L’Algérie a répondu aux sollicitations des pays de l’Union européenne qui veulent plus de gaz algérien, en posant une seule condition.
Pour réduire sa dépendance du pétrole et du gaz russes, l’Union européenne s’est tournée vers l’Algérie, entre autres pays disposant d’importantes réserves.
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L’intérêt pour le gaz algérien est d’autant plus marqué que le pays est déjà relié par des gazoducs au sud de l’Europe : un vers l’Italie et deux vers l’Espagne, dont un, qui traverse le Maroc, a été fermé en novembre 2021.
En avril dernier un contrat portant augmentation des livraisons à hauteur de 40 % a été signé avec l’Italie. Mais il n’y a pas que les pays de l’Europe du Sud qui veulent plus de gaz algérien.
L’Allemagne, l’un des pays les plus dépendants de la Russie, y songe aussi et la question a été posée par le journal Der Spiegel au ministre de l’Énergie algérien.
Dans cette interview publiée dimanche 19 juin, Mohamed Arkab n’y est pas allé par des chemins détournés pour expliquer aux Allemands, et d’une manière générale aux Européens, ce qu’ils doivent faire pour avoir plus de gaz d’Algérie.
Arkab souligne d’abord que l’Algérie a les moyens de livrer des capacités supplémentaires, vu que 50 % de ses capacités ne sont pas exploitées et que, de toute façon, elle a intérêt à étendre ses activités avec l’Europe.
Mais il y a une condition primordiale : les Européens doivent consentir les investissements nécessaires pour l’augmentation de la production en Algérie.
« Vous avez récemment convenu de livraisons supplémentaires avec l’Italie, soit une augmentation de 40 % du volume précédent. Pourriez-vous également vendre et livrer du gaz en Allemagne demain ? », demande Der Spiegel.
Réponse sans équivoque du ministre algérien : « Nous disons : si l’Allemagne veut nous acheter du gaz, alors ouvrez de nouveaux gisements avec nous. Comme les Italiens avec le groupe ENI. Nous avons un programme ambitieux de 39 milliards de dollars pour accroître la production dans le secteur pétrolier et gazier d’ici 2026. L’entreprise publique d’énergie Sonatrach lèvera la majorité, et nous recherchons des partenaires pour le reste. Nous espérons que les Européens ne changeront pas de cap et ne nous laisseront pas seuls avec les investissements. Pendant longtemps, l’Europe a défendu la protection de l’environnement et n’a fait aucune distinction entre le pétrole et le gaz. En conséquence, aucun investissement n’a été réalisé »
Le ministre de l’Énergie réitère que l’Algérie ne peut pas satisfaire toute la demande européenne, mais insiste sur le fait qu’elle a des capacités qui ne sont pas encore utilisées. « Nous voulons inviter les entreprises européennes à investir dans cette production », assure-t-il.
« L’Algérie est l’amie de tout le monde »
Évoquant le climat des affaires en Algérie, longtemps présenté comme un frein à l’investissement, Mohamed Arkab a souligné des améliorations, rappelant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur les hydrocarbures, dans laquelle ont été introduites de nouvelles normes pour les contrats, le partage de la production et les contrats à risque.
« Avant, les investisseurs devaient passer par diverses agences gouvernementales et c’était un peu opaque. Ils ont maintenant un interlocuteur clair et des processus simplifiés. Avec notre partenaire italien ENI, nous avons signé les premiers contrats dans le cadre de cette nouvelle loi », indique le ministre.
Celui-ci a été aussi interrogé sur la présence du groupe russe Gazprom en Algérie et si l’augmentation des flux vers l’Europe ne risque pas de fâcher Moscou.
« Gazprom est l’une des nombreuses entreprises qui investissent en Algérie. La société n’est actuellement engagée dans aucune production autre que l’exploration », répond Arkab, ajoutant que « l’Algérie est l’amie de tout le monde ».
« Nous sommes un fournisseur fiable et sûr. Nous sommes libres de contracter avec des entreprises européennes si c’est dans l’intérêt des deux parties. Bien sûr », dit-il.
Concernant la crise en cours avec l’Espagne, Mohamed Arkab a réitéré que l’Algérie respectera ses engagements contractuels.
« Nous avons prolongé les contrats avec l’Espagne et il n’y a eu aucun problème. L’Algérie respecte et respectera toujours ses obligations conventionnelles. Nous avons toujours été un fournisseur fiable pour l’Europe », assure-t-il, n’excluant toutefois pas une augmentation des prix du gaz.
« Les contrats d’approvisionnement sont réévalués tous les trois ans, tant en volume qu’en prix. Nous avons récemment renouvelé les contrats avec l’Italie et augmenté la capacité. C’est maintenant au tour de l’Espagne. Le prix mondial du gaz suit le prix du pétrole, et lorsque le prix du pétrole augmente comme c’est le cas actuellement, les prix du gaz font de même. Il est donc évident qu’une augmentation est en cours de discussion », a conclu le ministre algérien.