Plusieurs syndicats des personnels de santé montent au créneau depuis quelques jours. Une grève est même annoncée à partir du 7 du mois en cours. Les revendications des médecins, infirmiers et autres corps, mises en veille depuis le début de la crise sanitaire qui frappe l’Algérie et le monde entier, sont brusquement déterrées et le secteur s’apprête à traverser une autre période de turbulences.
Il y a une année, au tout début de la pandémie de Covid-19, les travailleurs de la santé étaient adulés tant par l’opinion publique que par les autorités. Avec peu de moyens, ils ont fait face à une situation pour laquelle ils n’étaient ni préparés ni outillés.
Le 13 avril 2020, le président de la République leur avait consacré l’une de ses rares sorties sur le terrain depuis son élection quatre mois plus tôt. Ce jour-là, Abdelmadjid Tebboune avait fait une tournée dans quelques structures de santé d’Alger pour encourager le corps médical et discuter des moyens de faire face au virus qui se propageait dangereusement.
Le président avait mis à profit ses face-à-face avec les médecins et les infirmiers pour promettre une refonte profonde du système de santé, l’amélioration de leurs conditions de travail et la révision des grilles de salaires.
En attendant, une prime exceptionnelle allant de 10.000 à 40.000 Da était décidée dès le 31 mars au profit des personnels engagés dans la lutte contre la pandémie.
C’était l’union sacrée autour de ce qui était qualifié d’ « armée blanche » et beaucoup avaient cru que les longs débrayages des différentes catégories du secteur appartenaient désormais à une époque révolue.
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Une année après, les travailleurs de la santé peuvent se targuer d’avoir rempli leur mission, ne serait ce que parce que la catastrophe annoncée et le débordement redouté des hôpitaux n’ont pas eu lieu.
Malgré les ratés de la campagne de vaccination, l’Algérie présente aujourd’hui l’un des meilleurs bilans au monde en matière de lutte contre le Covid-19 avec un nombre de contaminations quotidiennes ramené à moins de 100 et un nombre très limité de décès.
Les autorités y ont contribué par les mesures de confinement décrétées et la fermeture des frontières, les citoyens aussi par le respect des protocoles, mais le rôle des personnels de santé a été déterminant. Ils n’ont pas cessé de sensibiliser les citoyens sur les dangers du virus, et surtout sauvé beaucoup de vie, au détriment parfois de leur propre vie. Les derniers chiffres officiels parlent de 168 médecins emportés par le virus.
Tout récemment, le ministre de la Santé n’a pas pu retenir ses larmes en rencontrant la famille d’une femme médecin victime de la pandémie.
Des sacrifices sans contrepartie
Mais il semblerait qu’en contrepartie de ces sacrifices, il n’y a rien eu de concret. La grille des salaires n’a pas été révisée, la prime Covid-19 suspendue, les réformes oubliées. Si on peut bien comprendre que les réformes promises n’ont pu être mises en œuvre à cause de la situation exceptionnelle traversée par le secteur et le pays, il ne peut en être de même pour la suspension de la modique prime censée compenser les efforts supplémentaires et les risques pris par les ambulanciers, infirmier, médecins et autres.
« Les personnels de santé n’ont perçu que deux trimestres, et à partir de septembre 2020. Après, on n’a rien reçu et ce, jusqu’à aujourd’hui. Or, cette prime a été instituée par décret présidentiel mais elle n’est pas encore appliquée », a dénoncé jeudi 1er avril, le secrétaire général du Syndicat des paramédicaux (SNP) Lounes Gachi dans un entretien à TSA.
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« Sa suspension (de la prime, ndlr) alors même que la pandémie est toujours en cours suscite incompréhension et attentes chez les professionnels de la santé qui se sentent injustement abandonnés au milieu du gué, alors même qu’ils vivent encore des situations critiques », souligne pour sa part le Syndicat des praticiens de la santé publique (SNPSP), dans un communiqué publié samedi soir.
Mais la désillusion ne s’arrête pas là. Les différentes catégories déterrent la vieille revendication du respect de la liberté syndicale et, surtout, la relance des réformes du secteur et leur implication dans le processus, la révision de leur statut qu’ils qualifient d’ « inique ».
« La principale mesure incitative réside dans la réparation des anomalies et des dispositions iniques contenues dans le statut particulier de novembre 2009, et dont la proposition d’amendement est en souffrance auprès de la Direction générale de la Fonction publique depuis 10 ans. La mise en place de toutes ces mesures incitatives est une revendication du syndicat depuis 18 ans, mais nous sommes toujours en attente de leur concrétisation », rappelle le même syndicat.
La non-satisfaction d’une revendication vieille de près de deux décennies ne peut être imputable à la crise sanitaire et la concentration des efforts sur la lutte contre la pandémie.
Les autorités ont trop tergiversé sur cette question de réforme et de prise en charge des revendications des personnels de santé. Depuis juin 2002, le ministère de la Santé a aussi en charge la « réforme hospitalière » sans que le processus de réforme ne soit réellement mis en branle. La preuve, elle revient dans la liste des doléances du corps médical à chacun de ses mouvements de protestation.