Steve Jobs l’a rêvé, Apple va peut-être le faire. La marque à la pomme planche sur une technologie pour permettre à certains de ses objets connectés, comme l’Apple Watch, de mesurer le taux de glycémie des diabétiques, selon la chaîne américaine CNBC. D’après le média, qui se fonde sur trois sources au fait du dossier, les recherches seraient suffisamment avancées pour qu’Apple procède à des essais de faisabilité et se penche sur les questions de régulation. La technologie fonctionnerait sur des capteurs non-invasifs, des capteurs optiques qui enverraient une lumière à travers la peau afin de mesurer le taux de glucose dans le sang.
Google (Alphabet) a déjà annoncé (en 2014) explorer cette piste. Avec le géant pharmaceutique suisse Novartis, il a créé une coentreprise en 2016 pour développer des lentilles mesurant en continu le taux de glycémie, avec une analyse des larmes. Mais son projet a pris du retard et les essais cliniques sur les humains prévu pour 2016 ont été reportés sine die. Il ne semble ne plus être en avance sur la mesure de la glycémie.
Un marché conséquent pour Apple et Google
L’objectif des deux géants de la tech de mesurer le diabète en continu n’est pas révolutionnaire. Si la mesure du taux de glycémie est majoritairement effectuée par des prélèvements de gouttes de sang plusieurs fois par jour, en France par exemple, des capteurs de glucose en continu existent sur le marché pour les diabètes de type 1 et de type 2. Google et Apple peuvent tirer leur épingle du jeu s’ils trouvent le moyen d’augmenter la précision des mesures. Autre argument que les deux géants américains peuvent faire valoir: une totale discrétion, que ne garantissent pas les lecteurs en continu, et encore moins les systèmes classiques basés sur le prélèvement sanguin.
Par ailleurs, le marché visé est très important. Un adulte sur onze dans le monde est diabétique, selon la Fédération internationale du diabète. Et la maladie chronique touche notamment les pays développés, en raison du mode de vie sédentaire et de la suralimentation. Aux Etats-Unis, plus de 20 millions de personnes sont touchées. En 2014, les dépenses de santé autour du diabète atteindraient 281 milliards de dollars, selon Research and Markets. Novartis et Google espèrent avoir une large part du marché. Ils comptaient fixer un prix de 4.500 dollars par an par patient pour leur lentille connectée aux Etats-Unis.
Des données qui pourraient intéresser les labos
Par ailleurs, au vu du nombre de diabétiques, et du potentiel qu’auraient Google et Apple pour démocratiser leur technologie et recueillir des données santés massives (il faudra certainement que les patients soient volontaires et que les données soient anonymisées pour respecter la législation en la matière), et potentiellement de les analyser, ces technologies pourraient aiguiser l’appétit des laboratoires pharmaceutiques. Car accumuler et étudier ces données peuvent leur permettre d’améliorer leur compréhension de la maladie chronique et de mieux cerner les comportements des populations afin de mieux adapter leurs produits. “Beaucoup de patients atteints de diabète de type 2 sont soit non diagnostiqués, soit mal contrôlés“, expliquait à La Tribune le cabinet de conseil IDEA Pharma.
Les laboratoires pharmaceutiques, à l’image de Sanofi qui a créé Onduo avec Google (devenu Alphabet), puis s’est associé à la Division Sciences de la vie de Google, suivent déjà activement la piste du recueil et de l’analyse de données de patients pour potentiellement innover et fidéliser les patients. Une nécessité, alors que les poids lourds de l’industrie pharmaceutiques connaissent des difficultés dans le domaine, en raison de la forte concurrence du secteur et des pressions sur les prix outre-Atlantique.
Ne pas se faire semer par les acteurs innovants
Reste un risque pour les géants de la tech: se faire ubériser, comme pourraient l’être les poids lourds de l’industrie pharmaceutique dans l’avenir. L’arrivée de nouveaux dispositifs médicaux conçus par de nouveaux acteurs pourrait rebattre les cartes du secteur. Comme l’expliquait à la Tribune Vincent Genet, directeur associé du cabinet de conseil Alcimed, “l’apparition d’un système auto-générateur de l’équivalent d’une insuline” pourraient arriver “d’ici 10-15 ans” et “révolutionner le traitement du diabète”.
Déjà, Medtronic a reçu le feu vert de la FDA pour commercialiser un “pancréas artificiel” aux Etats-Unis. Ce dispositif médical basé sur des algorithmes mesure le niveau de glucose en temps réel pour connaître la quantité adaptée d’insuline à injecter dans le corps. Le système n’est pas totalement automatisé, puisque le nombre de doses à injecter doit être programmé par le patient. Mais Medtronic prévient:“Nous sommes proches de fournir un système entièrement automatisé.” Google et Apple n’ont pas de temps à perdre…
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