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Présidentielle : ce danger que seul le pouvoir refuse de voir

Présidentielle : ce danger que seul le pouvoir refuse de voir

L’opposition, divisée sur tout, a trouvé son consensus : la prochaine élection présidentielle est porteuse de dangers.

De passage sur TSA lundi 11 février, Louisa Hanoune a résumé le sentiment d’une bonne partie de la classe politique algérienne vis-à-vis de l’échéance qui approche à grands pas. « On est terrifiés ! », a-t-elle lâché. « Ce n’est pas une simple élection, c’est un rendez-vous avec notre destin », appuie-t-elle.

La secrétaire générale du Parti des travailleurs n’est pas la seule à redouter que le scrutin à venir débouche sur une situation incontrôlable. Le président du RCD estime lui aussi que les choses peuvent déraper à tout moment. « Le quadruple quinquennat de l’actuel chef de l’Etat s’achève comme il avait commencé, à savoir dans une crise politique et morale qui risque à terme de déboucher sur des désordres qu’aucune force nationale à l’intérieur ou à l’extérieur du système ne pourra canaliser », déclare Mohcine Belabbès à Liberté.

Les mises en garde ont commencé dès le milieu de l’été, lorsque le président du MSP avait lancé son initiative de consensus national. Abderrazak Makri avait alors estimé qu’il n’y avait pas suffisamment de garanties pour une élection libre et que le scrutin était porteur de dangers pour le pays, d’où son idée de conférence nationale devant déboucher sur un report.

Ali Benflis, Abdallah Djaballah, Ali Laskri, pour ne citer que ceux-là, ont tous parlé du « danger » de l’option d’un cinquième mandat, de l’organisation de la présidentielle dans cette conjoncture.

Pour résumer, l’opposition est persuadée que l’équation est simple : d’une part, le président Bouteflika n’a pas beaucoup de chances de gagner à la régulière vu son état de santé et le bilan de sa gestion, de l’autre, le pouvoir n’envisage pas l’idée d’une défaite de son candidat. D’où, redoute-t-on unanimement, un recours massif à la fraude et une réaction de la rue.

Comme l’explique Louisa Hanoune, les adeptes du statu quo résisteront au changement. « On ne sait pas ce qui va se passer d’ici là, quelle sera la réaction des citoyens. Notre crainte c’est qu’il y ait des provocations. Tous les citoyens se demandent ce qui va se passer. Le terrain des élections est très mouvant. Aujourd’hui, il apparaît que la majorité a une défiance vis-à-vis du vote. Mais si les avis changent et les citoyens investissent les bureaux de vote et tentent d’empêcher la fraude, qu’est-ce qui va se passer ? On sait que les prédateurs et l’oligarchie vont avoir recours à la violence et ils en ont les moyens. Et si une personnalité faisait comme Gaiado au Venezuela ? »

La comparaison est sans doute trop forte, mais le risque évoqué ne relève pas de la paranoïa, d’autant plus que l’appréhension est partagée par l’ensemble de la classe politique qui tient ses craintes de plusieurs éléments palpables.

Il y a d’abord la position inconfortable, du moins comparativement aux scrutins précédents, du candidat du pouvoir. Abdelaziz Bouteflika est sérieusement amoindri par la maladie et sa candidature pour un cinquième mandat est difficilement vendable auprès d’une partie de la population qui a vécu celui qui s’achève comme un supplice. En 2014 déjà, le président candidat avait cédé du terrain par rapport à l’élection de 2009 à cause principalement de son état de santé qui n’était pourtant pas ce qu’il est aujourd’hui.

Certes, la crise, la vraie, n’est pas encore là et le pouvoir a pris ses devants en évitant toute mesure impopulaire ou antisociale dans la Loi de finances pour l’exercice en cours. Le système des subventions demeure généreux, les transferts sociaux maintenus à des niveaux élevés et aucune nouvelle taxe ou augmentation des tarifs des prestations publiques n’ont été introduites.

Mais la perspective de jours difficiles est réelle avec la poursuite de l’érosion des réserves de change et la volatilité du marché pétrolier. Cette angoisse sociale peut s’exprimer dans les urnes dès ce 18 avril.

Surtout, l’éclipse quasi-totale du chef de l’Etat, les doutes sur la paternité de certaines décisions importantes, l’émergence d’une oligarchie décriée de toute part, bref, toutes les péripéties du quatrième mandat ont donné naissance à un ardent désir de changement auprès d’une partie de la population.

En plus clair, rien ne plaide pour une victoire facile du candidat du pouvoir en cas de forte participation et l’éventualité de voir celui-ci accepter une telle fin est encore du domaine de l’impossible. « Le terrain politique est très mouvant », prévient Louisa Hanoune. Comprendre : on ne peut exclure totalement un vote en masse ni une réaction des citoyens pour défendre leur choix.

Plus inquiétant encore, le gouvernement a donné un avant-goût du traitement à réserver à ceux qui seraient tentés par des actions de rue. « L’Etat a prouvé par le passé qu’il peut maîtriser la rue », a déclaré le Premier ministre Ahmed Ouyahia au début du mois. Tout cela n’augure rien de bon…


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