Après plusieurs jours d’enquête sur le scandale de corruption de députés européens par des Etats étrangers dont le Maroc, un homme apparaît comme la pièce maîtresse du vaste système mis en place par les services marocains pour soudoyer des élus en Europe.
Les mêmes réseaux seront mis à profit par les Qataris qui tenteront eux aussi d’influer sur la politique européenne via des opérations de corruption.
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La « figure de l’ombre » est un espion marocain, rapporte le magazine américain Politico. Jusque-là, il était cité par son prénom et l’initiale de son nom, soit Mohamed B.
Son identité complète est désormais révélée : il s’appelle Mohamed Belahrech et il est officier des services de renseignements extérieurs marocains, la DGED (direction générale des études et de la documentation).
Son nom de code est M118 et il n’est pas un inconnu pour les services de renseignements européens.
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Il est présenté comme « l’homme-clé », en tout cas comme « l’un des principaux acteurs du scandale de corruption » qui ébranle le parlement de Strasbourg.
Les enquêteurs le soupçonnent d’être celui qui donnait des ordres à l’ambassadeur du Maroc en Pologne, Abderrahim Atmoun, chargé de corrompre directement certains députés, dont l’Italien Antonio Panzeri.
Mohamed Belahrech est un homme au long parcours dans les opérations de manipulation et d’influence à l’étranger, particulièrement en Europe, pour le compte des services marocains.
Des antécédents en Europe
Il a été cité en Espagne en 2013 dans une affaire de tentative d’infiltration de mosquées. Alors qu’il dirigeait des agents infiltrés dans des lieux de culte, sa femme effectuait des opérations de blanchiment d’argent via une agence de voyage, toujours en Espagne, selon Politico.
Cette affaire a conduit à l’expulsion de Catalogne d’un Marocain qui dirigeait une organisation islamique en 2013, puis au démantèlement du réseau mis en place par Belahrech en 2015.
En 2017, il est pris la main dans le sac en France dans une affaire de corruption d’un officier de la police des frontières (PAF). Moyennant de l’argent et des cadeaux, notamment des vacances tous frais payés au Maroc, l’espion marocain a soutiré à un capitaine de la PAF des listes comportant jusqu’à 200 noms d’individus fichés pour terrorisme.
Mohamed Belahrech n’a pas fait l’objet de poursuites dans ce scandale révélé à l’époque par Libération. Politico, citant un responsable français, indique que l’officier marocain a été relâché car il coopérait avec les services français sur des questions de lutte contre le terrorisme.
En décembre 2021, il réapparaît, toujours sous le nom de Mohamed B., dans une autre affaire en France liée à l’infiltration des organisations représentatives de la communauté musulmane, dont le Conseil français du culte musulman (CFCM), présidé par son compatriote Mohamed Moussaoui. L’affaire a été révélée par Le Point.