Dès 9 heures ce mardi, des centaines de manifestants – des hommes pour la plupart – se rassemblent rue Abane Ramdane, pour tenter d’apercevoir Ahmed Ouyahia.
Convoqué par le procureur de la République du tribunal de Sidi M’hamed, à Alger, l’ancien premier ministre algérien est entendu dans le cadre d’enquêtes sur la dilapidation de deniers publics et octroi d’avantages illégaux, selon l’ENTV.
« On n’a pas le droit de rentrer, on est juste là pour voir comment ça se passe », explique un manifestant. Pour éviter toute tentative d’intrusion, d’importants cordons de police sont déployés devant l’entrée principale mais aussi dans les rues parallèles qui entourent le tribunal comme la rue de la Liberté, la rue Chérif Hamani, la rue de Strasbourg (rue Maître Popie).
On sent une pointe de satisfaction chez les Algériens. Ahmed Ouyahia, qui a entre autres mené une fronde massive à l’encontre des cadres du secteur public au milieu des années 1990 est à son tour convoqué par la justice… Si les conditions de comparution n’ont rien à voir avec celles que pourrait subir un justiciable ordinaire (l’homme est arrivé dans une berline de luxe et a été salué par un policier), symboliquement, la démarche soulage.
Beaucoup espèrent le voir menotté, ou parqué dans un véhicule des forces de l’ordre. « Jibouh jibouh, Ouyahia lel Harrach (Emmenez Ouyahia à la prison d’El Harrach) », est d’ailleurs le slogan le plus scandé tout au long de la journée.
« Il doit se faire emprisonner, il faut fermer les frontières pour éviter que tous ces hommes d’affaires ne prennent la fuite ! », propose Yacine. « Moi j’attends surtout Saïd (Bouteflika). C’est lui, le microbe de l’Algérie », pointe discrètement Nassar, sur place depuis le début de la journée. D’autres préfèrent jouer la carte de l’humour en brandissant des pots et des bouteilles de yaourt, en référence aux propos prononcés par l’ex-premier ministre, il y a quelques années : « Tout le monde n’est pas obligé de manger du yaourt ».
Entre deux chants protestataires, des débats sont lancés par les citoyens sur la situation actuelle, et notamment sur la chasse ouverte par Gaïd Salah contre la corruption. « La justice n’est pas crédible, ils sont censés attendre qu’il y ait une nouvelle constitution. Khaled Nezzar, Saïd Bouteflika, pourquoi ils ne sont pas là dans ce cas ? », explique un homme d’une soixantaine d’années à ses amis.
Ahmed Ouyahia est sorti du tribunal peu avant 15 heures par une porte dérobée, laissant les manifestants assommés par le soleil, « déçus » d’avoir attendu « pour rien ». La foule s’est dispersée dans le calme. Certains auront bien essayé de courser son véhicule sous escorte, en vain.