En Algérie et partout dans le monde, il y a depuis quelques semaines moins de séries et films disponibles illégalement, c’est-à-dire via le piratage. Une enquête du journal français Le Monde explique comment le démantèlement par la justice américaine d’un réseau international de piratage en août dernier a tari l’une des principales sources qui alimentaient les plateformes et sites illégaux de téléchargement ou de streaming.
Sans pour autant, précise le journal, stopper l’afflux de nouveaux films et séries. Le coup de filet a eu lieu fin août à l’initiative de la justice américaine. Il avait permis de neutraliser une mystérieuse organisation, le réseau Sparks et s’était accompagné d’arrestations, de perquisitions et de saisie de serveurs dans une vingtaine de pays dans le monde, notamment à Chypre, en Norvège et aux Etats-Unis.
La soixantaine de serveurs saisis hébergeaient des « topsites », qui sont des espaces sécurisés disposant d’une grosse capacité de stockage qui permettaient aux membres du réseau de s’échanger les fichiers à très grande vitesse.
Sparks avait, explique Le Monde, la particularité de faire partie de la « Scene », « une entité mystérieuse née à la fin des années 1970, constituée de plusieurs groupes de pirates d’élite se livrant une guerre non armée mais sans merci » et dont l’objectif est d’être la première à « casser » les protections d’une œuvre, pour ensuite la mettre en ligne.
Le coup de filet a eu un effet immédiat : le nombre de releases (sorties) mis en ligne par la « Scene » a baissé de plus de 70 000 au mois de juillet à 30 000 en septembre. Il a aussi permis de lever le voile sur le fonctionnement de ce monde mystérieux. Les motivations des membres sont la reconnaissance de leurs pairs ou l’appât du gain, explique-t-on.
Le groupe Sparks est considéré comme l’un des acteurs-clés du téléchargement illégal dans le monde. Entre 2011 et 2020, il est à l’origine de la mise en ligne d’un nombre important de films à succès.
Cela ne signifie pas la fin du piratage
Ces publications, relève l’enquête, ont lieu parfois plusieurs semaines avant la sortie des films en question en DVD ou Blu-ray. Le procédé est parfois simple : les membres de Sparks prétendent être des vendeurs et parviennent à se faire envoyer les disques par les distributeurs, qu’ils copient ensuite en contournant les protections numériques, avant de se les distribuer entre eux sur leurs serveurs sécurisés.
« Paradoxalement, le code d’honneur de la Scene interdit normalement de diffuser les contenus mis à disposition par ses membres au-delà de ses propres serveurs, auxquels n’ont accès que quelques initiés. Mais bien vite, la recherche d’argent facile a poussé certains « sceners » à vendre des accès à ces espaces de stockage partagés, permettant à d’autres personnes de récupérer et de diffuser ensuite ces contenus beaucoup plus largement », souligne Le Monde.
Les seules actions du groupe Sparks auraient coûté des dizaines de millions de dollars de pertes aux studios de production de films, selon la justice américaine.
Le coup de filet constitue un coup dur pour le piratage, mais certains spécialistes rappellent que de telles opérations ont déjà eu lieu dans le passé et que la Scene s’est toujours relevée. On avance aussi le fait que l’organisation, malgré son rôle central, ne représente plus qu’une partie de l’écosystème du piratage d’œuvres.
On signale également que les sources des vidéos se sont largement diversifiées et les membres des sites, utilisant le protocole P2P (peer to peer, pair à pair) pour échanger tous types de fichiers, mettent également en ligne un nombre impressionnant de contenus de première main, qui se propagent ensuite sur les plates-formes plus fréquentées.
« Désormais, le P2P publierait quasiment autant de contenus frais que la Scene », explique un internaute officiant sur les trackers privés, cité dans l’enquête. Certains de ces sites P2P, notamment chinois, se sont même fait une spécialité de partager des Blu-ray plusieurs jours avant leur date de sortie – comme les membres de la Scene historique, assure-t-il.