Les médecins résidents de la plupart des CHU du pays ont entamé, ce mardi 14 novembre, une grève de deux jours.
Le mouvement de grève, également suivi au niveau des EPH et autres établissements de santé, est accompagné de rassemblements des résidents au sein des structures de santé.
Le taux de suivi de la grève est estimé par les représentants du Collectif autonome des médecins résidents algériens (Camra), organisateurs du mouvement, à 70% au niveau du CHU Mustapha et au CHU de Beni Messous, à 60% au CHU de Tizi-Ouzou et à 80% au niveau du CHU de Sidi Bel-Abbès.
Au CHU Mustapha Pacha d’Alger, plusieurs centaines de résidents, 300 selon les membres du Camra, se sont rassemblés dans la cour principale de l’hôpital dès 9 heures du matin.
Parmi les revendications des médecins résidents figure le service civil, jugé comme étant « anticonstitutionnel » par le Dr Hadjab, résidente en radiologie au CHU de Beni Messouss. « Nous demandons l’abrogation du service civil dans sa forme actuelle, ainsi que l’annulation de son caractère obligatoire en l’absence de mesures incitatives », explique-t-elle.
Elle a insisté sur le caractère injuste du service civil, rappelant que les autres diplômés universitaires n’y sont pas soumis. « Tous les universitaires algériens ont été formés gratuitement, on ne comprend pas pourquoi les médecins sont les seuls à être soumis au service civil sans contrepartie équitable ni incitation financière. C’est une situation injuste car, par exemple, les ingénieurs en pétrochimie qui ont bénéficié d’une formation gratuite au sein des universités algériennes se battent pour partir au Sud car ils y sont incités par des salaires conséquents ! », s’est insurgée le Dr Hadjab.
Le Dr Benaïssa Lilia, résidente en gynécologie au CHU Mustapha Pacha, qualifie les conditions de travail au sein de son service de « déplorables », à cause du « manque de moyens, de lits et de matériel pour prendre en charge les patientes dans de bonnes conditions ».
« La gynécologie est un service délicat, où la famille est atteinte. Le jour de l’accouchement est censé être un moment heureux mais ce n’est généralement pas le cas, car durant les hospitalisations, nous sommes menacés, nous travaillons sous pression, dans la peur et sans moyens, ce qui n’est pas dans l’intérêt des patientes », déplore le Dr Benaïssa. Et d’ajouter : « Cette grève est un appel au peuple parce que les citoyens sont les premiers concernés. Il faut qu’ils sachent que nous faisons ça pour eux, nous sommes ici pour les soigner, les servir et non pour leur faire du mal ».
Les résidents en chirurgie dentaire ont rejoint le mouvement car ils se sentent « concernés et touchés par les revendications des médecins résidents », selon le Dr Mouhoun, résident en pathologie et chirurgie buccale au CHU Mustapha. « Notre formation est incomplète, il y a des stages que nous ne faisons pas faute de moyens et d’encadrement. L’implantologie reste un luxe en Algérie alors que dans d’autres pays, c’est un acquis », se plaint le représentant des chirurgiens-dentistes résidents.
Le projet de loi de santé qui sera prochainement débattu au Parlement a accru le mécontentement des médecins résidents. Le Dr Ariche, résident en urologie au CHU de Tizi-Ouzou, qualifie ce projet de loi de « code pénal » et affirme que parmi les revendications du collectif des médecins résidents, figure « le rejet de la pénalisation de la fonction de médecin ».
« Nous voulons revoir le nouveau code de la santé qui a été rédigé sans qu’on prenne en compte les suggestions des médecins résidents et sans qu’aucune concertation avec les premiers concernés ne soit menée », réclame le Dr Nadir Mellah, résident au CHU de Sidi Bel-Abbès.
Le service national est un autre point soulevé par les médecins résidents grévistes. Le Dr Hadjab dénonce « la note du ministère de la Défense nationale qui classe les médecins au même rang que les insoumis et les exclut d’une dispense du service national à laquelle ils auraient dû avoir droit ».
Les médecins ne se contentent pas de protester, mais ils proposent une alternative. « Laisser le choix aux médecins résidents hommes entre le service civil et le service militaire, sans les obliger à faire les deux », détaille le Dr Mellah.