Le MSP a décidé, samedi 28 septembre, de ne pas prendre part à la prochaine élection présidentielle prévue le 12 décembre. C’est le troisième parti islamiste à prendre une telle décision, avec le PLJ de Mohamed Said mercredi et le PJD d’Abdallah Djaballah samedi.
Ils rejoignent ainsi la majorité des formations et des personnalités de l’opposition qui ont décidé de bouder le scrutin. Ce dernier, s’il est maintenu, à de fortes chances de se résumer à une opposition entre des anciens figures du régime honni de Bouteflika.
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Deux arguments principaux sont mis en avant par ces partis et personnalités pour expliquer leur choix de boycotter la présidentielle : l’absence de garanties et la poursuite du Hirak.
Le pouvoir a décidé de convoquer le corps électoral, sans prendre la moindre mesure d’apaisement. On assiste même à un durcissement, avec une explosion des arrestations d’opposants et des militants du Hirak sont arrêtés. Même les journalistes ne sont pas épargnés.
Aujourd’hui, au moins 80 détenus d’opinion dorment en prison en attendant leur jugement éventuel. Les médias publics sont fermés à l’opposition et la presse indépendante est soumise à de fortes pressions. Le régime est en train de remettre en cause les acquis démocratiques de ces dernières années : liberté d’exercice politique, liberté des médias…
Officiellement, la gestion de l’élection du 12 décembre est confiée à une « autorité indépendante ». Mais personne n’est dupe. La création de cette autorité est l’aboutissement d’un processus de dialogue contesté mené par le pouvoir et auquel aucune personnalité crédible n’a pris part.
Dans ce contexte, le Hirak se poursuit. Il s’est renforcé ces deux derniers vendredis, avec une revendication principale : le rejet de la présidentielle dans les conditions actuelles. Pour les manifestants, accepter d’aller à la présidentielle dans les conditions actuelles équivaudrait à cautionner un prolongement du régime Bouteflika.
Pour le moment, la liste des candidats à la candidature leur donne raison. « Le casting électoral proposé aux Algériens ressemble pour l’instant à un conseil des ministres du président sortant », résumait hier samedi le journal français Le Monde.
Les ingrédients d’une élection fermée sont réunis. Il reste une inconnue : comment fera le pouvoir pour tenter de la crédibiliser ? En interne, la stratégie est connue depuis maintenant plusieurs semaines. « Le Hirak est minoritaire et les Algériens veulent voter pour sortir leur pays de la crise », répètent les partisans du pouvoir.
A l’international, le pouvoir va sans doute utiliser la même méthode que pour les précédents scrutins, à savoir inviter des observateurs internationaux. Pour l’élection annulée du 28 avril dernier, 400 observateurs étaient prévus.
« Le Gouvernement et l’Etat veilleront à la transparence de la prochaine élection présidentielle qui verra la présence de 400 observateurs étrangers représentant la Ligue arabe, l’Union africaine, l’Organisation de la coopération islamique, l’Union européenne et les Nations unies », avait déclaré Ahmed Ouyahia, alors Premier ministre.
Pour l’élection du 12 décembre, la présence des observateurs de la Ligue arabe, l’Union africaine, l’Organisation de la coopération islamique est acquise et leurs compte-rendus seront sans doute favorables. La question est de savoir ce que va décider l’Union européenne.
La présence d’observateurs européens donnera un crédit certain au scrutin, quelles que soient leurs conclusions ultérieures. Selon nos sources, rien n’a encore été décidé à Bruxelles. Mais hier, un élément nouveau est intervenu. Le Parlement européen a pris position en faveur du Hirak en critiquant le processus électoral en cours.
Ceux qui manifestent en Algérie « demandent effectivement bien sûr que des élections soient organisées mais pas sous le modèle actuel, pas sous le régime actuel, pas avec les règles du régime actuel. Ils demandent qu’il y ait des changements au niveau de la Constitution, qu’il y ait un pluralisme politique, qu’il y ait une liberté d’expression et d’association, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui en Algérie », a expliqué Marie Arena, présidente de la sous-commission des droits de l’Homme du Parlement européen.
Bruxelles va-t-il prendre la position du Parlement européen pour trancher la question de l’envoi d’observateurs pour le scrutin du 12 décembre ?