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Présidentielle tunisienne : Kaïs Saïed, l’homme que personne n’attendait

Présidentielle tunisienne : Kaïs Saïed, l’homme que personne n’attendait

Pris par leur propre révolution, les Algériens n’ont pas trop regardé du côté de la Tunisie où se déroule pourtant un événement phare : la deuxième élection présidentielle depuis la révolution de 2011 qui a fait entrer ce pays voisin dans une nouvelle ère.

L’organisation du scrutin après le décès du président Essebsi prouve que la démocratie tunisienne se porte bien et que tout n’est pas à jeter dans les printemps arabes. Le pays n’a pas tourné en rond, comme c’est le cas de l’Algérie depuis que le président Bouteflika a été poussé vers la sortie en avril dernier.

La campagne électorale s’est déroulée dans le calme avec comme point d’orgue le débat télévisé entre les candidats, une première dans le monde arabe. Le premier tour qui s’est déroulé le jour même où, en Algérie, le chef de l’État par intérim fixait la date d’une élection incertaine, a donné lieu à une grosse surprise.

Kaïs Saïd, un illustre inconnu -du moins en Algérie- crée la surprise en arrivant en tête. Cet universitaire de soixante ans, surnommé Robocop pour sa façon d’entonner ses discours, ou encore Monsieur Propre, a même de très fortes chances de succéder au défunt président Béji Caïd Essebsi au palais de Carthage.

Les premiers résultats du premier tour l’accréditent de près de 20% des voix, devant l’homme d’affaires Nabil Karoui et le candidat d’Ennahda, Mohamed El Mouro, au coude à coude avec respectivement 15 et 13% des suffrages.

M. Karoui étant détenu pour des accusations de fraude fiscale, il pourrait se voir disqualifier s’il est condamné d’ici le second tour au profit d’El Mouro.

Dans tous les cas de figure, Saïed garderait ses chances, estiment les observateurs de la scène tunisienne. Le candidat indépendant a fait du rejet du « système » son crédo, et cela tombe plutôt bien car la classe politique telle qu’elle est configurée depuis la révolution semble déjà lasser les Tunisiens. C’est d’ailleurs un autre candidat qui se présente comme « antisystème » qui est arrivé en deuxième position, Nabil Karoui en l’occurrence. Mais contrairement à celui-ci, propriétaire de la chaîne Nessma TV et président de Qalb Tounès, Saïed n’a ni média ni parti politique derrière lui. Il s’est présenté en candidat indépendant et le noyau de ses soutiens est constitué de ses étudiants.

Aux apparitions sur les plateaux télés qui font courir tous les candidats, le professeur de droit constitutionnel préfère le travail de terrain, le contact direct avec les électeurs.

Sa campagne électorale fut atypique et il a su faire de ce qui devait être un handicap, un atout majeur. « Je suis un candidat indépendant, je ne représente aucun des partis. Je fais ma campagne par mes propres moyens, et je refuse toute aide », explique-t-il.

Plutôt conservateur dans ses positions, il s’est opposé à certains aspects des réformes engagées par Essebsi, comme l’égalité dans l’héritage, séduisant une partie de l’électorat d’Ennahda, ce qui explique peut-être la défaite du candidat islamiste au premier tour.

Pour les Algériens, l’éventuelle élection de Kaïs Saïed pourrait s’avérer une bonne nouvelle. Voici sa réponse quand il a été interrogé sur le pays qu’il visitera en premier s’il est élu : « Sans aucune hésitation, ma première visite à un pays étranger après mon élection sera l’Algérie ».

Pour tout le Maghreb aussi, puisque le candidat semble avoir saisi l’enjeu crucial de l’édification maghrébine. « Nous ne pouvons pas changer la géographie, mais nous pouvons changer l’Histoire. Nous devons chercher de nouvelles méthodes pour la coopération, l’union, l’ouverture des frontières. Nous devons rompre avec les anciennes approches de l’État fédéral ou de la confédération. Nous devons construire de nouvelles relations avec l’Algérie, le Maroc, la Libye et la Mauritanie. C’est notre espace géographique. Construisons une nouvelle Histoire différente de celle que nous avons vécue. Le Maghreb arabe doit être concrétisé réellement sur le terrain. Nous devons imaginer de nouveaux moyens et de nouvelles formes pour y arriver », promet-il.

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