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Pour la presse française, Bouteflika doit partir

Pour la presse française, Bouteflika doit partir

La presse française estime ce mardi que le président Bouteflika doit partir et ne pas s’accrocher au pouvoir face à la contestation dont il fait l’objet. Les éditorialistes doutent de la sincérité des engagements contenus dans la lettre de Bouteflika.

Les cortèges de manifestants suscitent même le respect et l’admiration des éditorialistes qui invitent le pouvoir de Macron à ne plus se cacher derrière le paravent de la « non-ingérence ».

Le Figaro

« La non-ingérence est un paravent diplomatique bien commode. Et compréhensible. L’histoire, si intimement liée entre les deux pays, oblige évidemment la France aux formules les plus convenues pour commenter la situation en Algérie. Le moindre écart serait entendu comme du néocolonialisme. N’empêche, Paris retient son souffle. L’alternative qui consiste à dire Bouteflika plutôt que le chaos n’est plus tenable. La volonté du peuple algérien de tourner la page est dans la logique des choses. Non seulement parce qu’elle exprime le rejet d’un pouvoir grabataire. Mais aussi parce qu’elle manifeste l’exaspération d’une jeunesse assoiffée de justice sociale et de liberté contre un régime corrompu et clanique (…)L’Algérie se révolte et il est nécessaire de regarder la réalité en face. Mieux vaut en avoir conscience : qu’elle le veuille ou non, la France est désormais en première ligne ».

L’Union

« Comme il ne semble pas prêt à lâcher le pouvoir, le clan Bouteflika table sans doute sur un pourrissement du mouvement comme en 2009, 2011 ou 2013 pour s’en sortir. Il agite aussi le mouchoir du scénario syrien afin de faire peur à son peuple mais aussi à la communauté internationale. Avec en résumé : regardez ce qui s’est passé là-bas en 2011 et où on en est aujourd’hui. Mais il y a une donnée importante que le gouvernement algérien n’a visiblement pas prise en compte : contrairement aux précédents mouvements de la fin des années 2000 et du début des années 2010, la population algérienne n’a plus peur. Elle a l’expérience du passé et semble prête à ne plus reculer ».

Charente Libre

« (…) Si en 1968 de Gaulle avait gagné son pari, celui du «Raïs» algérien en fauteuil roulant parait hors de portée. Le candidat Bouteflika promet certes une grande «conférence nationale», une nouvelle Constitution et une autre présidentielle anticipée sans lui qui lui garantirait une sortie honorable. Mais faute de l’avoir préparé en temps voulu, le président algérien se retrouve aux urgences d’un legs explosif dépassant sa propre personne; celui d’un système concentré autour de l’armée et de l’oligarchie pétrolière, à bout de souffle et miné par une corruption devenue endémique (…) ».

Le Journal de la Haute Marne

« (…)Malgré cette mini-reculade, la tension a donc peu de chance de baisser. Les grandes manifestations annoncées pour vendredi prochain fourniront une bonne indication des rapports de force. Les Algériens ne se font aucune illusion : Bouteflika sera réélu. Des artifices de procédure, comme chaque fois, empêcheront d’autres candidats – sauf quelques faire-valoir – de se présenter. En fait, l’actuel président restera en fonction, ou sera artificiellement maintenu en fonction, le temps qu’il faudra pour préparer sa succession. Or cette dernière se fera dans la plus grande opacité, loin du regard des électeurs. C’est un clan aux contours imprécis qui dirige le pays. Composé du frère du président, Saïd, des services secrets, de hauts gradés de l’armée, de certains milieux d’affaires, il choisira une nouvelle clef de voûte pour un système à bout de souffle. Comme d’habitude. Mais, cette fois-ci, le peuple algérien ne semble pas vouloir se contenter d’un changement de tête. Il exige un bon coup de balai (…) »

République des Pyrénées

« (…)Gagner du temps semble donc la seule issue. C’est ainsi que Bouteflika promet maintenant aux Algériens une conférence nationale pour fixer la date d’une élection anticipée et un référendum pour une nouvelle constitution. Mais sans en préciser l’ordre chronologique. Les Algériens ont d’autant plus de raison de ne pas être dupe de l’opération que l’opposition qui doit participer à cette conférence nationale est divisée à l’extrême – de la gauche radicale aux islamistes – ce qui peut être l’ultime ruse d’un régime à bout de souffle, que de se présenter comme un dernier rempart face au chaos. Sauf si celui-ci n’attend pas ».

