Abdelmadjid Tebboune est officiellement président de la République depuis jeudi 19 décembre. Pour le début de son mandat, il est attendu sur deux dossiers qui ne peuvent attendre : le traitement à réserver à la crise politique en cours et ses retombées ainsi que les mesures qu’il compte engager pour relancer la machine économique, en panne depuis plusieurs mois.
Le hasard du calendrier a fait que la première sortie de Tebboune président sera l’inauguration de la foire de la production nationale, ce dimanche 22 décembre. L’occasion pour lui d’entendre de vive voix les préoccupations des opérateurs économiques, devant lesquels il devrait aussi expliciter sa démarche pour encourager l’investissement productif et faire face à la baisse continue des revenus pétroliers.
Si, sur le plan politique, l’urgence est de convaincre le hirak de sa réelle volonté de provoquer un « changement radical », la sphère économique attend des mesures en faveur de l’entreprise et l’amélioration du climat des affaires. « Nous devons amorcer le processus du changement par la définition d’une vision qui canalisera nos potentiels, exprimera nos ambitions autour d’une promesse d’un avenir pour la jeunesse de notre pays », lit-on dans un document du Forum des chefs d’entreprise qui propose de prendre une panoplie de mesures, parmi lesquelles un rééchelonnement de la dette, des facilitations dans l’octroi de crédits bancaires, le règlement des situations en retard de paiement, la révision des décisions concernant les dispositifs SKD/CKD…
Le FCE et les autres organisations patronales sont conscients que si de telles mesures devraient être prises, elles seront le fait du futur gouvernement, mais rien n’empêche le président d’annoncer ses premières décisions dès aujourd’hui. À défaut, il est attendu de lui des engagements clairs et surtout un discours rassurant, susceptible de constituer un premier pas dans le rétablissement de la confiance. « Les premiers messages et les premières actions concrètes seront décisifs (…) Le moral des entrepreneurs est au plus bas. Certaines sources parlent de 500.000 emplois perdus et même davantage.
Il y a une hésitation dans la mise en place de nouveaux projets, le gel des projets existants, etc. À mon avis un discours mobilisateur, et de confiance et la relance des projets gelés pourront ralentir cette spirale infernale. Le message doit être clair et sans ambiguïté : remettez-vous tous au travail sans peur ni crainte, respectez la loi et accompagnez les chefs d’entreprises et l’investissement et vous n’aurez rien à craindre. Nous ouvrirons ainsi une nouvelle page d’avenir », disait, avant même la prestation de serment de M. Tebboune, Hassan Khelifati, le PDG d’Alliance Assurances qui s’apprête à lancer une nouvelle organisation patronale.
Le nouveau chef de l’État, dont tout le monde se souvient de la petite guerre qu’il déclarée à certains hommes d’affaires et qui lui avait coûté sa place de Premier ministre en 2017, n’est pas sans savoir que son arrivée au sommet du pouvoir pouvait susciter des inquiétudes à cause de ses positions tranchées vis-à-vis de certains dossiers comme les importations ou l’assemblage automobile. Aussi, il a lancé un premier message rassurant dès la conférence de presse qui a suivi son élection. Il avait laissé entendre que « les hommes d’affaires honnêtes trouveront toute leur place dans la nouvelle Algérie » et que les ajustements qu’il compte apporter aux importations porteront essentiellement sur la lutte contre la surfacturation.
Dans son discours d’investiture, il avait réitéré le même engagement à rompre avec les pratiques du passé, y compris dans la décision économique.
Ce qu’il dira aujourd’hui aux opérateurs économiques, aux producteurs précisément puisqu’il sera à la foire de la production nationale, sera sans doute important, ne serait-ce que pour amorcer un début de dissipation des inquiétudes.
Le chantier qui l’attend est immense et délicat, car à la baisse des prix du pétrole et la fonte des réserves de change est venu se greffer un climat de défiance des investisseurs tant nationaux qu’étrangers. « Le grand chantier de notre nouveau président, c’est la confiance », résume le président du FCE.