Société

Plus de 300 migrants clandestins algériens décédés en 25 ans en tentant de rejoindre l’Europe

L’ONG allemande United for Intercultural Action (UNITED) a publié une liste de migrants décédés en tentant de rejoindre l’Europe de 1993  à 2018.

La liste a été réalisée par l’ONG qui a compulsé les articles de presse, les rapports d’organisations non gouvernementales et des documents officiels de forces de l’ordre et garde-côtes de différents pays afin de récolter des informations. Le résultat est une liste de 34.361 personnes décédées sur les routes migratoires, en Europe et partout ailleurs dans le monde sur une durée de plus de 20 ans.

La publication de la liste entre dans le cadre de la campagne « les politiques fatales de la forteresse Europe » (Fatal Policies of Fortress Europe), qui vise à « attirer l’attention du public et à dénoncer les politiques d’exclusion de l’Union européenne », a expliqué l’ONG sur son site web.

Plus de 330 Algériens dans la liste des migrants morts

La liste des migrants morts de l’ONG United recense 331 algériens décédés lors de tentatives de rejoindre clandestinement l’Europe. Ce chiffre ne comprend que les incidents où seulement des Algériens sont impliqués.

Dans d’autres incidents impliquant des migrants de plusieurs nationalités, l’ONG ne donne pas la part d’Algériens décédés mais seulement le nombre total de décès. Ainsi, lors du naufrage simultané de 3 bateaux en Méditerranée en avril 2009, 300 migrants algériens, somaliens et nigérians sont morts noyés.

De nombreux migrants algériens sont décédés dans des accidents, comme en mars 2018, lorsqu’un migrant algérien est décédé dans le port de Bruges en Belgique après avoir été bloqué entre deux véhicules alors qu’il tentait d’atteindre la Grande Bretagne ou encore en octobre 2017, lorsqu’un Algérien de 26 ans a été heurté par un camion alors qu’il se tentait de se cacher près de la frontière franco-espagnole à La Jonquera.

Les migrants algériens, comme ceux des autres nationalités ne se noient pas qu’en Méditerranée, nombre d’entre eux décèdent en tentant de traverser les cours d’eau européens qui font souvent office de frontières entre États.

Le fleuve Evros, qui marque la frontière naturelle entre la Grèce et la Turquie d’Europe est le plus meurtrier des cours d’eau européens pour les migrants. La liste recense près de 70 migrants décédés en tentant de traverser le fleuve pour passer de la Turquie en Grèce.

Des Algériens ayant traversé la mer avec succès ont péri noyés dans des cours d’eau européens, comme ce migrant algérien qui s’est noyé en avril 2018 dans la rivière Kopla alors qu’il tentait de passer la frontière entre la Slovénie et la Croatie.

Dans sa liste, l’ONG allemande rapporte également l’histoire d’Abdelkader. H, âgé de 19 ans, décédé noyé en novembre 2009, après s’être jeté dans la rivière Bilbao en Espagne pour échapper à des policiers qui l’avaient pris pour un voleur.

La liste des décédés lors de tentatives de migration vers l’Europe se veut instructive non seulement par le nombre de cas recensés mais également par les circonstances des décès. Ainsi, la liste montre clairement que, contrairement aux idées reçues, les décès de migrants clandestins ne surviennent pas qu’en Méditerranée par naufrage et noyade mais également sur les routes migratoires terrestres, en Afrique dans le Sahara ou même en Europe lorsque les migrants tentent de passer par les pays d’Europe de l’est ou la Turquie.

Les cas de décès de migrants de faim, de froid, dans des accidents ou par actes violents dans les rues des grandes villes européennes sont nombreux, tout comme les cas de suicide de migrants, notamment lors de leur détention, pendant ou après leur renvoi vers leurs pays d’origine.

La liste de l’ONG allemande recense près de 340 cas de suicides de migrants, dont beaucoup par défenestration dans des centres de rétention, des commissariats de police ou des lieux d’hébergement.

Parmi les cas de suicide recensés dans la liste, Mohamed Bouderbal qui s’est donné la mort à l’âge de 36 ans, en décembre 2017, alors qu’il était retenu dans la prison d’Archidona en Espagne.

Autre cas de suicide d’un migrant clandestin algérien en Europe : Habra Sahraoui qui s’est pendu alors qu’il était détenu dans un commissariat de Vienne en février 2005. La police autrichienne a tenté de dissimuler son cas à l’opinion publique, affirme l’ONG.

Les décès survenus à la suite de mauvais traitements des migrants par les forces de l’ordre, notamment celles chargées de la gestion des centres de rétention en Europe sont également nombreux. Parmi eux, un Algérien âgé de 34 ans est décédé en novembre 2017 à l’aéroport de Kastrup, au Danemark, après avoir subi des violences physiques infligées par la police de la ville.

Autre cas encore plus flagrant du mauvais traitement des migrants par les forces de police européennes : le décès en  2014 d’Abdelhak Goradia, âgé de 51 ans, à la suite de violences qui lui ont été infligées par la police française lors de son transfert vers l’aéroport Charles de Gaulles de Paris en vue de le renvoyer en Algérie.

La liste recense un autre décès tragique d’un Algérien. En Italie, en mars 2009, Salah Soudami, âgé de 42 ans est battu par des membres des forces de l’ordre italiennes dans le centre de détention de Ponte Gallera et est décédé après s’être vu refuser toute assistance médicale.

L’ONG a produit une carte du monde des décès de migrants qui montre que la migration est un problème mondial qui ne concerne pas seulement les pays méditerranéens et européens, même si les points chauds des tentatives de migrations clandestines se concentrent autour de la Méditerranée, de l’Afrique du Nord et du Sahara, lieux de passage souvent mortels à en croire la carte qui montre une forte concentration des décès de migrants sur ces régions.

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