la valeur réelle des prix ou la distribution de cartes électroniques pour l’essence ».

Le président ajoute qu’« il faudrait, peut-être dans un premier temps, réduire ce soutien graduellement de 20%, toutefois la question nécessite des études précises. Il faut donc trouver une solution à ce problème. Tous ces mécanismes sont à la portée de nos institutions ».

Conclusion : le gouvernement va donc prendre son temps. Abdelmadjid Tebboune en est persuadé : « Durant les deux prochaines années, il n’y aura pas de problèmes pour ce qui est du financement des transferts sociaux, mais il faut trouver une solution et combattre le gaspillage car je considère qu’accorder une subvention à un milliardaire est injuste et constitue par la même un gaspillage ».

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