Cinquième mandat ou pas de cinquième mandat ? C’est la question de l’heure en ce mitan de la saison estivale, à huit mois du scrutin présidentiel de 2019.
| LIRE AUSSI : Pourquoi le scénario d’un 5e mandat pour Bouteflika est presque inéluctable
Chaque jour qui passe en fait nous apporte de nouveaux éléments de réponse, tendant tous dans le sens de la confirmation de ce que l’on ne savait déjà que trop bien. À savoir qu’au sein du système, le consensus est fait pour la reconduction du président sortant et qu’aucun autre plan que celui de la « continuité » n’est envisagé pour le moment.
Dernier élément en date à confirmer la thèse de l’unanimité autour de l’option, le niet signifié à Abderrazak Makri, porteur d’un « projet de sortie de crise ». Même drapée de l’euphémisme de « construction d’un consensus économique et politique national », la substance de l’initiative du chef du MSP porte en fait -et tout le monde le sait maintenant- sur la recherche d’une alternative consensuelle au président Bouteflika.
| LIRE AUSSI : Initiative de Makri pour une transition : un accueil froid de l’opposition et du pouvoir
Son rejet unanime, instantané et avec une rhétorique quasi identique par les principaux partis proches du pouvoir, et même par l’institution militaire invitée directement par M. Makri à accompagner le processus de transition, est un signe qui ne trompe pas quant à la nature du consensus que tiennent les différentes composantes du système. Bouteflika est une ligne rouge et il est évident maintenant qu’il ne s’agit pas d’une simple surenchère de Djamel Ould Abbes.
Pour ceux qui trouvent encore matière à douter, les patrons du FLN et de TAJ ont assumé publiquement qu’ils sont déjà en campagne pour la réélection du président sortant et le chef du RND a annoncé le renforcement prochain du front du cinquième mandat par le ralliement à la cause commune de nombreux partis et organisations.
Certes, il manque un élément fondamental pour que se complète le puzzle et s’évaporent les dernières illusions de l’opposition et de tous ceux qui ne souhaitent pas voir le pays dirigé pour cinq autres années par un président âgé et physiquement diminué. La pièce manquante, c’est la volonté du premier concerné. Si Bouteflika n’a pas parlé, il n’a pas forcément rien demandé.
Le mutisme prolongé du chef de l’État sur une question qui le concerne en premier lieu et cruciale pour le devenir de la nation a donné lieu à une profusion de théories, dont la plus farfelue- et la plus insistante- voit dans la subite agitation des chefs des partis de la majorité une forme de « pression » sur le président Bouteflika pour le dissuader de passer le relais dans le but évident, accuse-t-on, de sauvegarder privilèges et intérêts.
Un dilemme en somme pour les partisans déclarés du cinquième mandat : assumer les conjectures qui accompagnent leurs présumées « pressions » ou vendre la mèche et trahir les réelles intentions du chef de l’État en reconnaissant qu’ils agissent en fait sur son injonction expresse.
Et c’est peut-être ce que vient de faire Ahmed Ouyahia d’une manière sibylline, toute en finesse, lorsque, à l’issue de sa rencontre avec Amar Ghoul, il a affirmé que lui et ses pairs n’exerçaient aucune pression sur le président Bouteflika qui, du reste, « n’est pas du genre à subir des pressions ».
Traduits, les propos très diplomatiques du chef du RND peuvent bien signifier que lui et ses pairs ne font qu’exécuter une volonté, donc une injonction, présidentielle.
Reste à élucider deux questions qui demeurent pour le moment sans réponse. Pourquoi, si tel est le cas, le président sortant ne fait-il pas part clairement de sa volonté de continuer et, surtout, pourquoi un tel empressement à lancer la campagne pour une échéance qui ne surviendra que dans huit mois ?