La situation épidémiologique liée au covid-19 en Algérie connaît depuis quelques jours une décrue notable avec moins de 300 cas positifs en 24 h, après avoir atteint près de 2.000 cas fin juillet.
Pour donner un coup d’accélérateur à la vaccination anti-covid, les autorités sanitaires ont lancé samedi 4 septembre une campagne nationale avec l’objectif d’atteindre un taux de couverture vaccinale de 70 % de la population d’ici à la fin de l’année. Au 4 septembre, huit millions d’Algériens étaient vaccinés contre le covid-19, dont trois millions avaient reçu les deux doses, selon les chiffres officiels.
| Lire aussi : Covid-19, durée de vie des anticorps : entretien avec le Pr Melikechi
Encouragés par l’amélioration notable sur le front sanitaire et afin d’inciter les jeunes à se vacciner, les pouvoirs publics ont décidé d’adopter le pass sanitaire pour l’accès aux enceintes sportives.
Les supporters sont autorisés à assister aux matchs du championnat national à condition de présenter un pass sanitaire attestant leur vaccination contre le covid-19. Les supporters doivent néanmoins encore patienter pour assister aux matches de l’équipe nationale et des clubs algériens engagés dans les compétitions régionales. Dès lors se pose la question de la généralisation du pass sanitaire et de la réouverture totale des frontières du pays.
« Le variant Delta est toujours présent parmi nos populations et continue de circuler malgré la baisse des cas », fait observer le Pr Idir Bitam, spécialiste des maladies transmissibles et des pathologies tropicales.
« Les jeunes sont des porteurs et d’excellents vecteurs de ce variant Delta. De ce fait, ils peuvent se contaminer rapidement et facilement par ce variant et contaminer leurs proches et familles », prévient-il, d’où l’importance de vacciner les plus de 18 ans. La vaccination des 12-18 ans n’est pas encore à l’ordre du jour selon les autorités sanitaires par manque de données sur les effets des vaccins sur cette catégorie de la population.
Le Pr Idir Bitam se dit favorable à appliquer le pass sanitaire pour accéder aux salles des fêtes, qui demeurent encore fermées. « Avec la vaccination on pourra vivre dans les meilleures conditions sanitaires, la population sera protégée grâce à la production des anticorps. On pourra vivre comme avant », appuie-t-il.
Le président du Conseil de l’ordre des médecins, le Dr Mohamed Bekkat Berkani est lui d’un autre avis concernant la réouverture des salles des fêtes. Il plaide pour le maintien de la fermeture de ces établissements. « Elles ne sont pas faciles à contrôler. D’ailleurs, ce sont dans les regroupements familiaux que sont nés des clusters », explique-t-il.
« Limiter les voyages ne sert les intérêts de personne »
Les deux spécialistes se prononcent toutefois pour la réouverture totale des frontières avec instauration du pass sanitaire. Quand et comment ? « Peut-être d’ici la fin de l’année, si on atteint les 70 % de l’immunité collective, oui c’est possible », estime le Pr Bitam.
Le 1er juin, l’Algérie a rouvert partiellement ses frontières aériennes, avec un nombre limité de vols internationaux. Fin août, le gouvernement a décidé d’augmenter le nombre de dessertes avec la France notamment où réside une importante communauté algérienne.
Le Dr Bekkat Berkani juge « incompréhensible que l’État algérien n’ait pas ouvert le transport aérien et maritime, tout en sachant que 80 % du trafic s’effectue de et vers la France » où 50 millions de personnes sont vaccinées contre le covid-19.
« Actuellement en Europe, il y a une maîtrise de la situation épidémique », assure le Dr Bekkat Berkani. L’occasion pour lui d’appeler à augmenter le nombre de vols d’Air Algérie pour atteindre les niveaux d’avant la pandémie de covid-19.
« Actuellement, nous sommes dans une diète. Limiter les voyages ne sert les intérêts de personne », lance-t-il. « Une réinfection interne par le variant Delta majoritaire est plus importante qu’une éventuelle réinfection externe », estime le Dr Bekkat Berkani.
Pour lui, l’enjeu est également économique puisque l’adoption du pass sanitaire pour les voyages permettra à la compagnie nationale Air Algérie de « reprendre son souffle après une année et demie de disette ».
Alors que la vaccination des personnels soignants et des travailleurs du secteur de l’éducation traîne encore de l’avis des concernés en l’absence de chiffres officiels consolidés, Idir Bitam n’est pourtant pas favorable à une vaccination obligatoire.
« Par éthique, on ne peut pas forcer les personnes à se vacciner. Par contre, il faudra réaliser des campagnes de sensibilisation pour contrer toutes les fausses informations qui circulent dans les réseaux sociaux », propose le Pr Bitam.