Républicain Lorrain

« (…)Nos gouvernements successifs ont ainsi toujours ménagé le pouvoir algérien, quitte à s’essuyer les pieds sur les droits de l’Homme. Avec, il faut le reconnaître, une bonne raison au moins : la crainte d’une mainmise islamiste sur ce pays si proche à bien des égards. Sauf qu’aujourd’hui la menace islamiste intérieure et la peur du chaos ne suffisent plus à justifier un statu quo vieux de vingt ans et un verrouillage de la vie politique. Mais arc-boutés sur leurs intérêts, les clans qui constituent l’appareil d’Etat sont animés par la peur de tout perdre. C’est pourquoi la promesse présidentielle d’une hypothétique transition politique ne semble pas de nature à faire retomber la colère ».

La Montagne

« Comment le camp présidentiel, s’exonérant de construire une alternance, peut-il, encore une fois, espérer que la jeunesse algérienne vote pour un cadre-photo ? La croit-il figée dans un traumatisme des années 90 qu’elle n’a pas vécu ? La peur du chaos, souvent agitée, ne sert plus de repoussoir quand un pays rêve d’une deuxième indépendance. Mais il est difficile d’effacer le voile d’inquiétude qui succède d’ordinaire à l’euphorie, tant les résistances sont fortes et l’absence de plan B, manifeste. La faute du pouvoir en place est grande au regard du rôle géopolitique majeur que joue l’Algérie. Tout devient à présent possible, même le pire (…) ».

La Presse de La Manche

« Le peuple algérien demande à ses dirigeants de ne pas se ridiculiser davantage, ni de ridiculiser les Algériens en reconduisant un président invisible, quasi muet, profondément handicapé. En outre, 20 ans de pouvoir suprême, c’est trop. Le temps du renouvellement est venu. Les clans qui, derrière Bouteflika, ont mis la main sur l’Algérie, doivent quitter le pouvoir. Une Algérie nouvelle a germé. Espérons qu’elle ne soit pas tuée dans l’œuf.

Il est temps de constater l’incapacité physique du président Bouteflika, parti se faire soigner en Suisse. Ce n’est pas une insulte à son égard, c’est une évidence. Ce qui justifierait le report des élections pour permettre au FLN de désigner son candidat et aux autres partis politiques d’adapter leur stratégie. L’Algérie a la possibilité d’évoluer en évitant une révolution sanglante. Ne pas saisir cette chance serait criminel. Ce grand pays a besoin de vivre en paix ».

La Croix

« Il faut se réjouir de la réaction de ces milliers de manifestants qui sont descendus dans les rues algériennes pour protester contre un nouveau mandat du président Bouteflika. Quel peuple, dont l’âge moyen est inférieur à 30 ans, accepterait d’être ainsi dirigé par un vieillard diminué, que l’on ne peut plus voir qu’en photo, un « président en cadre » comme le proclamait la foule ? Ces femmes et hommes disent le calme, la maturité, la tranquille assurance de la société civile qui émerge, sa soif de démocratie, son envie de vivre, tout simplement (…) »

L’Humanité (Patrick Appel-Muller)

« L’armée algérienne, qui a toujours joué un rôle majeur, semble immobile sous le portrait fi gé d’un président muet. Beaucoup dépendra de son attitude. Pour l’heure, elle n’a pas fait le choix d’une répression féroce. L’élan algérien est regardé avec circonspection par les grandes puissances, qui craignent une déstabilisation d’un pays stratégique en Afrique et dans le monde arabe. Mieux vaudrait, dit l’expérience, qu’elles ne s’en mêlent pas. Mais comment les démocrates et les progressistes français pourraient ne pas se sentir solidaires de cette vitalité que ne sont pas parvenus à récupérer les affairistes qui lorgnent sur les richesses algériennes ? »

Les Echos

« Hier, nous avons voulu faire le bien des Algériens sans eux, aujourd’hui, nous nous abstenons presque de leur dire ce qui est visiblement mauvais pour eux. Comment concilier franchise et respect, trouver un langage de vérité tel qu’il peut, tel qu’il doit en exister entre parties égales ? La réponse est loin d’être simple. La nouvelle question algérienne doit être replacée dans la problématique plus vaste du traitement des régimes autoritaires… »

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