Le groupe musical malien Tinariwen devait se produire en tournée en Algérie en ce début d’année. Il devait animer des concerts à Alger, Tamanrasset, Constantine et Oran. Mais l’Office national des droits d’auteurs (ONCI), en charge de l’organisation de la tournée, a annoncé, le 1er janvier, le report pour la fin du mois en cours pour des « raisons technique propres au groupe ».
Ce n’est pas l’avis de Tinariwen qui a donné sa version dans un communiqué publié sur sa page Facebook, mardi 8 janvier 2019. La tournée a été annulée « non pas pour « des raisons techniques propres au groupe », comme annoncé par l’ONCI, mais pour un manquement d’ordre administratif de leur part. En effet, l’ONCI n’a pas effectué les démarches nécessaires afin de permettre au groupe de jouer sur le territoire algérien », a écrit le groupe musical.
Selon Tinariwen, l’ONCI aurait interdit aux musiciens d’animer un concert à Tamanrasset, « cette même ville qui nous a vu naître et où le cœur de notre public bat ». « Nous et une partie du public avions fait un long chemin pour venir, nous nous réjouissions tant de cette grande fête ensemble. Tout le groupe était présent sur le site du festival mais ne pouvait monter sur le plateau. Aucun représentant du festival n’a été présent pour nous accueillir, l’accès au backstage a même été refusé à deux membres du groupe et à notre manager. Le responsable du festival n’a même pas adressé la parole aux membres du groupe, ne les a pas salués et aucune annonce n’a été faite au public de Tamanrasset quant à l’annulation du concert. À ce jour, nous n’avons à aucun moment confirmé le report de cette tournée pour la fin du mois comme annoncé par l’ONCI. Nous sommes profondément choqués et touchés par ces comportements. Ce manque de respect de la part des organisateurs de cette tournée et du festival Dar Imzad envers le groupe, sa musique, et son public, est inacceptable et insupportable. C’est notre honneur qui a été touché… », s’est indigné Tinariwen.
« L’ONCI attend toujours la réponse… »
L’ONCI, dans un communiqué rendu public ce jeudi 10 janvier et parvenu à TSA, s’est dit étonné de la réaction du groupe. « Sans vouloir entrer dans une polémique (…) L’ONCI tient à souligner que le groupe Tinariwen invité pour, d’une part, participer à la cérémonie hommage à leur leader Ibrahim Ag Alhabib pour son action en faveur de la promotion de la musique touareg dans le monde et, d’autre part, pour une tournée, a été reçu avec tous les égards dus à leur rang et leur renommée tant à Alger qu’à Tamanrasset », a précisé l’office.
Il a indiqué que la soirée de clôture des Journées culturelles du Sud, lundi 31 décembre 2018 à Dar Imzad, siège de l’Association « Sauvez l’Imzad » de Farida Sellal, à Tamanrasset, était placée « sous le signe d’un vibrant hommage à Ibrahim Ag Alhabib dit «Abraybone ». « Elle s’est déroulée dans une ambiance digne du leader du groupe qui s’est produit sur scène avant de recevoir sa distinction plébiscité par le public. L’Office, tout en renouvelant sa considération au groupe Tinariwen , fidèle à son sens de responsabilité envers son public, a tenu à l’informer du report de la tournée pour des problèmes administratifs et techniques, sans entrer dans les détails et nous ne voyons pas dans cette démarche une quelconque manière de « manquer de respect au groupe, sa musique et son public », a ajouté l’ONCI.
Blues du désert
Originaire de Kidal, au nord du Mali, Tinariwen, qui fait dans l’Assouf ou blues du désert (généralement classé dans la World music), est le groupe musical targui le plus connu dans le monde. Ses deniers concerts en Europe et en Amérique du Nord étaient tous en Sold out. Il a, à son actif, une dizaine d’albums, le dernier en date, « Elwan » (Les éléphants), sorti en 2017, a eu un grand succès.
Sa musique, qui porte une forte charge revendicative, est construite à partir de guitares, de bass et de percussions, comme pour tous les groupes du style Ishumar, présents à Tamanrasset et dans les régions sahélo-sahariennes, à l’image d’Imarhan ou d’Imzad.
Ibrahim Ag Alhabib, 59 ans, est le leader historique de Tinariwen, un groupe qu’il a créé en Algérie et non pas en Libye comme cela est souvent écrit, au début des années 1980, avec, entre autres, Alhousseini Ag Abdoulahi, 51 ans, chanteur et musicien.